Commerce équitable
FairTrade/MaxHavelaar adapte sa logique à la production agricole française
Parce que le commerce équitable n’est pas qu’une affaire Sud-Nord, l’ONG a choisi de réfléchir sur un commerce équitable à la française
Parce que le commerce équitable n’est pas qu’une affaire Sud-Nord, l’ONG a choisi de réfléchir sur un commerce équitable à la française
Le constat est dur mais c'est le constat : là où l’on pouvait penser que le commerce équitable était un beau concept pour les paysans et agriculteurs de l’hémisphère sud (cheval de bataille de Fairtrade/Max Havelaar, FT/MH, depuis 30 ans afin d’assurer un prix juste à des petits producteurs en Afrique ou en Asie), force est d’admettre que la notion peut aussi s’appliquer à la France.
« Le métier d'agriculteur ne garantit même plus le salaire minimum français. Pire, un tiers des agriculteurs perçoit moins de 350 euros de revenu d'exploitation. Le mouvement Fairtrade/Max Havelaar constate que la détresse des agriculteurs n'est plus seulement la réalité des autres. C'est la nôtre, et il faut agir. Il existe des poches de précarité et de difficulté économique dans certains territoires, dans certaines filières et pour certaines denrées. Il convient donc d’amener ce concept sur le territoire français » a affirmé Blaise Desbordes, directeur général de FT/MH, ce mercredi 5 mai, en prélude à la Quinzaine du Commerce équitable au niveau national.
Fruit d’une réflexion entamée il y a maintenant 18 mois et s’appuyant sur l’expression des citoyens français qui « prennent de plus en plus en considération une meilleure rémunération des producteurs français », l’association a donc décidé d’adapter sa certification aux spécificités du pays.
D’autres chiffres, rassemblés dans une étude Opinion Way réalisée pour le compte de Max Havelaar en avril, confirment la démarche : 62 % des Français approuvent l’idée de toujours plus de produits agricoles made in France pour aider les agriculteurs de l’Hexagone et 53 % réclament désormais le respect d'un prix payé aux agriculteurs qui couvre leurs coûts de production. Par ailleurs, 81 % des sondés déclarent avoir agi à leur échelle pour soutenir l'agriculture hexagonale depuis le début de la crise. Enfin, respectivement 67 % et 63 % des Français mentionnent « les prix bas imposés aux agriculteurs par les intermédiaires et les distributeurs » et « la concurrence avec d'autres pays aux normes moins contraignantes » comme étant des freins au développement de l’agriculture nationale.
Du commerce équitable labellisé franco-français
Outre la consommation de produits made in France et le respect d'un prix payé aux agriculteurs qui couvre bien leurs coûts de production, les Français, toujours selon l’enquête Opinion Way, plaident en faveur d’une « meilleure reconnaissance des agriculteurs qui respectent l'environnement (46%) » et pour le « développement de marques et labels leur garantissant une juste rémunération (39%) ».
Dont acte. FT/MH choisit de lancer un référentiel, basé sur un cahier des charges strict, pour faire bénéficier de son label (prix minimum garanti, engagement sur trois ans ou plus pour la visibilité…) à un certain nombre d’agriculteurs en France. « Lorsqu'un agriculteur souhaite être certifié, il doit être situé sur un territoire vulnérable et doit répondre à l'un des trois critères individuels d'éligibilité (vulnérabilité économique au niveau de l’exploitation, jeune installé, et dans une phase de transition écologique) » a expliqué l’équipe FT/MH France ce mercredi.
Les notions de vulnérabilité des territoires et de vulnérabilité économique sont déterminées par FT/MH. Pas de grille nationale donc mais des analyses en fonction des difficultés des territoires et en fonction des prix de revient basés sur un audit à la ferme.
Au menu : blé et lait
Deux projets ont déjà vu le jour, l’un en lait, l’autre en blé. Pour le second, il s’agit d’un biscuit qui porterait le label FT/MH, d’ici « la fin de l’année ou début 2022 » selon Blaise Desbordes, issu de blé produit engageant la coopérative Vivadour dans le Gers et celle de Mansle en Charente (25 M€ de chiffre d’affaires, 80 000 t collectées, 90 % de la collecte contractualisée, démarche HVE en cours).
« Ce projet est innovant et reconnaît nos métiers. Alors que nos prix actuels sont indexés sur les prix mondiaux, la démarche va garantir un prix aux agriculteurs et va remettre le travail et l’agriculteur au centre de la négociation commerciale » plaide Florent Estebenet, agriculteur et administrateur de Vivadour.
« Nous avons présenté la démarche à deux enseignes de distribution et à deux fabricants à marque nationale. Nous attendons le résultat de leurs travaux » précise Blaise Desbordes.
L’idée est par ailleurs d’étendre, dans le secteur du blé, la possibilité de labellisation FT/MH aux segments des produits de la viennoiseries, de la pâtisserie et de la biscuiterie.
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Un prix minimum payé aux agriculteurs et défini sur la base des prix de revient
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Une prime financée par l'ensemble des maillons en aval de l'organisation de producteurs, gérée collectivement par les producteurs et dédiée aux projets sociaux et à la transition écologique
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Un engagement de l'ensemble de la filière sur des contrats pluriannuels
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Certification destinée aux agriculteurs vulnérables des territoires vulnérables
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Certification destinée aux agriculteurs jeunes installés
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Certification conçue pour soutenir la transition écologique
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Certification adressée aux agriculteurs organisés collectivement
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Accompagnement pour atteindre les exigences de la certification
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Formation à des pratiques plus durables
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Contrôle du respect du cadre réglementaire environnemental
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Critères articulés avec la certification Haute Valeur Environnementale – HVE
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Encadrement de l'utilisation des produits phytosanitaires
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Exigence évolutive sur les marqueurs transition écologique (utilisation des produits phytosanitaires, fertilisation, stockage des effluents d'élevage, utilisation de l'eau, couverture des sols, entretien des espaces de biodiversité, alimentation animale, bientraitance animale...).