Méthanisation : Un épandage collectif des digestats avec la Sica Terragr’Eau
En Haute-Savoie, les éleveurs de la zone des eaux d’Evian confient leurs effluents à une unité de méthanisation. Ils ont créé une Sica pour gérer collectivement l’épandage des digestats.
En Haute-Savoie, les éleveurs de la zone des eaux d’Evian confient leurs effluents à une unité de méthanisation. Ils ont créé une Sica pour gérer collectivement l’épandage des digestats.
Depuis quatre ans, 43 agriculteurs du Pays de Gavot (Haute-Savoie) confient leurs effluents d’élevage à l’unité de méthanisation Terragr’Eau portée par la communauté de communes et la société d’exploitation des eaux minérales d’Evian (Groupe Danone). Ils représentent 70 % des élevages de l’impluvium, la zone qui recueille les eaux de pluie à l’origine de la célèbre eau minérale. L’unité de méthanisation a été créée pour préserver cette ressource. Destinée à produire du biogaz en injection directe, elle appartient à la communauté de communes qui a délégué pour quinze ans son exploitation à la filiale du groupe lyonnais Serfim, spécialiste du recyclage des déchets.
Les agriculteurs, situés dans un rayon de 15 km, se sont engagés à fournir la totalité de leurs effluents à la SAS Terragr’Eau, exploitante du site, qui en assure la collecte. En revanche, ils ont souhaité conserver la maîtrise des digestats. À cet effet, ils ont créé une Sica pour gérer collectivement l’épandage et une Cuma pour acquérir du matériel en commun, qui portent le même nom : Terragr’Eau. L’unité de méthanisation traite 34 000 tonnes de matière par an dont 90 % d’effluents d’élevage. Le reste comprend des biodéchets non carnés issus des collectivités ou de grandes surfaces, des huiles alimentaires usagées, des déchets de tonte et des fonds de silos à céréales. Elle est équipée d’un séparateur de phases. Le digestat solide est composté avec du broyat de déchets verts issus des déchetteries. Elle produit 28 000 m3 de digestat liquide et 2 500 tonnes de compost. Les 43 exploitations totalisent une surface d’épandage de 1 400 hectares, essentiellement des prairies permanentes.
Quatre tonnes à lisier de 6,5 à 15 m3
« En début d’hiver, je réalise pour chaque agriculteur un plan prévisionnel de fumure pour l’année à venir en fonction du prévisionnel de production de l’unité de méthanisation, explique Simon Bonnard, responsable agro-environnement de la Sica Terragr’Eau. En fin d’hiver et au printemps, quand le moment d’épandre est venu, je les rappelle pour confirmer. En été, c’est eux qui m’appellent pour faire les épandages après la première coupe. En règle générale, nous épandons 30 à 40 m3 de digestat par hectare et par an, en deux - le plus souvent - ou trois passages. »
Les quantités et les valeurs des effluents collectés étant connues, chaque agriculteur retrouve ses unités fertilisantes mais il n’est pas tenu de toutes les reprendre. Les surfaces d’épandage s’étagent entre 380 et 1 200 mètres d’altitude. Ce qui permet d’étaler le pic de travail de fin février jusqu’au 8 avril. Le compost est épandu à raison de 12 à 15 t/ha ou de 6 t/ha sur les parcelles recevant du digestat liquide la même année. L’objectif est de faire un apport tous les 3 à 4 ans.
La Cuma a fait l’acquisition d’un tracteur à guidage GPS et de quatre tonnes à lisier équipées de pendillards à patins (deux de 15 m3, une de 10 m3 et une de 6,5 m3). Ainsi, même les parcelles les plus difficiles peuvent être fertilisées. Pour le compost, elle possède deux épandeurs à hérissons verticaux. Elle emploie un chauffeur à l’année. Pour les pointes de travail, la Sica fait appel à des entreprises de travaux agricoles, qui interviennent avec leur propre matériel ou avec les tonneaux de la Cuma.
Simon Bonnard, responsable agro-environnement. « L’épandage collectif des digestats a permis de recréer sur la zone une dynamique agricole et de reconnecter les agriculteurs entre eux. »
Un coût d’épandage de 2 €/m3
Les agriculteurs ne perçoivent aucun revenu du biogaz produit par l’unité de méthanisation. En contrepartie, le coût d’épandage du digestat ne leur revient qu’à 2 €/m3 car il est largement subventionné. Le coût réel est de l’ordre de 9 à 10 €. Mais l’Apieme (Association pour la protection de l’impluvium des eaux minérales d’Evian) verse 6 € et Danone 1 € supplémentaire.