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Couverts d’interculture : semer juste après moisson pour bénéficier de l’humidité du sol

Le semis d’une culture intermédiaire au plus près de la récolte de la céréale a fait l’objet d’une étude approfondie dans les Hauts-de-France. Les résultats sont concluants sur le terrain, transposables à diverses situations au nord de la Loire.

Le semis avec un outil à dents adapté procure de bons résultats sur la levée de couverts rapidement après moisson. © R. Crignon/Agro-Transfert
Le semis avec un outil à dents adapté procure de bons résultats sur la levée de couverts rapidement après moisson.
© R. Crignon/Agro-Transfert

Le service rendu par un couvert d’interculture est proportionnel à la biomasse qu’il produit. « Pour aller chercher un maximum de biomasse, un moyen est d’augmenter la période de présence du couvert en semant rapidement après moisson avec le moins de travail du sol possible. L’humidité préservée du sol permettra une levée rapide du couvert », explique Pierre-Alban Jacquet, responsable animation sol et vie à la coopérative Cérésia. Les déchaumages qui sont couramment réalisés à l’interculture engendrent une perte d’eau accélérée du sol, même s’ils ont leur utilité par ailleurs contre les adventices et certains ravageurs (campagnols, limaces…).

Semis direct avec outils à dents, à disques droits ou inclinés, ou travail superficiel du sol : plusieurs techniques d’implantation ont été testées par Cérésia dans le cadre du projet multifonctionnalité des couverts. « L’outil à dents crée un bon contact entre la terre et la graine, même si l’on déplace plus de terre qu’un outil à disque. On génère plus de desséchement mais c’est une technique adéquate quand les pailles sont enlevées ou broyées assez ras, explique le spécialiste de Cérésia. Laisser les chaumes hauts préserve l’humidité du sol, mais, dans ce cas, un outil à dents est à proscrire en raison du risque de bourrage important. Un outil à disques, en particulier à disques inclinés, sera plus approprié, car il crée un meilleur contact entre la terre et les graines que des disques droits. » Le semis direct à disques permet une meilleure conservation de l’eau dans le lit de semence qu’un outil à dents.

Une meilleure levée de la vesce dans des chaumes hauts

Pierre-Alban Jacquet voit plusieurs avantages à laisser les chaumes hauts : diminution de l’évaporation de l’eau du sol, limitation de la gêne pour le semis direct à disques et économie sur le carburant consommé lors de la récolte. Dans un essai, pour des couverts de vesce, cette modalité a permis une levée deux fois meilleure que dans des chaumes bas avec un semis à disques droits. Ce constat ne vaut pas pour toutes les espèces : pour la phacélie, par exemple, le taux de levée n’a pas été influencé par ces facteurs.

Mais il y a des inconvénients à travailler dans des chaumes hauts : le risque de bourrage si l’on a recours à un outil à dents, et une moindre efficacité de la régulation naturelle des campagnols par les rapaces. « Pour pallier ce problème, on peut broyer ou faucher les chaumes après le semis du couvert. Le mulch créé en surface ne gêne pas la levée des couverts et on préserve ainsi l’humidité du sol », explique Pierre-Alban Jacquet.

Sur le plan économique, il y a peu de différences de coût entre semis TCS, à disques ou à dents : entre 24 et 36 euros/ha selon le barème d’entraide 2019-2020. Ce type de semis est beaucoup moins onéreux qu’un semis classique précédé de deux déchaumages, proche de 80 euros/ha. Le semis direct à dents procure le meilleur taux de levée des espèces du couvert.

Un mélange intégrant légumineuses, crucifères, phacélies…

Le mélange d’espèces est conseillé pour le couvert végétal. Quelle composition choisir ? « On y mettra une légumineuse pour sa faculté à capter l’azote, comme la vesce velue, qui a la capacité à bien se développer l’été en conditions sèches, ou le trèfle d’Alexandrie, à condition de le semer assez tôt, conseille Pierre-Alban Jacquet. Une crucifère dans un couvert est une assurance biomasse pour un coût modéré. Pour des semis en juillet, il faudra veiller à choisir des variétés tardives chez le radis fourrager, voire très tardive pour la moutarde blanche en cas de semis début août. Avant betterave, on peut opter pour une variété antinématodes. »

Les crucifères sont de bons pièges à nitrates. C’est aussi le cas de la phacélie. Cette plante mellifère cumule les atouts : bonne capacité à lever en conditions sèches, sans favoriser certains parasites, contrairement à d’autres espèces. Au nord de la Loire, sorgho, millet, moha ou nyger sont à proscrire, car trop tardifs pour se développer suffisamment.

 

Un couvert avec le mélanges de plusieurs espèces parmi lesquelles des légumineuses, crucifères, phacélie voire graminées augmente les chances d'obtenir une bonne biomasse à l'automne. © R. Crignon/Agro-Transfert
Un couvert avec le mélanges de plusieurs espèces parmi lesquelles des légumineuses, crucifères, phacélie voire graminées augmente les chances d'obtenir une bonne biomasse à l'automne. © R. Crignon/Agro-Transfert

Pour Romain Crignon, chargé de projet couverts d’interculture à Agro-Transfert-RT, « les légumineuses ont de forts besoins en eau et des exigences en températures modestes pour la levée selon la bibliographie. Mais leurs besoins en eau et température sont importants  pour la croissance. Pourvu qu’elles soient semées assez tôt, elles déplafonnent la productivité du couvert, surtout s’il n’y a pas beaucoup de reliquat azoté dans le sol. Les conditions d’humidité et de fraîcheur avec un semis juste après moisson leur conviennent bien. Dans les Hauts-de-France, les légumineuses doivent être semées avant le 15 août pour bénéficier de températures suffisantes pour leur développement. Les crucifères sont plus tolérantes sur les conditions d’humidité et de température. Un radis fourrager peut s’accommoder de conditions difficiles. »

Des apports d’engrais organiques possibles sur des couverts éligibles aux SIE

Les couverts sont éligibles aux surfaces d’intérêt écologiques (SIE) à condition de constituer un mélange d’au moins deux espèces. « C’est un point important dans les régions de grandes plaines où il n’y a pas de luzerne ou de bordures de bois, également éligibles », observe Pierre-Alban Jacquet. La liste d’espèces positives pour cette éligibilité est très large. Le couvert doit rester en place huit semaines, avec des règles par département concernant les dates de semis et de destruction. L’application de phyto y est interdite. L’apport d’engrais organique est possible sur des couverts poussants en respectant localement les règles de la directive Nitrates.

« Il vaut mieux décaler la fertilisation à partir du 25 septembre, une fois que le couvert est bien en place et que les légumineuses ont pu se développer », conseille le spécialiste de Cérésia. Agriculteur à Noyales dans l’Aisne, Victor Boutin opte pour cette période d’épandage pour les lisiers et fumiers de son exploitation. « La volatilisation ammoniacale et les pertes d’azote qui en découlent sont beaucoup moins importantes qu’avec un apport en plein été. »

Le semis d’un couvert à la volée dans le précédent cultural est une technique à l’étude, qui permettrait une levée des couverts sous le mulch de paille pour un coût modique d’intervention. Avec une mise en œuvre qui reste à parfaire.

 

EN SAVOIR PLUS

Des informations en ligne sur la multifonctionnalité des couverts

La structure Agro-Transfert Ressources et Territoires a mis en ligne documents et présentations sur le thème "Cultivons les couverts". Conduit dans les Hauts-de-France, le projet Multifonctionnalité des couverts d’interculture a été mené avec plusieurs partenaires : Inrae, chambre d’agriculture, coopératives, école d’ingénieur, Fredon… Les disparités de conduites du couvert sont grandes selon que les objectifs sont réglementaires ou agronomiques. Des essais ont été conduits mettant en avant les services fournis par les couverts, les techniques de conduite optimales et des pratiques innovantes.

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