L’Algérie stoppe ses importations de blé dur
Les autorités algériennes ont demandé aux opérateurs privés d’arrêter d’importer du blé dur
Le ministre algérien du Commerce Hachemi Djaâboub a appelé les opérateurs privés à stopper leurs importations de blé dur, le 4 mars lors d’une présentation des mesures gouvernementales prises en vue du Ramadan. Cette nouvelle a fait souffler « un vent de panique » chez les opérateurs, consommateurs algériens comme exportateurs, témoigne Yann Lebeau, responsable du bureau régional de France Export Céréales (FEC) au Maghreb. L’Algérie a représenté durant les trois dernières années 90 % des exportations françaises de blé dur sur pays tiers. L'Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a depuis averti qu’à compter du 1er juin, les transformateurs qui n'auraient pas repris leurs approvisionnements depuis les stocks nationaux n'y seront plus servis en cas d'une nouvelle flambée des cours.
L’OAIC cherche à déstocker, les industriels protestent
Si la récolte algérienne s’est avérée plus importante en 2009, les volumes ne représentent pas plus de 2,5 Mt, bien moins que les besoins nationaux. « Voyant que les importateurs privés parvenaient à approvisionner le marché, l’office national d’achat a très peu importé et peu vendu cette année. Il s’est contenté de stocker », explique Yann Lebeau. « Même le Canadian Wheat Board (CWB) a livré des opérateurs privés. Une première. » Le CWB préfère en effet habituellement traiter de gros volumes avec des offices. Mais l’Algérie espère engranger une seconde très bonne récolte en 2010. « La pluviométrie est bonne sur toute l’Afrique du Nord. Si rien n’est joué, tous les voyants sont pour le moment au vert » en terme de production, souligne le représentant de FEC. « L’OAIC a donc besoin de dégager rapidement des volumes. » Mais la qualité de la récolte domestique ne satisfait pas pleinement les industriels locaux, en terme de rendement et de propreté des lots notamment. Dans le passé, « la qualité des matières premières, qui reste l’élément prédominant dans l’obtention de produits finis aux normes (…) a connu d’énormes perturbations du fait que les unités meuneries se trouvaient contraintes d’accepter sans discuter les blés qui leur étaient rétrocédés par l’OAIC », affirment les transformateurs membres du Forum des chefs d’entreprise dans un communiqué faisant suite à l’injonction du gouvernement. Ces derniers pointent « des niveaux qualitatifs irréguliers qui ont eu des répercussions sur le produit fini, lequel ne répondait plus au goût du consommateur algérien ». Par ailleurs, ils reprochent à l’office de ne pas avoir honoré les quantités demandées, ne couvrant que 40 % de leurs besoins. Cela expliquerait selon eux l’important recours aux importations. D’où l’intervention de l’état qui, rappelons-le, soutient massivement la production locale : « Il achète le blé dur à un niveau de 500 $/t à l’agriculteur pour le revendre 250 $/t .»
Les transformateurs algériens souhaitent une concertation et aspirent à l’élaboration « d’une charte ». Les industriels seraient « couverts au moins jusqu’en avril », estime Yann Lebeau. Mais après ? Il restera le mois de mai pour clôturer la campagne commerciale algérienne.
Dans un contexte d’excédent (stock de report attendu à 0,34 Mt contre 0,12 Mt en 2008/09), les Français portaient beaucoup d’espoir sur la période janvier-mai, marquée par la fermeture des grands lacs en Amérique du Nord, pour exporter auprès des opérateurs privés algériens. FranceAgriMer a d’ailleurs rehaussé ce mois-ci son estimation des ventes de blé dur sur pays tiers de 25.000 t à 0,4 Mt (0,53 Mt en 2008/09) pour tenir compte, entre autres, du dynamisme des ventes sur l’Algérie. Pour les exportateurs français le manque à gagner pourrait porter sur 150.000 t.