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Certifications agro-environnementales en Amérique du Sud
Blé OGM : en Argentine, l’urgence de montrer patte blanche

© Geralt (Pixabay)

Maintenant que, depuis début novembre, les meuniers et les exportateurs de grains basés en Argentine exigent un certificat blé non OGM auprès de leurs fournisseurs1, la filière ressent le besoin urgent de se doter de certifications agro-environnementales solides. Pas seulement pour éviter un tel écueil, mais plus généralement pour montrer patte blanche. Car cela peut rapporter gros, vu les primes versées en Europe pour du soja estampillé non OGM.

Outre le fait, surprenant, qu’un semencier (Bioceres) ait pu procéder cette année aux quatre coins de l’Argentine à une multiplication de variétés de blé transgéniques sur des parcelles prêtées par ses céréaliers-actionnaires, en tout sur 55 000 hectares… sans avoir obtenu d'autorisation de mise sur le marché dans quelque pays que ce soit, la réaction glaciale des exportateurs révèle un besoin de rassurer leur client, en l’occurrence, la meunerie brésilienne. Ceci par des systèmes d’audit censés irréprochables. Or, dans ce domaine, les pays du Mercosur partent de zéro, le privé assumant seul ses responsabilités.

En Argentine, l’initiative la plus aboutie en ce sens est celle de l’association argentine des producteurs en semis direct (Aapresid). Son directeur, Alejandro Clot, nous livre un scoop : « Pour la première fois cette année, onze ans après le lancement de notre certification de parcelles cultivées en système de non labour, un importateur européen (un Hollandais) a versé un bonus de 40 centimes de dollar par tonne de soja, aux 52 céréaliers qui ont certifiées certaines de leurs parcelles », informe-t-il. Notons au passage, au risque de confondre le lecteur, que ces adhérents d’Aapresid sont pour bon nombre les actionnaires de Bioceres cités plus haut.

Ce petit pas est néanmoins celui d’un géant. Car il s’agit d’une prime inédite payée par un importateur européen à des Sud-américains. « Elle porte aujourd’hui sur 120 000 hectares », précise Alejandro Clot. J’ai remarqué en Europe une ignorance profonde de notre agriculture qui est souvent associée de façon caricaturale à la déforestation et aux OGM », dit-il. Il énumére en guise de réponse les piliers du cahier des charges de la certification Aapresid : le non labour, un assolement vertueux, la nutrition des sols, le recours aux couverts végétaux, et la réduction d’usage de produits phytosanitaires de source fossile.

La Fédération européenne des industriels des aliments composés (Fefac) a intégré la certification Aapresid dans son guide d’achat de soja responsable pour la deuxième année consécutive, en la revalidant le mois dernier.

Mais cette initiative reste une goutte d’eau dans l’océan des Pampas où environ 150 Mt de grains sont obtenues chaque année sur environ 30 Mha.

« Cependant, sur ces 30 Mha de terres cultivées, environ 90 % le sont en non labour et pourraient donc aisément être certifiées sous cet aspect », note Gustavo Idígoras, le directeur du Centre argentin des exportateurs de céréales.

La production de grains biologiques en Argentine est infime également, étant circonscrite à 30 000 t de blé et 50 000 t de soja environ, selon cet expert.

Par ailleurs, la filière argentine du biodiesel étant tournée vers le marché européen, celle-ci se plie aux règles du certificat allemand ISCC, garde-fou contre la déforestation. Cette certification concernerait environ 4 Mt de soja produites chaque année.

De plus, le projet de certification dit "Carbone neutre" a été lancé en 2019 par les sept bourses aux céréales d’Argentine. Il vise à aider les agro-industriels du pays à calculer leur empreinte carbone. « Nous devons anticiper les exigences croissantes de l’UE au vu de ses objectifs environnementaux à l’horizon 2030. Nous aimerions toucher une prime d’ici là, mais le but est bien d’éviter les coups de bâton qui pourraient pleuvoir à cette échéance », avoue Gustavo Idígoras. « Nous avons élaboré deux manuels destinés aux agro-industriels : l’un centré sur les bonnes pratiques agro-environnementales et l’autre sur le calcul de leur bilan carbone. Les manuels destinés à la filière du soja (fèves et tourteaux) et maïs sont déjà prêts. Le processus doit se concrétiser en 2025 avec l’attribution des premiers certificats », selon lui. Ce programme est financé intégralement par ses acteurs.

Enfin, la récolte argentine de soja non OGM ferait déjà l’objet d’une certification en ce sens. Elle serait pour l’essentiel stockée et exportée vers l’Europe et la Chine par un seul opérateur, Kumagro, qui n’a pas répondu à nos sollicitations.

(1) Article signé par Fernando Bertello, publié le 29 octobre 2021.

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