Hors frontière
En Belgique, plus de 10% du lait a changé de laiterie
En 2021, la Belgique a été le théâtre d'une grande lutte entre laiteries pour s'assurer des producteurs fournisseurs de lait.
En 2021, la Belgique a été le théâtre d'une grande lutte entre laiteries pour s'assurer des producteurs fournisseurs de lait.
Il est fini le temps de l'après quota où la production s'était envolée, les laiteries laissant les éleveurs produire tout ce qu'ils voulaient. « En Wallonie, la production laitière avait peu augmenté (+4%), mais dans les Flandres, elle a explosé : +40% entre 2012 et 2020 », rappelle Jan Halewyck, consultant chez Boerenbond, le syndicat agricole majoritaire en Flandre.
« La collecte de Milcobel, plus grande coopérative belge, était alors passée de 1 milliard à 1,7 milliard de litres de lait. » Mais la crise sanitaire liée au Covid-19 et le Brexit sont passés par là et ont grandement fragilisé cette entreprise déjà moins performante que d'autres. « Milcobel a donc payé un très mauvais prix du lait au 2e semestre 2020, sous 290 €/t (lait à 43-35 de TB-TP, moins de 25000 germes, moins de 250 000 cellules), soit un des prix les plus faibles d'Europe de l'Ouest. » Résultat : de nombreux producteurs ont cherché à partir.
Par chance pour eux, la Laiterie des Ardennes, via sa filiale Solarec, a investi dans une nouvelle usine de mozzarella et une nouvelle installation de poudre. « Elle avait donc besoin de lait, et a pris 250 exploitations. La société A-Ware cherchait aussi 300 à 350 millions de litres. Ce fromager néerlandais est venu en Belgique reprendre la partie poudre d'une usine de FrieslandCampina. » Car dans le même temps, FrieslandCampina, confrontée à une baisse de la production laitière aux Pays-Bas liée à la pression environnementale, ne faisait pas tourner à 100% cette usine.
Milcobel est en déficit de lait aujourd'hui
Enfin, d'autres laiteries belges (BMC, Olympia, Socabel, Inex et Mikka) et de nouveaux opérateurs comme Farmel ont également attiré des nouveaux fournisseurs pour des marchés différents. « C'est parce que le prix du lait était si bas que de nouveaux opérateurs sont entrés sur le marché belge », souligne Jan Halewyck.
Au final, environ 10 à 15% du lait belge aura changé de laiterie entre 2020 et 2022. « Si au départ, Milcobel avait des excédents de lait, à présent le défi sera de faire tourner de manière rentable des installations assez récentes. Milcobel commence à chercher de nouveaux fournisseurs et des partenariats stratégiques. Elle essaye d'acheter du lait (mais le prix spot est très élevé en ce moment) ou de fabriquer de la poudre à façon. »
La pression environnementale monte
Sur le second semestre 2021, le prix du lait est en hausse par rapport à la même période 2020. « Et pour octobre, A-Ware (393 €/t) continue d'afficher un prix du lait supérieur à Milcobel (382 €/t), pour attirer encore des producteurs vers eux. »
Mais un autre défi attend la filière belge. La croissance de la production laitière est stoppée, après huit ans de hausse. La collecte belge a même baissé en septembre et octobre, par rapport à septembre et octobre 2020. En cause, de mauvaises conditions météorologiques défavorables au maïs 2020 (sécheresse) et à l'herbe (trop froid et humide en 2021). « Mais aussi la pression environnementale sur l'ammoniac et les nitrates notamment. Il n'y a plus d'autorisation d'agrandissement ou de nouvelle stabulation, comme aux Pays-Bas. Des politiques veulent diminuer le nombre de vaches. Enfin, la future PAC et le pacte vert de l'Union européenne inquiètent la filière laitière belge, sur son impact sur la culture de maïs notamment. »