« La rampe avec enrouleur valorise mieux l’eau que le canon »
En s’équipant de trois rampes traînées pour remplacer ses canons, Sébastien Pichard, agriculteur en Eure-et-Loir, a amélioré l’efficacité de l’irrigation de ses betteraves et pommes de terre, avec des économies d’eau et des apports plus homogènes sur toute la saison, moyennant une mise en œuvre plus contraignante.
En s’équipant de trois rampes traînées pour remplacer ses canons, Sébastien Pichard, agriculteur en Eure-et-Loir, a amélioré l’efficacité de l’irrigation de ses betteraves et pommes de terre, avec des économies d’eau et des apports plus homogènes sur toute la saison, moyennant une mise en œuvre plus contraignante.
« J’ai profité l’an dernier du plan d’aides FranceAgriMer pour investir dans ma troisième rampe d’irrigation traînée par l’enrouleur, satisfait de l’efficacité supérieure de cet équipement face au traditionnel canon », se félicite Sébastien Pichard, agriculteur à Santilly en Eure-et-Loir. Installé sur 220 hectares, il s’est équipé d’une première rampe en 2015, suivie d’une seconde en 2018, pour irriguer principalement ses betteraves et pommes de terre. « À partir de cette année, elles ne vont plus me servir qu’aux betteraves, car j’arrête les pommes de terre. Mais elles me seront de plus en plus utiles pour l’orge de printemps, afin de faire face aux printemps secs et plus globalement pour sécuriser les céréales lors des épisodes de sécheresse. » L’irrigant ne dispose ainsi que d’un seul enrouleur équipé d’un canon dédié à l’arrosage des tournières ou des bandes restantes trop étroites pour un passage de rampe. D’une envergure de 64 mètres, les trois rampes traînées Briggs fournies par les établissements Chesneau couvrent une largeur de 84 mètres à l’aide de deux canons d’extrémité, un multiple des passages de pulvérisateur de 28 mètres. La dernière a été achetée 34 800 euros HT en 2023. « C’est 5 000 euros de plus que la première acquise en 2015. Heureusement qu’il y a les aides… », observe-t-il.
Une irrigation précise et homogène
Durant ses huit années d’expérience, Sébastien Pichard a pu observer la meilleure répartition de l’eau offerte par la rampe. « Avec la vingtaine de rotobuses répartis sur toute la largeur, la dose est homogène. Je dispose de deux séries de buses pour adapter la taille des gouttes et la quantité d’eau apportée. Pour faire lever les betteraves, je peux par exemple créer un brouillard générant un apport de 10-15 mm avec un débit de 22 m3/h. Et en pleine saison, l’autre jeu me permet de monter jusqu’à 40 mm à 55 m3/h ». Le travail uniforme de la rampe est visible sur les cultures. « Que ce soit en pommes de terre ou en betteraves, leur calibre est beaucoup plus homogène sur toute la surface des parcelles. En betteraves, j’ai d’ailleurs progressé en rendement ces dernières années », apprécie l’irrigant. La régularité de l’arrosage a aussi été validée par l’entrepreneur chargé d’arracher les pommes de terre : « l’arracheuse avance de manière beaucoup plus régulière que dans des parcelles arrosées avec un canon. »
Cette technique d’irrigation est également mise en avant pour sa capacité à travailler à de plus faibles pressions qu’un pivot. « Avec les asperseurs, on pourrait en effet descendre à 3 bars, mais ce n’est malheureusement pas du tout suffisant pour faire tourner la turbine de mes enrouleurs de 750 m, en diamètre 125 mm. Le gain sur la pression est donc dans mon cas négligeable. »
Des arrosages pas perturbés par le vent
La rampe a aussi l’avantage de pouvoir travailler quelles que soient les conditions de vent. « Contrairement au canon, on n’est jamais arrêté. Je peux facilement faire 5 passages de 40 mm pour apporter 200 mm sur les betteraves. En pomme de terre, je ne dépassais pas les 35 mm et je pouvais revenir tous les 6 jours, alors qu’avec le canon c’est au moins 40 mm avec des passages plus espacés, argumente Sébastien Pichard. En arrosant plus régulièrement et de manière homogène, on peut ainsi se permettre de réduire les doses et donc d’économiser de l’eau. »
Cet équipement offre par ailleurs davantage de tranquillité à l’agriculteur, dont certaines parcelles sont situées entre une route nationale et une ligne de chemin de fer. « La rampe me permet d’aller au ras, sans risque d’arroser au large et sans astreinte pour régler le canon. » Le système de rotation donne aussi la possibilité d’ajuster l’orientation de la rampe en fonction de la forme de la parcelle, tandis que la suspension pendulaire favorise le suivi des dévers.
Une mise en œuvre chronophage
Sa mise en œuvre est en revanche plus contraignante que celle d’un canon. « Sa largeur de moins de 4 m repliée et ses quatre roues directrices, la rendent assez maniable sur la route en la tirant avec le tracteur sans l’enrouleur. En revanche, une fois au champ, il faut déplier les 6 bras de la rampe. Je cale ensuite ses roues pour dérouler l’enrouleur et le chantier est prêt, une fois que j’ai retiré les cales. Finalement, il faut compter une heure pour déplacer l’enrouleur et la rampe, alors qu’une demi-heure suffit avec un canon. »
La rampe impose d’autres contraintes comme une rotation régulière de l’enrouleur. « Il faut éviter les à-coups au risque de plier un bras de rampe, ce qui m’est déjà arrivé. » Cet équipement d’irrigation est aussi plus sensible à la qualité de l’eau. « Les particules issues de la dégradation de la colonne d’un de mes enrouleurs ont fini par boucher des asperseurs. Ce ne serait pas arrivé avec un canon », illustre Sébastien Pichard. L’entretien est aussi rendu plus fastidieux par la multiplication des graisseurs au niveau des différentes articulations, de points de pivot et du système de verrouillage.
Assolement 2023/24
220 ha de SAU sur trois sites
73 ha de blé tendre et améliorant
32 ha d’orge de printemps
31 ha d’orge d’hiver
29 ha de betteraves
21 ha de colza
20 ha de blé dur
14 ha de jachère
Pilotage à distance de deux enrouleurs
Sébastien Pichard a équipé deux de ses enrouleurs d’un dispositif de pilotage à distance. « Cela me facilite la gestion des enrouleurs et me donne la possibilité de mieux valoriser la précision des rampes, en réglant la dose au plus juste en fonction des conditions. Je peux par exemple accélérer l’enrouleur en soirée, sans me déplacer sur site. » Au regard de cette appétence pour le pilotage optimisé de l’irrigation, on peut s’étonner que l’agriculteur n’ait pas fait le choix d’un pivot ou d’une rampe frontale. « Ces solutions sont en effet séduisantes, mais elles imposent un lourd investissement et manquent de flexibilité pour la rotation des cultures. Je préfère choisir chaque année les trois parcelles de 20 hectares que je vais irriguer avec mes rampes, sachant que c’est la surface maximum pour une bobine. »