Évènement
Baisse du prix du blé tendre, une chance pour l’élevage ?
Le retournement des prix du blé ne change pas grand-chose aux difficultés des filières de l’élevage. La grande distribution, les yeux rivés sur les cours du blé tendre, attend désormais des baisses, alors même que les hausses antérieures n’ont pas été toutes passées.
Les Space se suivent et ne se ressemblent pas. L’an dernier, la forte hausse des prix de la fraction “énergie” des aliments pour animaux s’ajoutait à celle de la fraction “protéine”, traditionnellement plus volatile, pour faire souffler un vent de panique sur le secteur des productions animales. Absence de contractualisation, manque de solidarité entre productions animales et végétales, perte de compétitivité… étaient pointés du doigt. Mais, depuis, la notion de compétitivité a pris du poids : les Allemands ne sont pas assis, comme les Français, sur un tas de céréales et taillent pourtant dans le vif de nos marchés. Idem pour les Néerlandais, pourtant bien plus dépendants de l’importation pour alimenter leurs usines de nutrition animale. Or, le coût de l’aliment poulet de chair français est tout à fait compétitif (277 €/t en France contre 288 €/t en Allemagne et 275 €/t aux Pays Bas).
En volaille, la compétitivité est conditionnée par l’aval
L’évolution des cours du blé n’y fait pas grand chose, car le différentiel de compétitivité avec nos voisins, qui nous vendent quasiment la moitié des poulets consommés en France, trouve des explications plus dans l’aval : poids du poulet fini, coûts d’abattage et de transformation, relation avec les GMS et la RHF... Le Comité de liaison interprofessionnel de la filière volaille de chair française listait tous ces points lors de sa conférence de presse de lancement de sa campagne, mercredi 11 septembre : « 50.000 emplois en sursis : les décisions, c’est maintenant. » « Le premier opérateur sur le marché français, c’est l’importation », martelait d’ailleurs Gilles Huttepain, président de la FIA (Fédération des industries avicoles).
Aux côtés de Michel Prugue, président de la CFA (Confédération française de l’aviculture), il demande des réponses concrètes au Premier ministre. « L’indépendance alimentaire doit être une priorité politique. La suppression des restitutions ne met pas seulement en péril la filière export mais toute la filière avicole », expliquent les présidents en demandant des mesures d’urgence pour passer les dix-huit prochains mois. Plusieurs cars de salariés des entreprises d’abattage – y compris leurs dirigeants – et d’aviculteurs ont d’ailleurs été affrétés pour qu’ils viennent dire leur inquiétude aux politiques.
En porc, les Fab assurent le lissage des prix de l’aliment
Et la situation de la filière porcine n’est pas moins précaire, même si le prix du porc reprend des couleurs depuis quelques jours. La hausse des prix des matières premières a incité, l’an passé, les éleveurs fabriquant à la ferme (“fafeurs”) à faire jouer à plein le rôle de “lisseur” des prix qu’assurent les fabricants d’aliments grâce à leurs couvertures, c’est-à-dire en achetant de l’aliment tout en conservant leurs propres céréales ou en les vendant au plus haut. Cette année, la conjoncture est totalement différente, mais la protéine reste chère. Depuis le début de l’année, les aliments porcs auraient cependant perdu en moyenne 50 €/t, et une nouvelle baisse est attendue ce mois-ci. Difficile de savoir si les “fafeurs” vont conserver leur posture opportuniste et lâcher les aliments au profit de leurs matières premières, ou rester aux achats. Dans tous les cas, l’évolution du cheptel français est inquiétante et les tonnages baissent. Sur 2012, le prix théorique de l’aliment Porc croissance aurait dû augmenter jusqu’à 330 €/t environ. Dans la réalité, il n’a pas dépassé 315 €/t environ. L’analyse des prix et coût dans le temps montre que, « sur 2012, ce sont plus de 100 M€ de dépenses évitées grâce aux entreprises de nutrition animale », explique Laurent Morin (Nutrinoë).
En filière bovine, la matière première d’intérêt reste la protéine, la production de maïs assurant la couverture fourragère sans recours massif aux achats de céréales.
De façon générale, la question n’est donc pas ou peu la position des éleveurs face à leurs fournisseurs d’aliments, mais bien le comportement des industriels de l’aval face à leurs clients distributeurs. Les acheteurs de ces derniers sont désormais formés au suivi des cours des matières premières.