La sélection partout et pour tous
Gagner en productivité, en confort de travail, mieux anticiper les performances de ses reproducteurs, produire des agneaux plus beaux, de belle conformation et en moins de temps. Tout cela est utopique selon vous ? Pourtant un levier permet de répondre à toutes ces attentes. La sélection génétique permet l’amélioration de son propre troupeau mais aussi des races ovines en général. Encore trop marginalisée sur beaucoup d’exploitations, la sélection est pourtant à la portée de chacun et représente un investissement intéressant à réaliser. Des freins existent cependant, mais mis en perspectives des gains potentiels permis par une meilleure génétique, il serait dommage de s’en priver !
Pourquoi s’intéresser à la sélection ? « C’est le meilleur levier à notre disposition aujourd’hui pour maîtriser son élevage », assène Bertrand Bouffartigue, chargé de mission à Races de France. La sélection, via l’achat de reproducteurs qualifiés d’une part et les suivis dans l’élevage (enregistrements des naissances, contrôle de performance, etc.) d’autre part, constitue un outil de pointe pour gérer les différents paramètres technico-économiques de son élevage.
Bertrand Bouffartigue pointe la dynamique d’ouverture de la sélection génétique à toute la production ovine française. « Par le passé, les sélectionneurs étaient vus un peu comme un club fermé, une élite. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, les clivages qui ont pu exister entre utilisateurs et sélectionneurs tendent à s’effacer. En effet, les sélectionneurs s’impliquent de plus en plus dans les organisations de producteurs et dans les organismes professionnels agricoles et vice-versa. Les productions de viande ovine et de lait deviennent intrinsèquement liées au développement de la génétique dans les élevages. »
Les jeunes installés mesurent l’importance de la sélection
Et la génétique commence à ne plus être considérée comme un levier à part de la conduite d’élevage, mais au moins avec une importance équivalente à l’alimentation ou au matériel.
« Il y a un assez bon turn-over parmi les sélectionneurs, apprécie l’expert en races ovines. Les jeunes éleveurs voient l’intérêt de la génétique appliquée à leurs élevages. Il y a un vrai potentiel à exploiter. » « Parmi les installations de ces dernières années, on observe davantage d’éleveurs dotés de diplôme d’études supérieures. Ceux-ci n’hésitent pas à remettre en question certaines pratiques, comme acheter le bélier tout-venant chez le voisin, au seul argument que c’est plus simple », développe Pascal Potard, vice-président de Géode, coopérative de génétique ovine.
L’ancien éleveur nous apprend que certaines races sont même tellement demandées que des ruptures d’approvisionnement sont parfois constatées. « Ce n’est pas un problème car on parvient à répondre à la demande dans la majorité des cas mais ça montre surtout le regain de dynamisme autour des reproducteurs de qualité génétique connue et reconnue. »
Précision, sérieux et transparence
Néanmoins, se lancer dans la génétique n’est pas une mince affaire. Il est recommandé pour les éleveurs qui souhaitent s’investir davantage d’être précis, sérieux et transparent sur ce qui se passe sur l’élevage. « L’enregistrement des données (naissances, luttes – notamment pour les gestions en lots –, identification, sanitaire, etc.) est primordial pour pouvoir évaluer et connaître les capacités génétiques des reproducteurs. Il faut absolument s’y tenir et montrer patte blanche. »
Le travail collectif revêt ici une importance toute particulière. « Quand on fait le choix d’une race, on s’attend d’une part à ce qu’elle réponde aux besoins techno-économiques de l’éleveur, mais également qu’elle attire d’autres éleveurs, d’autres potentiels futurs sélectionneurs. Il faut donc être prêt à jouer le jeu du collectif. » Bertrand Bouffartigue rappelle par ailleurs que les sélectionneurs doivent accepter de se séparer de leurs meilleurs béliers, qui intégreront les stations de contrôle individuel et seront vendus à d’autres éleveurs. De même, il n’aura pas toujours le choix du bélier qui inséminera ses brebis, mais « tous les béliers qui sont diffusés par les organismes de sélection (OS) sont d’excellents reproducteurs », tempère-t-il.
En résumé, rigueur interne et discipline collective sont les règles incontournables d’une gestion génétique réussie.
LE SAVIEZ-VOUS ?
19 organismes de sélection en France
La France compte 19 organismes de sélection (OS) pour plus d’une soixantaine de races ovines : 2 OS lait, 1 OS mixte (lait et viande), 16 OS viande (dont une ovin-bovin et 9 qui gèrent plusieurs races). L’OS Races ovines bretonnes est en cours de création.