Exportations françaises de blé tendre 2019/2020 attendues à 12,6 Mt par FranceAgriMer
La France reprend de solides positions sur ses destinations traditionnelles (Afrique Subsaharienne et de l'Ouest) et expédie des volumes élevés sur la Chine.
La France reprend de solides positions sur ses destinations traditionnelles (Afrique Subsaharienne et de l'Ouest) et expédie des volumes élevés sur la Chine.
« Des opérateurs ont partagé des chiffres plus élevés concernant les exportations hexagonales de blé tendre sur pays-tiers pour la campagne commerciale 2019/2020. Nous tablons sur 12,6 Mt, en hausse de 0,2 Mt par rapport au mois dernier », s’est exprimé Marc Zribi, chef de l’unité grains et sucre de FranceAgriMer (Fam), lors de la conférence de presse suivant le conseil spécialisé des céréales à Paris le 12 février.
Bonnes performances sur le Maroc
Depuis le début de la présente campagne, l’origine française est très compétitive sur la scène mondiale. Ce qui a permis de démarrer sur les chapeaux de roues, avec « 6,647 Mt embarquées sur pays-tiers entre le 1er juillet 2019 et le 11 février 2020. Le mois de janvier a été très dynamique avec 1,255 Mt embarquées, et déjà 0,5 Mt chargées en février », précise Marion Duval, adjointe au chef de l’unité grains et sucre de Fam. Elle ajoute que l’Hexagone reprend pied chez ses clients traditionnels, soit l’Afrique subsaharienne et l’Afrique de l’Ouest : hausse de 120 % des expéditions chez le premier d’un an sur l’autre, à 1,76 Mt, et hausse de 230 % chez le second, soit 0,75 Mt. Le Maroc a acheté depuis le début de la campagne (juillet-décembre 2019) 364 679 Mt, en hausse de 452 % par rapport à l’an dernier ! L’Algérie reste la première destination française, avec 2,5 Mt acquises. « Le chiffre est en recul par rapport à l’an dernier (-25%), mais les opérateurs espèrent que l’Algérie va se repositionner sur la seconde partie de campagne pour compenser l’absence d’un important achat durant l’automne, qui pourrait bénéficier à la France », soutient Marion Duval.
1,2 Mt de blé tendre français sur la Chine ?
La demande chinoise s’avère également dynamique. La France y a expédié 0,643 Mt d’après Fam depuis le début de la campagne. L’organisme public estime que l’Hexagone pourrait y placer 1,2 Mt. Les raisons évoquées du regain d’intérêt chinois pour le blé Français : les disputes commerciales Chine/Canada, Chine/Etats-Unis et la faible offre Australienne.
Fam se réjouit des 0,72 Mt de blé tendre hexagonal sur l’Egypte depuis juillet 2019. « La France pourrait y envoyer 0,9 Mt, voire 1 Mt selon certains opérateurs sur 2019/2020 », complète Marc Zribi. Les autres concurrents sont également moins présents : l’Ukraine a déjà expédié 15 Mt sur son objectif de 19 Mt. Ajoutons à cela la Russie qui a réduit sa cadence par rapport à l’an passé. Selon des données croisées de Reuters et du CIC (Conseil international des céréales), les exportations du pays atteignent, entre juillet 2019 et janvier 2020, seulement 21,185 Mt, en repli de 22% par rapport à l’an dernier sur la même période, et avec pour objectif 33 Mt sur l’ensemble de la saison. Fait originale, la Turquie est lors de cette campagne la première destination du blé tendre Russe, du fait de la mauvaise récolte nationale ainsi qu’au Kazakhstan, habituel fournisseur. Les experts de Fam n’excluent pas des raisons géopolitiques en plus des raisons fondamentales évoquées. Ensuite, l’Arabie Saoudite, « qui a pourtant ouvert son marché aux origines mer Noire, est restée fidèle aux fournisseurs traditionnels du nord communautaire et de la mer Baltique », avance Marion Duval. Enfin, l’Argentine s’oriente, pour le moment, essentiellement sur l’Asie du sud-est, afin de contrebalancer la moindre présence Australienne notamment.
Néanmoins, la seconde partie de campagne concernant la commercialisation de blé tendre français ne sera pas forcément de tout repos. Un des concurrents potentiel pourrait être l’Inde, susceptible d’exporter 10 Mt cette année. De plus, le pays a « fait une demande pour être fournisseur du Gasc dès 2020/2021 », alerte Marc Zribi, constituant ainsi une menace potentiel à plus long terme. Sans oublier que la Russie n’a rempli que 64% de son objectif d’exportations, et qu’elle tente de pénétrer le marché algérien. Les fabricants d’aliments du Nord-UE jugent, comme les français, le blé tendre moins attractif en formulation pour le moment. « Les fabricants d’aliments allemands, hollandais, belges… préfèrent consommer du maïs », appuie Marion Duval. Raison pour laquelle Fam a revu à la baisse les exportations hexagonales sur l’UE, passant de 8,198 Mt à 8,018 Mt entre janvier et février pour 2019/2020. Au total, les expéditions françaises sur l'ensemble de la présente campagne, incluant celles sur l'intracommunautaire et celles sur les pays-tiers, se stabilisent aux alentours des 20,6 Mt. L'organisme public a revu en légère hausse les stocks nationaux, à 2,44 Mt en février (2,4 en janvier), conséquence essentiellement d’une baisse des utilisations des Fab de 100 000 t d’un mois sur l’autre (au profit du maïs et de l'orge), à 5,2 Mt. La consommation des meuniers est de son côté revue en légère hausse (30 000 t), à 2,730 Mt.
L’Ukraine très présente sur l’Espagne en orge
Du côté de l’orge fourragère, Marion Duval alerte sur le fait que l’Ukraine est anormalement présente en seconde partie de campagne 2019/2020 sur l’Espagne, au détriment de l’origine française. Ceci en raison du fait que « l’Ukraine avait ses ports engorgés par le maïs en début de campagne, laissant plus de disponibilités en blé et en orge pour la suite », analyse-t-elle. Les exportations hexagonales sur l'UE sont donc moins dynamiques que prévues actuellement, et sont revues en légère baisse, passant de 3,782 Mt à 3,677 Mt. Celles sur pays-tiers sont attendu à 3,5 Mt (stable par rapport au mois dernier). Bien que la consommation des Fab français est revue en hausse de 50 000 t entre janvier et février, à 1,4 Mt, les stocks sont donc revus en légère hausse d'un mois sur l'autre, passant de 1,822 Mt à 1,965 Mt. Les cultures au Maroc (retour des pluies) et en Algérie seront à surveiller, tout comme les flux Chine/Australie, précise Fam.
Concernant le maïs, « on remarque d’importants flux de marchandises ukrainiennes vers la Chine, laissant moins de disponibilités pour l’UE », souligne Marion Duval, bénéficiant au maïs brésilien. Le Brésil est d’ailleurs en pleine récolte, qui s’annonce bonne, et concurrence l’origine française sur le nord communautaire. Raison pour laquelle Fam a revu à la baisse les exportations hexagonales sur l’UE, passant de 3,830 Mt à 3,765 Mt entre janvier et février. Autres faits marquants, l'offre française est revue à la hausse de 169 000 t par Fam, à 10,294 Mt, compte tenu d'une offre supérieure aux attentes dans le Sud-Ouest. La hausse de la consommation des Fab hexagonaux de 50 000 t entre janvier et février, à 2,55 Mt, ne permet pas de faire baisser les stocks nationaux, qui passent de 2,073 Mt à 2,206 Mt sur la période.
Prudence au sujet du bilan blé dur
En blé dur, le bilan de Fam est à prendre avec des pincettes, le marché national étant difficile à lire. Les ajustements concernant les ressources disponibles (collecte, stock initial sur le marché, importations) sont conséquents, oscillant depuis 2014/2015 entre 160 000 t et plus de 300 000 t. Ainsi, le stock de fin de campagne français à 57 000 t est à prendre avec prudence, pouvant tout à fait être revu à la hausse de 100 000 t voire plus dans les mois prochains. Il n’en reste pas moins que le marché mondial reste tendu, avec une offre canadienne mais également française en baisse par rapport à l’an dernier.
Les grèves : des conséquences sur les coûts et l’image, moins sur les volumes exportés
Le sujet des grèves a bien entendu été abordé. Benoît Piètrement, président du conseil spécialisé des céréales de Fam, a rappelé que les mouvements sociaux ont engendré de nombreux transferts de mode de transport des marchandises, depuis les trains vers les camions, engendrant des surcoûts importants pour la filière, « allant de 4 à 6 €/t ». François Gatel, directeur général de France Export Céréales (Fec) ajoute que les évènements de décembre-janvier « ont causé du tort à la France en termes d’image auprès des pays importateurs de céréales, sachant que notre point fort est notre sérieux logistique ». « Un sous service de l’office des céréales tunisien a même demandé à ses acteurs (services d’importations de grains tunisiens) de faire attention aux mouvements de grèves français pour être sûr qu’ils soient approvisionnés », renchérit Philippe Heusele, président de Fec, Mais finalement, plus de peur que de mal : « le directeur de l’office a rétabli la situation, réaffirmant la confiance de l’office dans les origines françaises, arguant que les grèves ne sont que ponctuels ». Benoît Piètrement salue enfin le fait que « les opérateurs français ont bien anticipé les mouvements sociaux, et se sont globalement adaptés ».