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Ration vaches laitières : « Je change de coproduits selon la qualité de mon herbe »

Le Gaec des Nicolas, dans les Ardennes, en système tout herbe, mise sur les coproduits pour faire du lait. Pour ses vaches à plus de 8 600 kilos de lait, il ajuste ses choix en fonction de l’analyse de l’herbe, des disponibilités et des prix.

« Notre système tout herbe manque d’énergie pour les vaches laitières », expose Nicolas Delpy, associé avec Estelle Nicolas sur le Gaec des Nicolas, à Carignan. Comme l’énergie peut coûter cher, « nous profitons des opportunités de notre secteur pour trouver des coproduits riches en énergie et moins coûteux que des céréales ».

Depuis 2023, suite à l'arrêt de l'ensilage de maïs, les éleveurs s'approvisionnent auprès d'une entreprise basée à 80 km en Mixalia amidon, un mélange à base de coproduits. « L’intérêt de ce mélange par rapport à un aliment sec est qu’il revient moins cher et qu’il ramène plus de lait grâce à la diversification des matières premières : écarts de pomme de terre, pulpes de betterave, germe de maïs… », expose l’éleveur. Le fabricant garantit un produit à 50 % de matière sèche et une valeur alimentaire constante : 1,15 UF, 95 PDIE, 85 PDIN, 45 PDIA. « Notre mélange est aussi garanti "non OGM". »

Un mélange de coproduits constant

Livré par camion de 25 ou 30 tonnes tous les deux à trois mois, ce mélange a coûté 160 euros par tonne l'an dernier. « Nous en mettons quatre kilos bruts dans la ration hivernale des vaches, également distribuée aux génisses à partir de 5 mois, et nous en amenons aussi en complément du pâturage à raison de trois kilos bruts par vache. » Son prix, plutôt en baisse en ce moment, devient vraiment intéressant. « Je l’ai eu à 120 euros par tonne cet été, ce qui revient à 240 euros par tonne de matière sèche, quand la farine de céréale était à 257 euros par tonne de matière sèche. »

Le Gaec ajuste les quantités et parfois les types de coproduits en fonction des analyses d’herbe, et regarde avec son conseiller d'élevage quels coproduits disponibles sur le secteur conviendraient. « Quand l’herbe manque d’énergie – le cas le plus fréquent –, nous essayons d'apporter de la pulpe de betterave pour le sucre et du mélange de coproduits pour l’amidon. Idéalement, nous les associons, pour la diversité des sources d’énergie. »

Ajustements selon la qualité de l’herbe

L'utilisation de la pulpe de betterave se heurte à deux problèmes. « Nous n'en avons pas fait entrer ces deux dernières années car nous manquons de place de stockage. En outre, la disponibilité de la pulpe dépend de la demande des méthaniseurs », explique Nicolas Delpy.

Pour pallier le manque de stockage, les éleveurs vont installer un nouveau silo couloir spécifiquement dédié aux coproduits, pour pouvoir augmenter les quantités stockées et acheter au moment où le prix est le plus intéressant. « Nous pourrons ainsi acheter des pulpes de betterave dès qu'il y a de la disponibilité, et acheter moins de mélange. »

L’herbe manque rarement de protéine, étant donné que le Gaec vise des fauches précoces pour obtenir une herbe conservée – ensilage et enrubannage – qui titre au moins 15 % de MAT. En cas de déficit, les éleveurs augmentent la complémentation en drêche de blé.

Ajustements selon les prix et la disponibilié

Les drêches de blé sont achetées depuis longtemps, déjà quand le Gaec était en système ensilage de maïs et herbe conservée. Elles sont relativement disponibles dans la région et leur prix est souvent intéressant. « Nous n'en prenons que sous forme granulée pour aller au DAC. Nous avons deux fournisseurs possibles et passons des contrats par douze tonnes. Cet été, le contrat s'élevait à 354 euros par tonne. C’est cher, mais je tiens à maintenir quand même la drêche car elle fonctionne très bien dans la ration, et je ne veux pas déstabiliser les vaches. Quand son prix devient trop élevé, une entreprise propose un mélange de luzerne et de drêche de blé en bouchon pour maîtriser le coût du granulé. »

Le bémol est que chaque coproduit est stocké isolément, ce qui fait que chaque jour Nicolas Delpy concocte une ration mélangée. Il a essayé de réaliser un silo sandwich unique, mais « je n’arrive pas à faire des proportions régulières sur tout le silo entre les différents aliments. En effet, les produits sont difficiles à tasser au silo ; le mélange se tasse au godet par exemple ». Il pioche donc chaque matin dans trois à quatre tas différents : le silo d’ensilage d’herbe, celui de mélange de coproduits, celui de maïs épi, et en décembre 2023 un tas de corn gluten feed, obtenu à un bon prix (122 €/t). Un exemple de plus que le Gaec Nicolas adapte ses coproduits en fonction des opportunités à saisir.

Fiche élevage

70 vaches laitières

8 630 kg de lait par vache et par an, à 39,8 de TB et 31,6 de TP

109 ha en tout herbe

30 % de coproduits dans la ration hivernale

 

 
graphique ration hiver vaches laitières coproduits Gaec des Nicolas
GRAPHIQUE : Au Gaec des Nicolas, 30 % de coproduits dans la ration hivernale - hiver 2023-2024 - Ration des vaches en kilos de matière sèche par vache et par jour © Source : Gaec des Nicolas

Pendant la saison du pâturage (de mi-avril à mi-octobre), les éleveurs complémentent avec le mélange de coproduits et des drêches de blé, en fonction de la qualité de l’herbe.

Un coût maîtrisé

Le coût des concentrés et des coproduits varie entre 45 et 137 €/1 000 l selon les mois, pour une moyenne annuelle à 96 €. Le coût alimentaire total est maîtrisé : entre 138 et 205 €/1 000 l ces deux dernières années, soit 174 € en moyenne sur douze mois. « La moyenne du groupe lait en non OGM est de 180 €/1 000 l, avec des systèmes moins herbagers mais plus autonomes. Le Gaec des Nicolas est moins autonome et subit donc davantage les hausses de prix des coproduits », ajoute Antoine Brasset, de Ardennes conseil élevage. « Le coût alimentaire est maîtrisé car les éleveurs savent saisir des opportunités et grâce à leur technicité qui fait que les rations sont efficaces : l’efficacité alimentaire est le ratio production laitière/consommation en matière sèche, et il est compris entre 1 et 1,35 selon les mois », conclut Antoine Brasset.

Le germe de maïs complémentait bien le foin

Il y a dix ans, quand le troupeau était plus petit et que l’herbe fauchée était valorisée en foin, du germe de maïs en granulé était acheté. « C’est aussi riche en énergie qu’un maïs épi. Mais avec l’augmentation de la taille du cheptel, cela faisait de gros volumes de foin à stocker, donc nous sommes passés en ensilage et enrubannage d’herbe. Par ailleurs, avec la réduction de l’âge au premier vêlage, des surfaces d’herbe ont été libérées pour les animaux productifs. Cela a permis de pâturer davantage et de réaliser plus de récoltes d’herbe. La complémentation a donc évolué. »

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