Les défauts de qualité de viande de poulet mobilisent la recherche
Plusieurs stratégies sont envisagées pour réduire les défauts de qualité de viande affectant les productions de poulet à croissance rapide. Mais la plupart induisent une baisse des performances techniques.
Plusieurs défauts de qualité de la viande de poulet, surtout visibles au niveau du filet après la découpe, sont apparus au cours de la dernière décennie. Les quatre principaux sont le « white striping » (stries blanches), le « wooden breast" ou "filet de bois » (texture dure, aspect plus bombé et plus pâle), le filet spaghetti et le défaut des aiguillettes vertes. Ils sont apparentés à des myopathies et occasionnent une moindre valorisation des produits pour le transformateur. Une enquête réalisée en France en 2017 dans plusieurs abattoirs sur 123 lots de poulets, certifiés, standards et lourds a montré une incidence de 66 % du défaut de stries blanches (dont 15 % à un degré sévère), de 54 % du défaut de filet de bois (22 % à un degré sévère), de 11 % du défaut spaghetti et de 0,33 % d’aiguillettes vertes. Souvent associés aux souches lourdes à fort rendement musculaire, ces défauts ont aussi été observés chez des poulets à croissance plus lente et chez d’autres espèces dont la caille et la dinde, mais dans une bien moindre mesure.
La nutrition, un levier finalement limité
Beaucoup de stratégies ont été étudiées ces dernières années pour tenter de réduire la fréquence et la sévérité de ces défauts. Élisabeth Baéza de l’Inra de Nouzilly les a passés en revue. « Celles qui se montrent efficaces entraînent pour la plupart des baisses de performances en élevage. » Cela passe par exemple par la limitation de la vitesse de croissance, la réduction du poids et de l’âge à l’abattage. Parmi les solutions alimentaires, seul l’apport d’acide guanidinoacétique (un précurseur de la créatine) a montré un effet bénéfique sur le défaut de wooden breast sans pénaliser les performances. Tandis que la réduction de la concentration en énergie et de la teneur en lysine réduit les défauts mais aussi la croissance.
L’impact des conditions d’incubation est aussi étudié. Ainsi, une augmentation de la température d’incubation sur la période de 14 à 18 jours a induit une baisse des défauts… mais aussi du poids vif à 63 jours. « D’autres paramètres comme le rapport entre l’oxygène et le CO2 mériteraient d’être investigués. »
Un autre levier mis en avant est la génétique, « celle-ci jouant un rôle dans l’apparition des défauts mais l’héritabilité des lignées commerciales est plutôt faible. » Par contre, sur les lignées sélectionnées de façon divergente sur le pH ultime mesuré post-mortem sur la viande, de meilleures héritabilités ont pu être estimées en conditions expérimentales. L’analyse génomique de ces lignées a récemment abouti à l’identification des premiers QTL (zones du génome) associés au white stripping. « La sélection sur une moindre sensibilité à l’apparition de ces défauts nécessitera pour les sélectionneurs la mise au point d’outils de mesures des défauts sur l’animal vivant (marqueurs sanguins, imagerie médicale). »
Enfin, la chercheuse incite la filière à réfléchir à des systèmes de production basés sur des souches plus robustes qui permettraient des gains de compétitivité autres que la croissance en améliorant la santé et le bien-être en élevage et en réduisant les pertes pour le transformateur. « La sélection du poulet sur la croissance et le développement musculaire a atteint les limites physiologiques des animaux. »