Plants fruitiers : ce qui a changé avec les modifications réglementaires de 2017
Depuis 2017, plusieurs modifications réglementaires sont intervenues pour la circulation des arbres fruitiers dans l’Union européenne. Pour les arboriculteurs, l’harmonisation européenne garantit une sécurité sanitaire et une traçabilité variétale des plants.
Depuis 2017, plusieurs modifications réglementaires sont intervenues pour la circulation des arbres fruitiers dans l’Union européenne. Pour les arboriculteurs, l’harmonisation européenne garantit une sécurité sanitaire et une traçabilité variétale des plants.
Depuis 2017, tous les plants fruitiers commercialisés dans l’Union européenne sont soumis à une même réglementation. « Il y a eu une volonté de l’Union d’harmoniser la qualité du matériel végétal qui circule sur le territoire et de fiabiliser les informations données à l’acheteur », précise Carole Dirwimmer du Geves. Une évolution a été la mise en application du Règlement de santé des végétaux 2016/2031 et du Règlement délégué 2019/829, qui précise les conditions de dérogation au Règlement de santé des végétaux. Applicable à toutes les espèces fruitières depuis le 14 décembre 2019, le Règlement de santé des végétaux définit le cadre de la circulation des végétaux au sein de l’Union européenne et notamment la gestion des organismes nuisibles, dans le but d’éviter l’introduction dans l’UE et la diffusion d’organismes nuisibles aux végétaux.
Ceux-ci sont désormais classés en Organismes de quarantaine, prioritaires ou de zone protégée, et en Organismes réglementés non de quarantaine. Cette disposition définit aussi de nouvelles règles pour le passeport phytosanitaire qui garantit que les végétaux sont exempts d’organismes nuisibles de quarantaine et satisfont aux dispositions sur les organismes réglementés non de quarantaine. Le contenu et le format du passeport phytosanitaire sont désormais harmonisés au niveau européen.
Tout plant fruitier qui circule dans l’Union européenne doit être accompagné d’un passeport phytosanitaire apposé sur l’unité commerciale des végétaux, l’emballage, la botte ou le conteneur. Ce passeport précise le nom botanique du plant, son pays d’origine, le numéro d’enregistrement du pépiniériste et un code de traçabilité. Il est apposé sous la responsabilité du pépiniériste autorisé à délivrer des passeports phytosanitaires par les autorités compétentes (SRAL ou CTIFL). Le pépiniériste doit mettre en place des autocontrôles avant un contrôle de second niveau en France par le SRAL et/ou le CTIFL.
Des plants certifiés
Une autre évolution depuis 2017 est la Directive sur la commercialisation des plants fruitiers qui établit des règles communes sur la qualité des plants, l’enregistrement des fournisseurs et des variétés, ainsi que l’étiquetage des plants. Tous les plants qui circulent dans l’UE doivent avoir une garantie de l’authenticité variétale et de leur état sanitaire. Deux niveaux sont possibles : CAC (Conformité agricole communautaire) et Certification UE. « Certains États membres avaient déjà un système de contrôle par un organisme dédié, mais les exigences pouvaient être un peu différentes selon les états, analyse Carole Dirwimmer. Aujourd’hui la certification officielle des plants est harmonisée dans toute l’Union européenne. »
En complément, certains États membres proposent un niveau de certification supérieur à la certification européenne. La France, qui avait depuis 1952 des exigences plus élevées que la certification UE, a pérennisé cette certification par un cahier des charges privé: la certification Infel®. Les plants commercialisés doivent aussi avoir une étiquette ou un document accompagnant qui porte le nom de la variété, enregistrée dans une base dédiée. Les plants CAC peuvent être issus d’une variété enregistrée sur un registre national comme le répertoire du Geves avec une description simplifiée. Les plants certifiés doivent appartenir à une variété soit protégée par un certificat d’obtention végétale (COV), soit inscrite au catalogue national d’un État membre, soit avoir une DOR (description officiellement reconnue) si elle a été commercialisée avant le 30 septembre 2012.
Issus de variétés enregistrées
La protection intellectuelle des variétés via un COV est une démarche volontaire qui implique une description officielle basée sur un examen technique. « Il protège le créateur d’une variété nouvelle de la contrefaçon et lui permet de faire valoir ses droits », précise Carole Dirwimmer. L’inscription à un catalogue national protège l’utilisateur de la variété en rendant officielles sa description et sa dénomination. En France, la description est basée sur un examen technique pour les variétés récentes, et sur un dossier pour les variétés anciennes.
Une variété uniquement enregistrée au répertoire Geves, sur la base d’un dossier avec un enregistrement sommaire de ses caractéristiques, ne peut être commercialisée qu’en France. « Mais toutes les variétés commercialisées dans l’Union européenne doivent être enregistrées », insiste Carole Dirwimmer. Des exemptions à l’enregistrement des variétés sont toutefois possibles si le matériel est destiné à des essais, des travaux de sélection ou pour la préservation de la diversité génétique, dans la limite de 2000 plants par an, par variété et par acteur.
Carole Dirwimmer Geves
Faciliter l’enregistrement des variétés anciennes
« Avant 2017, beaucoup de variétés circulaient sans description, rappelle Carole Dirwimmer. Un axe au niveau français, pour mieux informer le consommateur en enregistrant le maximum de variétés, a été de proposer des démarches simplifiées pour les variétés anciennes ou commercialisées uniquement en France. » Les variétés déjà commercialisées avant le 30 septembre 2012 peuvent être inscrites sur la liste 2 du Catalogue officiel français, sur la base d’un dossier comprenant la dénomination et ses synonymes, le mainteneur du matériel, une preuve d’existence avant le 30 septembre 2012, une description et des photos. L’examen est réalisé par le Geves et si besoin par des experts de la filière.
« Cette inscription donne une existence officielle à la variété avec publication au Journal Officiel et la possibilité d’une commercialisation dans l’Union européenne et d’une certification du matériel. Dans un souci d’accompagnement de la filière et de progressivité, le coût de la démarche est pris en charge par le ministère de l’Agriculture jusqu’à fin 2024. » Une démarche simplifiée d’enregistrement sur le répertoire Geves est également possible pour les variétés commercialisées uniquement en France et sans possibilité de certification. Là encore, le coût de la démarche est pris en charge par le ministère de l’Agriculture jusqu’à fin 2024.
Une solution pour les plants bio
Depuis le 1er janvier 2022, selon le règlement bio européen, les plants d’arbres fruitiers utilisés en agriculture biologique doivent être bios. Des demandes de dérogation sont possibles jusqu’en 2036, uniquement en cas de manquement d’offre. La directive de commercialisation des plants fruitiers exige que les plantes mères initiales des plants certifiés soient indemnes d’organismes nuisibles réglementés, ce qui implique de les produire en pots sous abri avec filet insect-proof. Or, le règlement bio européen exigeait que toute plante soit produite en sol. Le problème a été remonté et, depuis 2022, une annexe au règlement bio précise que les plantes mères initiales des plants fruitiers bios certifiés UE peuvent être produits en pots.
« Des marges sont possibles dans l’application des directives »
Une latitude aux États membres
Le règlement européen a entraîné certaines modifications. La sharka, qui ne peut être éradiquée, n’est plus organisme de quarantaine, mais organisme réglementé non de quarantaine. Et si, dans la certification Infel®, porte-greffes et greffons sont produits en France, ils peuvent provenir d’un autre État membre pour la certification UE. « Le matériel UE est contrôlé en pépinière, mais pour les maladies non symptomatiques et la description de variétés inconnues du CTIFL, des analyses ne se font qu’en cas de doute. » Des marges existent aussi dans l’application de la réglementation.
« Les directives doivent être transposées en droit national, ce qui laisse une certaine latitude aux États membres », note Silvia Ten Have-Lopez. « La réglementation européenne donne accès aux arboriculteurs à de nouvelles origines de plants, avec un minimum de sécurité, estime David Ray, directeur de CEP Innovation. Mais la catégorie CAC et la certification UE ne sont pas du même niveau que la certification française préexistante. D’un contrôle indépendant sur le terrain par un organisme externe, on passe aux autocontrôles et au contrôle documentaire. Et l’application de la réglementation n’est pas forcément la même partout, notamment pour les Organismes réglementés non de quarantaine. »