Aller au contenu principal

Yohann Barbe, nouveau président de la FNPL : « Nous ne devons plus perdre ni litre de lait, ni actif pour le produire »

Yohann Barbe, éleveur dans les Vosges, a été élu président de la FNPL le 9 avril. Il livre sa feuille de route à Réussir Lait et Agra. Au menu : renouvellement des générations, organisations de producteurs, relations commerciales, Egalim et export. Le point commun : le prix du lait.

Yohann Barbe, président de la FNPL élu le 8 avril 2024
Yohann Barbe, président de la FNPL élu le 8 avril 2024
© ©️Jmvignau/FNPL

Vous venez d’être élu président de la FNPL à la suite de Thierry Roquefeuil, quelles sont les priorités de votre mandat ? 

Il y aura une continuité, Thierry a préparé sa retraite. Ce qui va nous guider lors de cette mandature, c’est la fin de la concentration des exploitations laitières. Nous ne devons plus perdre, ni litre de lait, ni actif pour le produire. Le point essentiel sera le renouvellement des générations, rendre la filière attractive pour les jeunes et moins jeunes et enrailler et garantir la souveraineté alimentaire.

Lire aussi : Le secteur laitier au sommet d’une vague démographique de grande ampleur

Que faire pour attirer de nouveaux porteurs de projet dans la filière laitière ?

Nous allons travailler sur un indicateur de prix de revient qui prend en compte les besoins de transmission et d’installation. 

Lorsque vous vous installez les charges sont bien plus élevées : il leur faut une rémunération qui garantisse leurs coûts de production et le remboursement de leurs prêts sur les quinze prochaines années.  En fin de carrière, il faut aussi donner un nouveau souffle. A 55 ans, si la salle de traite est vieillissante, on n’investit pas puis cela se dégrade et elle n’est plus transmissible. 

Enfin, dans le calcul des indicateurs, nous voudrions remplacer les deux Smics par le salaire médian français. 

Lors du salon de l’Agriculture, Emmanuel Macron a annoncé des « prix plancher » pour les produits agricoles et une proposition de loi des écologistes en ce sens a été adoptée en première lecture à l’Assemblée. Quelle est votre position sur le sujet ?

Le terme de « prix plancher » ne nous convient pas. Nous voulons des « prix indicateurs ». Ce que nous reprochons aux « prix plancher » proposés par Marie Pochon [députée écologiste, ndlr], c’est qu’ils seront le fruit d’une négociation et non pas d’indicateurs. Or, le fruit d’une négociation, c’est toujours dangereux. 

Il faut appliquer des indicateurs décidés au sein de l’organisation de producteurs ou de la coopérative qui créent indirectement le prix plancher, un seuil en deçà duquel on ne peut pas aller.

Ces indicateurs doivent évoluer dans le temps et être reconnus par l’interprofession. Bon nombre d’industriels calculent leurs propres indicateurs [de coûts de production, ndlr]. Il faut aussi retirer l’indicateur de prix de vente industriel (PVI) des formules. Les producteurs ne peuvent pas supporter le manque de compétitivité des industriels.

Au sujet des indicateurs, y a-t-il eu des avancées pour trouver un accord interprofessionnel sur la valorisation beurre-poudre ?

La FNPL siffle la fin de la partie. Nous ne pouvons plus attendre. Nous allons demander une rencontre avec l’interprofession et s’ils ne sont pas d’accord pour publier rapidement un indicateur, nous demanderons à l’institut [de l’élevage, Idele, ndlr] d’en calculer un. 

Nous voulons également porter le sujet de la « valorisation export » au niveau interprofessionnel. Aujourd’hui, il n’y a pas d’indicateur sur les produits de grande consommation vendus à l’export. On utilise le prix du lait allemand, italien ou un mix… Les producteurs ne récupèrent pas la vraie valorisation de leur production sur les marchés étrangers. Alors que les fromages français sont au moins aussi bien valorisés dans les supermarchés allemands que dans l’Hexagone.

Faut-il encore faire évoluer le cadre des relations commerciales ?

Nous voulons la pleine et entière application des lois Egalim. C’est une des solutions pour rémunérer les producteurs de lait bio.

Nous serons force de proposition sur une potentielle loi Egalim 4. Il faudrait retravailler l’option 3 en créant une obligation de transparence sur le prix des matières premières agricoles principales (MPA), qui représentent plus de 50% de la valeur de la MPA. Il faut aussi qu’Egalim s’applique de la même façon dans les coopératives que dans les entreprises privées.

Surtout, nous demandons une date butoir pour les négociations entre les organisations de producteurs et les transformateurs. A l’heure où on parle de prix en marche avant, des industriels vont négocier avec la grande distribution avant de négocier avec les OP. Nous sommes encore dans l’ancien monde où les producteurs reçoivent ce qu’il reste.  

Les organisations de producteurs peuvent-elles encore monter en puissance ? 

Chaque passage chez le médiateur, c’est un consensus mou à la clé. La date butoir obligera les entreprises à trouver des accords car elles ne pourront pas envoyer leurs conditions générales de vente à la grande distribution. Les OP sont responsables, on ne peut pas leur reprocher de ne pas trouver un accord !

Lire aussi Prix du lait : la publication des indicateurs de coûts de production avancée à septembre

Comment financer les organisations de producteurs ? 

Dans certains cas, l’entreprise met à disposition un salarié ou paye une cotisation, cela peut fonctionner mais quid de l’indépendance ? 

La première mission des OP est de massifier l’offre et de négocier le prix du lait. Certaines OP veulent avoir des missions plus larges. C’est très bien, mais à elles de trouver une source de financement. Pour le socle de base, nous devons trouver une voie commune. Je ne dis pas qui paye mais on doit trouver ce mode de financement.

Quelle est la place de la FNPL au sein de la FNSEA ?

Nous continuerons de travailler avec la FNSEA et les associations spécialisées animales (FNB, FNO …) pour porter la voix de l’élevage au sein de la FNSEA et vice-versa. Nous ne serons pas d’accord sur tous les sujets, mais il faut faire avancer nos idées en les partageant et en les travaillant au sein de la FNSEA. Je garde d'ailleurs ma place de porte-parole de la FNSEA, au titre des AS animales.

Propos recueillis par Juliette Guérit (Agra) et Alizée Juanchich (Réussir Lait)

 

 

 

 

Le bureau de la FNPL pour la mandature 2024-2027

  • Président : Yohann Barbe (Vosges)
  • Secrétaire général : Stéphane Joandel (Loire)
  • Secrétaires généraux adjoints : Michel Casabonne (Pyrénées-Atlantiques) et Benoît Gavelle (Eure)
  • Premier Vice-Président : Ludovic Blin (Manche)
  • Vice-Présidente en charge de la place des femmes en élevage : Marie-Andrée Luherne (Morbihan)
  •  Vice-Présidents : Samuel Bulot (Côte-d’Or), Gilles Durlin (Pas-de-Calais), Frédéric David (Ille-et-Vilaine)
  • Trésorier : François Moreau (Nord)
  • Trésorier adjoint : Alexis Descamps (Loir-et-Cher)
  • Membres : Christophe Maginot (Meuse), Agnès Texier (Vendée), Patrice Riauté (Sarthe), Damien Paris (Doubs)

 

 

Les plus lus

<em class="placeholder">Nathalie et Michel Daguer, éleveurs en Mayenne avec leurs vaches</em>
Pâturage hivernal : « Nous ne voyons que des bénéfices dans notre élevage en bio et en monotraite en Mayenne »

Le Gaec du Ballon en Mayenne, en bio et en monotraite, profite de conditions pédoclimatiques privilégiées pour pâturer en…

<em class="placeholder">guillaume rivet, éleveur dans les deux-sèvres</em>
Organisation du travail : « Nous avons robotisé la traite pour anticiper le départ à la retraite de mon père dans les Deux-Sèvres »

Le Gaec Privalait, dans les Deux-Sèvres, tourne entre mère et fils depuis bientôt deux ans. La robotisation de la traite, en…

<em class="placeholder">« L’herbe pâturée est la plus économique car, plus il y a de stock, plus les charges de mécanisation augmentent », soulignent Sébastien Le Goff et Julie Sylvestre.</em>
Diagnostic de système fourrager : « Nous avons prouvé la résilience de notre élevage face aux aléas climatiques dans le sud du Morbihan »

Au Gaec de Coët Cado, dans le Morbihan, pour s’assurer de la résilience de leur système fourrager aux aléas, les associés ont…

Carte de la zone régulée FCO3 à la date du 5 décembre 2024.
FCO 3 : près de 8 500 foyers en France

A date de jeudi 5 décembre 2024, le ministère de l'Agriculture annonce 8 436 cas de fièvre catarrhale ovine sérotype 3.…

<em class="placeholder">Brice Minot, Vincent Colas et Cyrille Minot, trois des quatre associés du Gaec des forges, en Côte-d&#039;Or</em>
Élevage laitier : « Nous cherchons de la productivité et de l’autonomie pour rentabiliser nos installations en Côte-d’Or »

Au Gaec des forges, en Côte-d’Or, les associés ont robotisé pour mieux organiser le travail. La recherche d’un bon prix du…

<em class="placeholder">jeune agriculteur et retraité départ à la retraite transmission</em>
Manque de main-d'œuvre : quelles sont les options en élevage laitier pour organiser son travail et gagner du temps ?

Lorsqu’un collectif de travail est amené à se réorganiser (départ à la retraite des parents ou d'un associé, dénouement d'un…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière