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Filières
Pour la distribution, les conditions de révision des prix ne sont pas réunies

Subissant de plein fouet la hausse des prix agricoles, les élevages avicoles et porcins réclament une prise en compte par la distribution

Depuis plusieurs jours, les communiqués se succèdent pour signaler l’explosion des coûts des céréales et du marché de la protéine, soja en tête, qui a fait bondir le coût des aliments pour l’élevage, sans garantie de répercussion sur les prix payés par la grande distribution. La FNSEA, Coop de France ou encore le Syndicat des industriels de la nutrition animale (Snia) réclament ainsi la prise en compte de cette hausse pour sauver les filières animales françaises, de volailles et porcins notamment. Le ministère de l’Agriculture, qui a reçu les syndicats agricoles vendredi dernier, estime que « toutes les conditions sont réunies » pour remettre autour de la table les grandes enseignes et leurs fournisseurs au travers de l’accord du 3 mai 2011. De son côté, la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) avance qu’il n’y a pas de raisons suffisantes pour appliquer cet accord.

Toute une filière aux abois
« Nous sommes très inquiets des risques considérables qui pèsent sur la situation économique des éleveurs et de l’ensemble des filières avicoles », s’alarment la FNSEA et la CFA (Confédération française de l’aviculture) dans un communiqué commun du 20 juillet. « Nous attendons que les négociations s’ouvrent » réclament-ils. Quelques jours plus tôt, le Snia s’inquiétait de la situation de la filière. Rappelant que les prix du blé ont progressé de près de 20 % en six mois, ceux des tourteaux (toutes graines confondues) de 50 %, et qu’en conséquence le niveau de l’IPAA a atteint un niveau record (+23 % en six mois), le Snia juge la répercussion tout au long de la chaîne «incontournable ». « La situation est intenable pour les éleveurs et pour les industriels de la nutrition animale » déplore Alain Guillaume, président du Syndicat. Celui-ci a d’ailleurs adressé un courrier au ministre de l’Agriculture pour lui rappeler certains impératifs comme l’importance d’accéder sans difficultés à certaines matières premières, et pour saluer le maintien des droits de douanes à taux zéro. Autre point évoqué dans cette lettre, la question du blé fourrager qui subit les hausses en sympathie avec le marché mondial, « alors qu’il ne devrait pas manquer en France cette année, nous dit-on », regrette Alain Guillaume. « Il serait intéressant de disposer d’un marché en blé fourrager et que les opérateurs puissent s’engager avec des moins values plus importantes par rapport au blé de qualité », ajoute-t-il.

Un accord difficilement applicable en l’état
Pour être appliqué, l’accord du 3 mai 2011 prévoit que certains indices progressent de 10 % au moins par rapport à l’an passé, et ce pendant trois mois consécutifs. En parallèle, le rapport entre l’indice du prix industriel de la viande (volailles) ou à la production (porcins), et celui des prix de l’alimentation animale, doit franchir un seuil de 10 % (volailles) ou 20 % (porcins). Pour l’heure, ces conditions, préalables à toute réouverture des négociations avec la grande distribution, ne sont pas remplies selon les derniers indices parus (les chiffres de juin et juillet n’étant pas encore officiels). « Au regard des chiffres disponibles, nous ne considérons pas que l’accord puisse s’appliquer » explique Mathieu Pecqueur, directeur Agriculture et Qualité au sein de la FCD. Il souligne aussi que l’article 8 de l’accord du 3 mai, qui est une clause de nullité de l’accord, n’est pas respecté par l’amont de la filière. « Cet article est très important car le problème actuel de la filière élevage n’est pas tant celui du prix payé par la distribution que celui de la hausse des matières premières. Il devrait y avoir des ponts entre la filière végétale et la filière animale. Ce n’est pas le cas aujourd’hui », estime Mathieu Pecqueur, faisant allusion à l’engagement pris par les parties signataires de l’accord. Pour Pierre-Olivier Drège de l’AGPB, cet argument est un prétexte pour ne pas rouvrir les négociations sur les prix d’achats. « Il existe des contrats sur des quantités et des prix avec les industriels qui transforment les matières premières », reconnaissant néanmoins qu’ils sont moins courants avec la nutrition animale, « qui, de part son activité, pratique davantage les achats spots que d’autres industries comme la meunerie ou la malterie ». Pour autant, « des contrats existent avec des prix fixes sur plusieurs mois, même s’ils ne sont pas généralisés ». « L’AGPB est prête à discuter sur un lissage des prix ».
« On sent que les discussions vont être tendues avec la distribution, d’autant que rien ne l’oblige à revoir les prix vers le haut » redoute Joël Limouzin de la CFA. Au-delà, « il y a une responsabilité à prendre au sein de nos filières. Il faudrait disposer de volumes de céréales pour organiser une solidarité en cas de crise ». D’autant que si l’accord du 3 mai permet de rouvrir les négociations, il n’oblige aucun parti à appliquer une hausse ou une baisse de ses prix.

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