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Coûts de mécanisation : « La Cuma pour le collectif et l’accès à des matériels performants »

Agriculteur dans le Loiret, Franck Gaury raisonne collectif pour les achats de matériels, une solution pour limiter les investissements, réduire les coûts d’utilisation et profiter de machines parfois inaccessibles en individuel.

Les trois adhérents de la Cuma du Soleil engagés sur le pulvérisateur automoteur Artec F40 ont créé un groupe WhatsApp pour en planifier l’utilisation.
Les trois adhérents de la Cuma du Soleil engagés sur le pulvérisateur automoteur Artec F40 ont créé un groupe WhatsApp pour en planifier l’utilisation.
© F. Gaury

« Notre Cuma a toujours été précurseur dans les investissements en matériels équipés des dernières technologies. Nous avons, par exemple, été les premiers dans le secteur à utiliser une moissonneuse-batteuse équipée d’un capteur de rendement. Nous avons également eu rapidement un pulvérisateur et un épandeur d’engrais dotés de la coupure de sections, souligne Franck Gaury, céréalier à Ferrières-en-Gâtinais (Loiret) et trésorier de la Cuma du Soleil. Créée en 1984, cette coopérative fonctionne en revanche depuis toujours sans tracteur ni salarié. » L’agriculteur, qui exploite 200 hectares, a repris la ferme de ses beaux-parents en 1997 et a rejoint la coopérative d’utilisation de matériels en 2000. « Ayant été salarié durant dix ans et habitué à côtoyer du monde, je ne me voyais pas travailler seul. Dès mon installation, j’ai d’ailleurs rapidement rejoint le GDA local. »

Alors que des agriculteurs intègrent une Cuma pour du matériel tracté, Franck Gaury a d’abord fait le choix du collectif pour les deux plus grosses machines : la moissonneuse-batteuse et le pulvérisateur automoteur. Son adhésion en 2000 avait permis de créer un troisième groupe de récolte. « C’était pour moi l’opportunité d’accéder à une machine confortable et capable de moissonner plus de 30 hectares par jour, contre 12 avec ma vieille Massey Ferguson. » Depuis, les fermes se sont restructurées avec les départs en retraite et des adhérents ont préféré quitter la Cuma du soleil pour investir en copropriété dans une moissonneuse-batteuse. « Notre politique de changer tous les 3 à 4 ans a été jugée trop onéreuse par certains agriculteurs. Certes, il serait possible de garder la moissonneuse-batteuse durant ses neuf ans d’amortissement, mais cela expose en contrepartie à travailler à la fin avec une machine vieillissante susceptible d’engendrer de gros frais d’entretien.

 

 
Coûts de mécanisation : « La Cuma pour le collectif et l’accès à des matériels performants »

 

Le rythme de renouvellement actuel permet de bénéficier de modèles performants à la pointe de la technologie et de réduire les risques de panne. « Les chiffres parlent d’ailleurs en la faveur de cette approche, puisque nous avons longtemps récolté les céréales et le colza pour 50 euros HT par hectare, hors carburant et main-d’œuvre, explique Franck Gaury. Les prix des machines évoluant, le tarif est passé ces dernières années à 65 euros. » Le trésorier craint toutefois que le coût d’utilisation augmente en raison de la forte hausse du prix du matériel.

Une moissonneuse pour trois adhérents

Aujourd’hui, la Cuma ne compte plus qu’une seule moissonneuse-batteuse, qui vient d’être renouvelée pour la saison 2022. « Nous venons de terminer notre première campagne avec la Claas Lexion 7400 équipée d’une coupe de 9,30 mètres, la plus large jamais utilisée. Elle est partagée entre trois exploitations récoltant 110, 200 et 400 hectares. » Pour des raisons d’équité, les trois adhérents s’entendent sur le planning en considérant la maturité des cultures, tout en prenant soin d’avancer à la même allure dans leur récolte.

 

 
Renouvelée en 2022, la moissonneuse-batteuse de la Cuma du Soleil est utilisée par trois adhérents qui se sont engagés sur une surface de récolte de 710 hectares.
Renouvelée en 2022, la moissonneuse-batteuse de la Cuma du Soleil est utilisée par trois adhérents qui se sont engagés sur une surface de récolte de 710 hectares. © F. Gaury
« Pas question qu’un de nous batte tout chez lui avant de libérer la machine. » Les agriculteurs s’entraident pour la conduite de la machine et le transport du grain et se remplacent lors des repas, afin que chacun rentre déjeuner ou dîner. Ils assurent également la récolte chez leur collègue quand celui-ci est occupé à l’irrigation. Franck Gaury souligne que, grâce à la Cuma, il accède à une machine de grande capacité qu’il ne pourrait pas acquérir seul. « Il faut juste faire preuve de patience et accepter qu’elle ne soit pas tous les jours chez moi durant la récolte. »

 

Pour les traitements, le pulvérisateur automoteur Artec F40, renouvelé en mai 2022, est équipé d’une rampe de 36 mètres. Jusque-là, quatre adhérents étaient engagés sur cette activité et totalisaient 900 hectares, soit environ 4 500 hectares en développé. L’appareil coûtait entre 5 et 6 euros par hectare, hors main-d’œuvre et carburant. Comme un agriculteur s’est récemment retiré, le tarif devra désormais être établi sur la base de 700 hectares et va inévitablement augmenter. Si pour la moissonneuse-batteuse les agriculteurs s’entraident, pour la pulvérisation chacun intervient sur son exploitation. « Nous avons un groupe WhatsApp dédié, dans lequel nous échangeons sur les traitements à venir. Ceci nous permet de regrouper les interventions par type : fongicide, insecticide, herbicide… »

Pour des raisons d’efficacité, l’automoteur n’est pas stocké à un endroit précis et passe d’un utilisateur à l’autre. Cette organisation évite les kilomètres inutiles parfois réalisés pour ramener l’appareil chez son responsable ou au hangar de la Cuma. « Si les agriculteurs partagent facilement les moissonneuses-batteuses avec d’autres exploitants, nombreux sont frileux à l’idée d’utiliser le pulvérisateur en commun. Pour ma part, depuis vingt et un ans que je travaille avec celui de la Cuma, je n’ai jamais rencontré de souci. »

La Cuma du Soleil est bien gérée et bénéficie d’une bonne trésorerie. Cette situation lui permet de n’émettre que deux factures par an, après que les travaux aient été réalisés. L’envoi a lieu en fin d’année, avec deux échéances pour le règlement : 31 décembre et 28 février. Pour garantir la santé financière et respecter les tarifs objectifs, le conseil d’administration peut être amené à demander le paiement des engagements non respectés. Il lui arrive parfois de faire un rappel sur le montant facturé initialement pour certains matériels, en raison de frais d’entretien élevés rencontrés l’année suivante, comme cela a été le cas avec la tractopelle.

« Nous préférons généralement pratiquer un tarif moyen plutôt que de l’indexer au volume d’activité à chaque exercice. Ceci évite les trop grands écarts de prix d’une année sur l’autre, notamment pour les matériels susceptibles de nécessiter de gros frais d’entretien. Cela permet de faire des provisions pour subvenir à d’éventuelles charges de maintenance imprévues. » Le conseil d’administration est par ailleurs attentif à ce qu’un agriculteur, qui ne s’engage pas lors de l’acquisition d’un matériel neuf, éprouve un intérêt soudain lorsque l’amortissement est terminé et que le coût d’utilisation a baissé. Il peut alors lui être demandé un droit d’entrée.

en chiffres

La Cuma du soleil

38 ans (création en mars 1984)

26 adhérents

34 matériels

200 000 euros de chiffre d’affaires

La capacité à s’adapter aux évolutions culturales

« La force du collectif est de pouvoir adapter le parc de matériels aux évolutions des pratiques culturales. Nous venons ainsi de nous séparer de deux de nos trois monograines classiques. À la place, un premier groupe d’adhérents s’est engagé dans un semoir Amazone Precea capable de travailler en 6 rangs à 80 cm et en 7 rangs à 50 cm », précise Franck Gaury, trésorier de la Cuma du Soleil (Loiret). Cet appareil porté à châssis télescopique se veut polyvalent et répond notamment au souhait de certains agriculteurs de retenir le même interrang de 50 cm pour toutes leurs cultures en ligne. Le second groupe d’adhérents s’oriente vers le strip-till, avec l’acquisition d’un strip-tiller Duro France et d’un semoir monograine Tempo de Väderstad. « Cet achat en Cuma permet ainsi d’accéder à du matériel performant, dont le coût élevé (180 000 euros HT pour l’ensemble) s’amortit plus facilement sur plusieurs exploitations. »

Un coût forfaitaire annuel pour certains matériels

 

 
Franck Gaury, céréalier dans le Loiret, reconnaît que la Cuma lui permet d’accéder à un large panel de matériels, tout en limitant les charges de mécanisation sur son exploitation.
Franck Gaury, céréalier dans le Loiret, reconnaît que la Cuma lui permet d’accéder à un large panel de matériels, tout en limitant les charges de mécanisation sur son exploitation. © D. Laisney
Franck Gaury apprécie la coopérative d’utilisation de matériels pour sa capacité à investir dans des matériels aux besoins ponctuels et parfois difficiles à justifier économiquement en individuel. Par exemple, la Cuma du Soleil dispose d’une tractopelle, d’une minipelle et d’un gros compresseur de chantier. Elle compte également un chariot pour manipuler les roues agricoles, un groupe électrogène et un ventilateur pour les tas de grain, ainsi qu’un aspirateur industriel pour nettoyer les cellules et les aires de stockage de céréales. « Nous possédons aussi un quad qui est équipé d’un épandeur Spando, un appareil particulièrement précis qu’il n’est pas possible de rentabiliser dans toutes les exploitations au regard des faibles surfaces travaillées. L’ensemble est facturé 2 euros du kilomètre », indique-t-il. Certains de ces équipements font l’objet d’une facturation forfaitaire annuelle, qu’ils soient utilisés ou non par l’adhérent. L’aspirateur acheté 2 000 euros coûte 50 euros par an. Le tarif de la remorque pose-à-terre s’élevait à 40 euros par an, durant la période d’amortissement, et a ensuite été abaissé à 15 euros par an.

 

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