Congrès de Lyon
Interview de Xavier Bernard, président du Congrès des grains de Lyon (Comig)
Question : L’édition 2008 du Congrès des Grains de Lyon est pour la première fois « jumelée » avec le Congrès de Dijon. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de ce choix, sachant que le Congrès de Dijon fonctionne déjà avec celui de Nancy ?
Xavier Bernard : début 2007, nous avons entrepris une réflexion avec nos amis de Dijon. L’objectif clairement annoncé était de pérenniser nos manifestations et, pour cela, d’éviter la multiplication des bourses. L’année ou Dijon-Nancy organisait son congrès dans la capitale Bourguignonne, seule une vingtaine de jours séparait nos deux journées de bourse. Ajoutez à cela la proximité géographique et vous comprendrez aisément que nous avions quelques difficultés à mobiliser le monde nécessaire pour créer une véritable dynamique. Nous avons échangé avec nos voisins et trouvé logiquement une entente sans nuire au congrès de Nancy, avec qui Dijon fonctionne depuis plusieurs années. L’alternance d’un congrès une année à Dijon, l’année suivante à Lyon, nous a paru la formule appropriée. Un rapprochement avec Nancy était un peu prématuré et pas forcément adapté, compte tenu de la géographie parfois spécifique des marchés. D’ailleurs, le succès de leur récent congrès le prouve et je m’en félicite.
Question : nous assistons à un début de campagne très particulier, avec une chute des cours des matières premières. Comment analysez-vous ce début 2008/2009 ?
X. B. : l’analyse de ce début de campagne montre que nous sommes dans un contexte aux antipodes de celui que nous venons de vivre. Grâce à d’excellentes récoltes mondiales, l’offre est abondante ce qui accentue la concurrence entre les différentes origines. La conséquence directe de cette situation est une forte et rapide baisse des prix des céréales. Concernant les oléagineux, et le colza plus particulièrement, une corrélation avec le prix du baril de pétrole est constatée. Alors que beaucoup entrevoyaient ce dernier sur des niveaux proches de 170 dollars au 4 ème trimestre, il est repassé en dessous des 100 dollars depuis quelques semaines, entrainant dans sa chute les graines de colza. La volatilité de la campagne précédente se retrouve… la courbe quant à elle s’est inversée. L’éclaircie possible sur les cours viendra incontestablement de notre capacité à profiter pleinement des « fenêtres » qui nous seront offertes pour exporter, notamment en blé et en orge. Un exercice pas toujours facile dans une année ou le bloc de la mer Noire revient en force grâce à une production abondante.
Question : Comment pouvez-vous qualifier la récolte de céréales 2008 dans votre région, une zone particulièrement intéressée par l’exportation sur l’Italie ?
X. B. : avec une récolte de céréales de 687.700 t fin août, contre 608.300 t l’an passé, la région Rhône-Alpes affiche une année moyenne. Rappelons que la récolte d’été de la campagne dernière était particulièrement décevante, notamment en ce qui concerne le blé tendre. L’excès d’eau que nous avons eu au mois de juin sur certaines zones a pénalisé les rendements et pour partie la qualité des blés. Une partie de la récolte trouvera, cette année encore, un débouché fourrager, faute d’un poids spécifique suffisant. Cette situation est variable d’un département à l’autre. L’Italie, client important pour les céréales de notre grande région, après une présence aux achats en début de campagne est depuis plusieurs semaines plus tournée vers l’Est, privilégiant les prix agressifs des origines russes et ukrainiennes.
Question : vous êtes négociant en grains, comment évolue votre profession de collecteur-stockeur privé et rencontrez-vous de nouvelles difficultés pour exister dans l’environnement agricole actuel ?
X. B. : notre profession de collecteur-stockeur évolue d’une façon extraordinaire. Bien sûr, nos objectifs premiers de valoriser au mieux la production des agriculteurs et d’approvisionner de façon qualitative et régulière nos clients industriels sont toujours d’actualité. Ce sont les moyens pour parvenir à ces objectifs qui évoluent à une vitesse étourdissante. L’utilisation d’outils tels que le marché à terme ou les options sont aujourd’hui indispensables pour diffuser des offres de valorisation collecte adaptées aux demandes des producteurs. Mais pour continuer d’exister dans l’environnement agricole actuel, pour être aux côtés des producteurs de façon performante, nous devons étendre nos missions bien au-delà du double objectif « historique » évoqué plus haut. Nous devons être en capacité d’accompagner nos clients agriculteurs dans la mise en place de la certification environnementale des exploitations agricoles, dans l’application du paquet hygiène à l’entreprise agricole, dans l’amélioration de la performance énergétique des exploitations,… Autant de nouveaux enjeux auxquels nous devons répondre avec les producteurs, dans un contexte règlementaire de plus en plus contraignant. Voilà la vraie difficulté.