Dans l´Aveyron
Des éoliennes malgré des vents contraires
Dans l´Aveyron
Installer des éoliennes sur leurs terres a demandé aux deux éleveurs beaucoup de ténacité. Mais le projet, conçu par eux-mêmes et qui en est à ses débuts, est aujourd´hui très rentable.
Le site du Merdellou, dans l´Aveyron, est réputé être le plus venté d´Europe. Dix mètres par seconde en moyenne annuelle. Un investisseur allemand y exploite un important parc éolien depuis 2002. « Je me suis dit, si le site attire les fonds de pension allemands, il n´y a pas de raison que les agriculteurs ne puissent pas en tirer partie », raconte Jacques Fanjaud, éleveur et maire de la commune de Camarès.
Ses plus hautes terres (980 mètres d´altitude) sont situées sur la même arête à 800 mètres du parc éolien. Des surfaces de faible valeur agronomique qu´il exploite avec son frère, Jean-Paul, et un voisin. Le Gaec d´Aupiac élève 60 vaches laitières pour un quota de 550 000 litres.
L´éleveur se souvient précisément de la date - le 20 décembre 2001 - à laquelle ils ont lancé les démarches pour y installer une éolienne d´une puissance de 500 kilowatts (kW). Finalement, ce sont deux aérogénérateurs de 250 kW qui tournent. depuis juillet dernier.
Plus de quatre ans donc, pour faire aboutir le projet qui a dû affronter des vents, à l´époque, moins favorables qu´aujourd´hui. Le permis de construire fut le plus rapide à obtenir, quelques mois seulement. Par contre, la première réponse d´EDF pour le raccordement au réseau fut négative. Motif : saturation du poste source pour le parc éolien existant. Il en fallait davantage pour décourager Jacques Fanjaud qui commençait à se prendre de passion pour le sujet et surtout à être bien informé. S´appuyant sur une loi méconnue qui obligeait EDF à réserver un mégawatt sur le poste source pour le petit éolien, il renouvelle sa demande. Sauf qu´à ce moment-là, le petit éolien se limitait à 250 kW.
Le mât des éoliennes s´élève à 50 mètres de hauteur. Leurs pales sont sous-dimensionnées ©13 mètres à cause de la puissance du vent sur ce site. ©B. Griffoul |
Adaptées à des sites d´accès difficile
Les deux frères déposent donc séparément deux demandes pour le raccordement de deux éoliennes de 250 kW. Deux ans plus tard, ils obtiennent enfin une proposition technique et financière (PTF), précieux sésame qui permet de vendre l´électricité à tarif préférentiel. Pour fusionner les deux projets - la loi ayant changé entre temps - il faudra un an de plus. Ils créent également une SARL pour développer cette activité. Les travaux démarrent au printemps 2005 alors que le permis de construire allait être périmé en juin de la même année !
Techniquement, dans ces années-là, le choix était assez limité dans cette gamme de puissance. Les deux frères ont fait affaire avec le constructeur français Vergnet. Spécialisé dans l´équipement de sites balayés par les cyclones, en outre-mer, il souhaitait alors développer un éolien de proximité dans l´Hexagone.
Ce qui a permis à Jacques Fanjaud de négocier de très bonnes conditions : « je connaissais les ratios. Je m´étais fixé un coût d´investissement de 1 200 euros par kW. Aujourd´hui, il faut compter entre 1500 et 1800 euros. » Deux avantages à ces machines rustiques. D´une part, leur conception permet de les rabattre à terre pour les protéger des vents violents et assurer la maintenance. D´autre part, les composants de l´aérogénérateur peuvent être acheminés sur le site avec du matériel agricole. Les deux éleveurs ont réalisé eux-mêmes la tranchée de 800 mètres pour raccorder l´éolienne au réseau électrique près de la ferme.
Un peu plus bruyant mais robuste, ce modèle d´éolienne peut se rabattre au sol grâce à un support haubané actionné par un treuil hydraulique. ©D. R. |
Un tarif de rachat dégressif
Pour pouvoir bénéficier du tarif de rachat préférentiel, la totalité de l´électricité produite doit être livrée à EDF, contrairement à une éolienne domestique où seul le surplus non consommé est vendu. Le tarif de rachat est fixé pour 15 ans : environ 8,4 centimes d´euro le kilowattheure (kWh) les cinq première années puis un prix d´autant plus bas (jusqu´à 3 centimes) que la production a été élevée pendant la première période.
La production sera donc limitée à 2700- 3000 heures par an (ramenée à la puissance nominale) afin de conserver à partir de la sixième année un tarif intéressant, de l´ordre de 5,5 centimes d´euro le kWh. Les éoliennes, en service depuis juillet 2006, demandent encore des mises au point. Des sécurités les stoppent assez fréquemment. L´affaire d´une année, estime Jacques Fanjaud, pour les adapter complètement au site. Ancien étudiant en mathématiques et physique, il n´hésite d´ailleurs pas à mettre à profit ses connaissances scientifiques pour participer à la maintenance, en relation avec le constructeur.