Lutte contre le gel : des vignes plus hautes, pour des bourgeons un peu plus au chaud
Différents essais ont mis en avant un petit gain de température en montant les ceps de vigne.
Différents essais ont mis en avant un petit gain de température en montant les ceps de vigne.
C’est un fait établi depuis Jacques Charles (1). La densité de l’air chaud étant plus faible que celle de l’air froid, plus on monte, moins on a froid. Décliné à la viticulture, ce principe de base de la physique a inspiré plusieurs chercheurs dans le cadre de la lutte contre le gel. C’est notamment le cas de Laure de Rességuier, chercheuse à l’Agro de Bordeaux.
Une différence de 0,4 °C 50 cm plus haut
Durant cinq ans (2016-2020), elle a scruté l’évolution de la température en fonction de différentes hauteurs : bourgeons à 30 cm du sol, 60 cm, 90 cm et 1,20 m. Il en ressort bel et bien que la chaleur monte : l’augmentation de la hauteur des ceps de 45 cm à 90 cm a par exemple permis une hausse des températures minimales pendant les nuits de gel de 0,4 °C. « L’augmentation de la hauteur du tronc ne retardera probablement pas significativement la maturité, mais cela pourrait minimiser les dommages potentiels dus aux événements de gel et de canicule », conclut la chercheuse dans sa publication scientifique.
Thomas Chassaing, de l’ATV49, a lui aussi effectué des essais de hauteur de cep, dans le Val de Loire, et constaté que « la hausse de la hauteur de tronc de 60 cm à 1,10 a permis de monter la température des vignes de 0,4 °C ».
Ne pas négliger l’impact de la topographie
Catinca Gavrilescu, doctorante à l’université de Bourgogne, complète les propos de ses confrères. Comme eux, elle a mesuré les profils thermiques durant des épisodes gélifs sur une parcelle viticole. Mais si elle a bien constaté les mêmes tendances de variations qu’eux selon la hauteur, elle insiste aussi sur le fait que la température dépend prioritairement de la topographie de la parcelle. Pente, exposition, présence de bosses ou de trous, ou encore altitude sont autant de facteurs structurant le gel, surtout par temps radiatif. « En haut et en bas de la parcelle, nous avons relevé un écart thermique journalier allant jusqu’à 2 °C maximum entre le niveau du tronc (90 cm) et la station à 2 m du sol, rapporte-t-elle. En milieu de parcelle, où nous avions un creux topographique, l’écart est monté jusqu’à 5-6 °C. »
La modification du mode de conduite ne permettrait pas à elle seule de lutter contre le gel. Mais « le but serait de cumuler différents moyens de lutte passive pour n’avoir plus que 1 ou 2 °C à gérer par de la lutte active, estime Thomas Chassaing. Les voiles d’hivernage permettent par exemple un gain de 1,5 °C. Tout mis bout à bout, cela fait un écart de 3 °C. Dans de nombreuses situations, cela peut être suffisant. » Le mode d’entretien du sol, la date de taille ou encore la présence d’arbres influent eux aussi sur la température des bourgeons.