Dans l’Ain
Dans l’Ain - Dans l’Ain - Une unité collective de séchage de luzerne
Treize
agriculteurs se sont groupés
pour créer une unité
de séchage de luzerne.
Novatrice, l’installation
n’utilise que des énergies
renouvelables et pourra
sécher du maïs grain
et d’autres matières.
afin de saturer l’air au maximum et de consommer le moins d’énergie possible.
Le séchage est réalisé sur trois jours.
«Un projet pilote unique en France », affirment-ils. Le superlatif ne semble pas exagéré. L’unité de séchage collective de luzerne que treize éleveurs et céréaliers viennent de mettre en service à Lescheroux, dans l’Ain, est particulièrement novatrice.
Cette installation de séchage de foin en vrac peut traiter jusqu’à 2000 tonnes de luzerne par campagne. La gestion de l’unité est assurée par une Cuma. Novatrice également, la mise en oeuvre de trois sources d’énergies renouvelables pour réchauffer l’air : l’eau chaude issue d’une unité de méthanisation, une toiture solaire et une chaudière à biomasse.
En fait, cette installation est le fruit de la rencontre de deux projets. Tout d’abord, un éleveur de porcs qui voulait développer une unité de méthanisation, son souci étant, comme dans bien des cas, de valoriser l’eau chaude, surtout en été quand il ne chauffe plus les porcheries. D’autre part, des éleveurs laitiers engagés dans la nouvelle AOC beurre et crème de Bresse, soucieux d’accroître leur autonomie fourragère et protéique. « La luzerne pousse bien mais nous avons des soucis pour la récolter car les terrains sont peu portants », explique Tanguy Morel, conseiller bâtiment à la chambre d’agriculture et à Ain Conseil élevage.
Les quantités récoltées sont insuffisantes pour envisager un séchage en grange individuel. Au terme de deux ans de réflexion, neuf éleveurs laitiers et quatre céréaliers se sont engagés sur un projet de séchage collectif de 1 500 tonnes de luzerne. Les quatre céréaliers cultivent la légumineuse pour des raisons agronomiques et la vendent localement aux éleveurs.
Projet de sécher du maïs grain et des plaquettes de bois
Le bâtiment a été construit à 300 mètres de l’unité de méthanisation. D’une surface de 3 500 m2, il abrite douze cellules de 1 000 m3, chacune aménagée de façon classique avec des caillebotis bois sous lesquels est insufflé l’air chaud. La manipulation du fourrage est réalisée par une griffe hydraulique à bras télescopique montée sur une translation. Cette grande capacité de stockage permet de n’immobiliser que la moitié des cellules pour chaque coupe et d’y laisser le fourrage pendant 15 jours afin de le surveiller après séchage, tout en démarrant la coupe suivante le cas échéant. Il est ensuite conditionné en bottes rectangulaires. « Nous avons choisi une presse industrielle, espagnole, qui presse très doucement, avec quatre coups de pistons à la minute, et donne un très bon produit », détaille Tanguy Morel.
Quatre cellules sont équipées d’une tôle perforée posée sur le caillebotis afin de pouvoir sécher du maïs grain. Si la rentabilité du projet a été calculée sur les 1500 tonnes de fourrage engagées dès le départ, il est prévu de monter rapidement à 2000 tonnes et de sécher aussi du maïs grain en hiver. Travaillé à basse température, il sera conforme au cahier des charges de la volaille de Bresse. La griffe sera équipée d’un godet pour le manipuler. L’installation pourrait permettre de sécher également du bois déchiqueté ; des sociétés locales semblent très intéressées. Ainsi que de la semence de maïs.
Chaudière à biomasse : une énergie à coût maîtrisé
Les trois énergies renouvelables se combinent pour optimiser le réchauffement de l’air, selon leur disponibilité. L’énergie du soleil est récupérée sous la toiture (2 400 m2) : l’air circule entre le fibrociment et des panneaux isolants avant d’être transféré, réchauffé, sous les cellules. L’eau chaude issue de l’unité de méthanisation transmet ses calories à un circuit d’eau fermé via un échangeur. Cette eau passe par des aérothermes qui réchauffent également l’air. Une chaudière à plaquettes de bois de 850 kW complète ces deux sources d’énergie afin de sécuriser le système, notamment en début et fin de saison lorsque le soleil est moins généreux et que l’eau chaude est utilisée pour chauffer les porcheries.
Même si le coût de la chaudière est élevé, c’est une garantie, pour l’avenir, d’une énergie à coût maîtrisé contrairement à l’électricité dont les tarifs sont annoncés en forte hausse. De plus, la chaudière permettra de sécher du maïs ou d’autres matières en hiver. Afin d’optimiser le pilotage de l’unité de séchage et par conséquent les consommations d’énergie, des sondes mesurent la température de l’air en continu et son hygrométrie. Préoccupation environnementale, valorisation locale des fourrages, démarche collective… Un projet à n’en pas douter novateur et s’inscrivant pleinement dans l’air du temps.