Logistique des grains
Transport fluvial/ferroviaire : Un lien terre-mer handicapant pour la France par rapport au reste de l’Union européenne
Si les ports français sont plutôt performants, le bât blesse dans le pré- et le post-acheminement où la route domine, limitant la massification des flux. Des investissements fluviaux et ferroviaires sont impératifs.
Si les ports français sont plutôt performants, le bât blesse dans le pré- et le post-acheminement où la route domine, limitant la massification des flux. Des investissements fluviaux et ferroviaires sont impératifs.
Les ports français sont plutôt compétitifs dans le logistique céréalière, explique Cyrille Coutansais, directeur de recherches au Centre d’études stratégiques de la Marine. « Ils sont au même niveau que les autres ports de l’Union européenne avec, non seulement, des installations performantes mais aussi des acteurs privés bien placés. Sénalia est, par exemple, le premier acteur européen dans la logistique des grains et investit régulièrement comme le prouve son récent portique. »
Pour Cyrille Coutansais, les ports français ont bénéficié de réformes comme la loi dite Bussereau du 4 juillet 2008, de la séparation entre les grands ports toujours dans le giron de l’État et des investissements des régions… « En dehors des épisodes comme ceux, récents, des grèves, les ports français sont compétitifs. Ce qui l’est moins c’est le pré-acheminement. »
En France, prédominent les liaisons par camions (90 %), alors qu’elles sont moitié moindre dans les ports du nord de l’Europe où les liaisons fluviales (jusqu’à 15 %) et ferroviaires permettent de massifier le pré- et le post-acheminement.
S’éloigner du tout camion
« La France est, de ce point de vue, très atypique et doit investir massivement dans les infrastructures pour regagner de la compétitivité », résume le chercheur. Lors des grèves qui ont bloqué le fret ferroviaire, les acteurs qui ont dû faire du report sur la route ont vu un surcoût de 6 à 8 €/t. Et la hausse de 10 % du fret fluvial en France en 2019 montre bien l’appétit des opérateurs pour cette voie d’acheminement. « Cette progression aurait pu être plus élevée, mais, en raison de la sécheresse, certains canaux ont dû être fermés. D’ailleurs, le changement climatique aura clairement des répercussions sur le transport fluvial. L’Allemagne, en 2018, a eu recours aux blés russes qui faisaient le tour par la Méditerranée en remplacement des blés des ex-Peco [pays d’Europe centrale et orientale, NDLR] qui ne pouvaient plus remonter le Danube dont les eaux étaient trop basses. »
Le chercheur se montre toutefois « raisonnablement optimiste » avec le début des travaux sur la liaison Seine-Nord et les investissements prévus pour le rail. « Le gouvernement a engagé un plan massif d’investissement dans le cadre de la réforme de la SNCF. Le contournement de la région parisienne et l’ouverture à la concurrence contribueront à améliorer la compétitivité. Les acteurs privés devront améliorer le parc des wagons vieillissants – et aussi des barges. » De nouvelles autoroutes ferroviaires devraient s’ajouter aux cinq existantes. « Avec la difficulté de recrutement des chauffeurs et l’impératif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le fait de charger 200 camions par rame apporte de réelles solutions. »
Enfin, la dématérialisation des procédures devrait contribuer à fluidifier les flux. C’est le cas au sein d’Haropa qui regroupe les ports du Havre, de Rouen et de Paris.