« Le vrai sujet, c’est la création de valeur »
Pour Damien Lacombe, président de Sodiaal, il faut aller chercher de la valeur en valorisant le modèle familial français dans un cadre collectif. Et se saisir des États généraux pour agir vite.
Pour Damien Lacombe, président de Sodiaal, il faut aller chercher de la valeur en valorisant le modèle familial français dans un cadre collectif. Et se saisir des États généraux pour agir vite.
« Le partage de la valeur, c’est important, on en parle beaucoup, mais le vrai sujet, c’est la création de la valeur : comment on arrive d’abord à augmenter la part du gâteau pour ensuite la faire remonter au producteur », a affirmé Damien Lacombe, président de Sodiaal, au Space. On ne peut pas se limiter lors des États généraux de l’alimentation à la révision des seuils de revente à perte et de l’encadrement des promotions (au niveau de la LME, loi régissant les relations commerciales) ». Cette création de valeur, il faut aller la chercher en valorisant le modèle familial des producteurs français dans un cadre collectif. « Si nous avançons tous de manière individuelle, toutes les démarches seront nivelées vers le bas. » Les marques locales foisonnent, « le point positif est qu’elles amènent un peu de dynamique », mais elles ne créent pas de valeur pour la filière : « elles permettront à 5 % du lait d’être très bien valorisé et 95 % le seront au prix néo-zélandais ».
Il propose de commencer par s’atteler au lait de consommation(1) et de faire porter le sujet par Syndilait (le syndicat des fabricants de lait). « Il faut se saisir des États généraux pour agir. L’ensemble des acteurs de la filière, consommateurs, producteurs, distributeurs transformateurs doivent se mettre autour de la table pour fixer collectivement des critères autour de la rémunération des éleveurs, du bien-être animal, du pâturage et du lait non OGM : des critères simples, lisibles, aisément vérifiables par le consommateur ». Le Lait de pâturage, qui vise tout le territoire et dans lequel Sodiaal s’est engagé (voir p…) « pose une première pierre : c’est un exemple concret qui met en avant la ferme France très liée au sol. Il pourra servir de base de travail ». Si le collectif prime, cela ne veut pas dire que Sodiaal ne continuera pas à développer ses démarches spécifiques (comme la nouvelle Route du Lait), pour ses marques, précise-t-il.
Une vraie refonte de la stratégie de Sodiaal présentée en novembre
Ce travail sur la création de valeur, Sodiaal entend le mener parallèlement au niveau du groupe. « Après la grosse restructuration de ces dernières années, nous prenons clairement aujourd’hui le virage de la valeur ». Le groupe dévoilera fin novembre une « vraie refonte de sa stratégie » pour « monter en puissance dans le résultat ». « La taille est un moyen, notamment pour aller sur les marchés internationaux mais pas une finalité ». Il poursuit la résorption des laits mal valorisés (engagée avec Synutra, le lait bio, le développement fromager…) : l’objectif est de réduire le volume beurre/poudre basique à 10 %, ce qui correspond au différentiel de collecte saisonnier printemps/été(2). Il compte aussi investir de manière plus intensive dans le domaine international, et mettre en avant la spécificité du modèle coopératif. « La communication de nos marques (c’est déjà le cas pour Candia) va porter dessus : il y a beaucoup de choses à faire valoir en termes de territoires. »
« Il est important que nos adhérents se sentent investis dans cette mission de quête du résultat et participent au travail collectif." C’est le sens de la nouvelle Route du lait qui se mettra en place en avril "pour mieux valoriser nos produits en apportant des preuves à nos commerciaux ». C’est aussi dans ce sens qu’a été mise en place lors de la dernière AG une règle claire et transparente préfixant la répartition du résultat du groupe (1/3 ristournes, 1/3 capital social, 1/3 réserves). « Nous aurons gagné notre pari quand les adhérents attendront le résultat de Sodiaal. »
(1) Sodiaal produit 1,3 milliard de litres de lait de consommation Candia (450 millions de litres) et Orlait.(2) Voir aussi Réussir Lait juillet août p. 14Une autoévaluation pour la nouvelle Route du lait
Les adhérents de Sodiaal disposeront d’un nouvel extranet en janvier, avec une présentation rénovée de leurs données (gestion du volume, paiement du lait, forum…). Ils disposeront aussi d’une comparaison sur 36 mois de l’évolution de leurs critères qualité par rapport à leur région et à l’ensemble du groupe. Une Route du lait connectée basée sur une autoévaluation des adhérents y sera intégrée en avril. L’objectif est que les producteurs réalisent tous les ans un autodiagnostic sur les huit items de la démarche, en complément de l’audit réalisée tous les trois ans. L’autodiagnostic des émissions de gaz à effet de serre SelfCO2, qui avait été lancé dans cette optique dès le Space 2016, est l’une des huit briques de cette nouvelle Route du lait. « La finalité est d’apporter de la traçabilité à nos clients internationaux », explique Éric Auger, de la Direction du développement coopératif de Sodiaal.
Un prix « Sodiaal » en discussion
La coopérative devrait proposer une nouvelle formule de prix en avril. « Nous évoluons vers un prix plus uniforme de Sodiaal, dépassant les frontières régionales. Cela aurait du sens », affirme Damien Lacombe. La formule de prix du lait sera basée sur le mixproduit de la coopérative et l’environnement français et européen. Reste à débattre dans les prochains mois « du bon équilibre entre les deux. Ce sera un prix de marché. On regardera les coûts de production mais ils ne seront pas intégrés dans la formule", précise-t-il. Un test pilote est mené depuis deux ans sur différentes hypothèses avec 80 producteurs. La rémunération de la matière grasse et de la matière protéique fait partie des débats. Le maintien d’un prix B est pour le moment confirmé.