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Santé financière des coopératives céréalières françaises : c’est grave docteur ?

Antoine Hacard, président de La Coopération agricole Métiers du grain, a présenté quelques éléments du « plan infrastructures 2030 », afin de faire face aux difficultés rencontrées par les coopératives céréalières et les négociants agricoles hexagonaux.

Antoine Hacard, président de la section Métiers du grain de LCA, et Catherine Matt, la directrice.
© Kévin Cler - La Dépêche Le Petit Meunier

Quel est l’état de santé pécunier des coopératives céréalières françaises ? À en croire Antoine Hacard, président de la section Métiers du grain de La Coopération agricole (LCA Métiers du grain), la situation est (très) grave : « les pertes s’élèvent, rien qu’en considérant la mauvaise moisson de céréales à paille 2024, à 300 millions d’euros (M€) », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Paris le 24 septembre 2024. Aux récoltes cataclysmiques s’ajoute le contexte macroéconomique adverse : inflation des coûts de l’énergie, des transports, des salaires, des taux d’intérêt etc., qui plombent les marges des organismes stockeurs (OS).

Lire aussi : Soufflet Négoce by InVivo estime le disponible exportable de blé français sur pays tiers à moins de 5 Mt

Ces 300 M€ prennent en compte la chute des volumes (10 Mt de moins entre 2023 et 2024 pour le blé tendre), engendrant un sévère manque à gagner en termes de ventes. Mais il ne faut pas oublier la détérioration de la qualité. Le président du syndicat rappelle qu’à cause des faibles poids spécifiques (PS), un gros travail d’allotement, onéreux, est en cours, afin de respecter les cahiers des charges des clients.

Les marges des coopératives dégringolent

Du côté du contexte macroéconomique, le syndicat rappelle que l’inflation est passée de 1,6 % à 4,9 % entre 2023 et 2024, pendant que les taux d’intérêt ont été multipliés par quatre sur la même période. Par ailleurs, « le coût du transport routier a été multiplié par deux depuis 2020, celui de l’énergie s'est accru de 30 % et celui des masses salariales de 12 % depuis 2021 », fait valoir Antoine Hacard. Ces éléments ont conduit à « l’augmentation des charges fixes, qui a entamé les marges des coopératives de 50 % », déplore-t-il.

« Le coût du transport routier a été multiplié par deux depuis 2020, celui de l’énergie de 30 % et celui des masses salariales de 12 % depuis 2021 », selon Antoine Hacard, président de LCA Métiers du grain.

2024 : le pire exercice de l’histoire des coopératives céréalières ?

Tout cela fait dire au dirigeant de LCA Métiers du grain que « l’année 2024 est le pire exercice de l’histoire des coopératives. (…) En 2016, nous nous étions vite remis des moissons catastrophiques, car le contexte macroéconomique était bien plus favorable. En 2024, nous avons la double peine ».

Pour LCA Métiers du grain, la baisse de la production céréalière n’est pas conjoncturelle, mais structurelle. « Il y a quelques années, on disait qu’une très bonne récolte, c’était 40 Mt de blé tendre. En 2023, nous employions le même qualificatif pour un volume de 35 Mt… », pointe le président du syndicat. Les raisons : la réglementation française trop contraignante et le changement climatique, d’après LCA Métiers du grain.

« Il y a quelques années, on disait qu’une très bonne récolte, c’était 40 Mt de blé tendre. En 2023, nous employions le même qualificatif pour une moisson de 35 Mt… », déclare Antoine Hacard.

Face à ce constat, l’organisation propose un plan de résilience pour les coopératives : le « plan infrastructures 2030 », destiné à améliorer la compétitivité des OS. Les parties prenantes sont nombreuses : de la FNA (Fédération du négoce agricole) à Terres Inovia, en passant par Intercéréales et Arvalis, pour ne citer qu’eux. L’objectif global est, entre autres, la modernisation des silos de stockage. Le travail des grains est en effet un élément clé de la compétitivité hexagonale, et la filière a « besoin d’investissements massifs pour accompagner les transitions », soulève Antoine Hacard. Cela nécessitera de lourds efforts financiers. Une étude sur les besoins précis des coopératives en soutien de l’État est en cours d’élaboration, et s’achèvera en début d’année 2025, annoncent les représentants du syndicat.

LCA Métiers du grain demande l’extension du « dispositif Aval » aux oléagineux

Enfin, LCA Métiers du grain a deux requêtes, « qui ne coûteront pas 1 € à l’État français », se targue Antoine Hacard. La première : l’extension du « dispositif Aval » aux oléagineux, qui ne s’applique actuellement qu’aux céréales. Petit rappel : ce dispositif permet aux coopératives de faire garantir auprès des banques leurs stocks par l’État. « Les banques sont cruciales dans le financement des activités des coopératives. Car nous payons les agriculteurs tout de suite pour les achats de leurs grains, alors que nos ventes sont étalées tout au long de la campagne », détaille Antoine Hacard, ce qui engendre des besoins de trésorerie. 

Grâce à ce dispositif, les OS peuvent bénéficier de taux d’intérêt très bas lors de la contraction d’emprunts. Mais pour des raisons inconnues, il ne s’applique actuellement qu’aux stocks de céréales. 

Réunion avec les banquiers prévue durant l’automne 2024

Une réunion avec des représentants de la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque de France est prévue « pour l’automne 2024, soit la mi-octobre. Ceci afin que les institutions bancaires gardent confiance envers les coopératives », indique le président de LCA Métiers du grain.

Deuxième requête : l’abrogation de la loi sur la séparation vente-conseil. 

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