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« J’ai grandi entre les colis de fruits et les vergers du Tarn-et-Garonne » Olivier Lemouzy, expéditeur ancré dans son territoire agricole

FLD poursuit ses portraits d’expéditeur exportateur de fruits et légumes afin de faire découvrir ce métier souvent mal connu. Aujourd’hui, échange avec Olivier Lemouzy, expéditeur enjoué attaché à son terroir. Il nous raconte l’histoire de sa famille depuis son arrière-grand-père, l’évolution du métier, la transmission, l’avenir du métier selon lui.

Olivier Lemouzy tenant une cagette de légumes, avec un arrière fond des palettes de fraises et des palettes de salades
Olivier Lemouzy, directeur de Lemouzy SAS : « C’est valorisant de travailler dans nos métiers des fruits et légumes. Ils sont ancrés au sol, au vivant, ils donnent du sens à nos vies. On aime vraiment ce qu’on fait.»
© Lemouzy

Dans la famille d’Olivier Lemouzy, on est expéditeur dans le Tarn-et-Garonne de père en fils depuis 4 générations. Celui qui dirige l’entreprise d’expédition familiale Lemouzy SAS, avec son frère Mathieu, raconte lors d’une interview à FLD le 12 février les évolutions du métier, de l’entreprise, ses fiertés et les difficultés. Et en revient toujours au terroir et au territoire.

Alors que l’Aneefel, l’Association nationale des expéditeurs exportateurs de fruits et légumes, tiendra son assemblée générale les 20 et 21 mars prochainsFLD a pu échanger avec 6 expéditeurs exportateurs de fruits et légumes sur l’évolution de leur métier, les contraintes et les enjeux. Quel sera le métier d’expéditeur exportateur demain ? Chacun-e, avec son histoire, son profil et sa vision bien à lui/elle, s’est prêté au jeu des questions-réponses. Plongée dans ce métier encore mal connu avec ces 6 interviews dont la parution s’étalera sur les prochaines semaines sur le site Internet de FLD

Lire aussi : Léa Gérin : « Être expéditrice de fruits et légumes c’est aussi être toujours concentrée sur ce qui se passe en production et en consommation » 

Lire aussi : « Les expéditeurs ont aussi un rôle de régulateur : le prix le plus juste pour tout le monde » Philippe Dupont, expéditeur exportateur d'endives dans les Hauts-de-France 

Lire aussi : « En saison, c’est toujours l’urgence. En cerise il faut aller vite » Mathilde Chambe, expéditrice dans les Monts du Lyonnais

Lire aussi : « Des marchés se ferment mais d’autres restent à ouvrir » Christophe Artero, exportateur de fruits et légumes sur les marchés lointains

 

FLD : Quel est le cœur de métier de votre entreprise, Lemouzy SAS ?

Olivier Lemouzy : Lemouzy SAS, fondée en 1935 dans le Tarn-et-Garonne à Castelsarrasin, est une entreprise familiale d’expédition de fruits d’été (fraise, cerise, fruits à noyau, puis raisin et un peu de pommes, poires et kiwis) et depuis les années 2000 également de légumes du Lot-et-Garonne (une activité que nous avons développé afin de garantir un meilleur équilibre économique à l’entreprise face à une activité qui était trop saisonnière). Nos débouchés : essentiellement les grossistes sur le marché français, un peu la GMS avec des volumes en hausse petit à petit.

« Notre terroir est historiquement le Tarn-et-Garonne pour les fruits d’été et depuis 20 ans aussi le Lot-et-Garonne avec des légumes, afin de garantir un meilleur équilibre économique à l’entreprise »

Nous sommes une entreprise familiale, la 4e génération aujourd’hui puisque je suis associé avec mon frère Mathieu. Nous sommes ancrés dans notre territoire qu’est historiquement le Tarn-et-Garonne, tel un producteur est enraciné dans son verger. Et depuis une vingtaine d’années nous sommes également en Lot-et-Garonne par le rachat d’une entreprise sur le Min d’Agen à Boé.

Oui, les entreprises d’expédition de fruits et légumes sont très souvent des entreprises familiales de différentes tailles et implantées dans leur territoire

« Les entreprises d’expédition de fruits et légumes sont très souvent des entreprises familiales de différentes tailles et implantées dans leur territoire »

 

FLD : Qui est Olivier Lemouzy ?

Olivier Lemouzy : Je suis arrière-petit-fils, petit-fils et fils d’expéditeur. J’ai grandi entre les colis de fruits dans l’entrepôt et les vergers, puisque les deux premières générations de la famille étaient aussi des producteurs.

Mon schéma professionnel s’est dessiné au fur et à mesure de mes études : j’ai fait une école de commerce puis l’Isema à Avignon pour me spécialiser sur les fruits et légumes. J’ai ensuite rejoint l’entreprise familiale, que je n’ai jamais vraiment quitté puisque j’y ai été saisonnier, puis alternant. Mon arrivée a coïncidé avec le déménagement de l’entreprise dans un nouveau bâtiment et le déploiement dans le Lot-et-Garonne.

 

FLD : Comment expliqueriez-vous le métier d’expéditeur en fruits et légumes à quelqu’un qui n’est pas du tout du secteur ?

Olivier Lemouzy : Une entreprise d’expédition est une entreprise sur un territoire agricole -c’est important, il y a un attachement à la région- et qui a pour rôle de commercialiser les fruits et légumes qui poussent autour de chez elle

Commercialiser cela veut dire être en capacité de réceptionner les volumes, de stocker, de conditionner, d’apporter un critère qualité et une traçabilité en termes sanitaire.

« Un expéditeur est ancré sur un territoire agricole et a pour rôle de commercialiser les fruits et légumes qui poussent à côté de chez lui »

 

FLD : De vos souvenirs d’enfance et depuis vos 22 ans dans l’entreprise, quelles évolutions du métier d’expéditeur avez-vous constaté ?

Olivier Lemouzy : A l’époque, le commerce se déplaçait sur les lieux de production. Mon grand-père  vendait des fruits d’été de Moissac l’été et se rendait dans les Pyrénées l’hiver pour vendre artichauts et salades. Les boutiques nomades sont ensuite devenues sédentaires. Les outils de communication ont évolué. Aujourd’hui avec un téléphone portable, on peut échanger avec nos clients à l’autre bout de la France. La rencontre physique avec la production qui se fait moins, car il n’y a plus de carreaux de producteurs dont on a vu la fin dans les années 90-2000. 

Mais le téléphone portable ne fait pas tout. Les fruits et légumes restent un marché d’offre et de demande et de rencontres. Sur les marchés de gré à gré, on pouvait sentir le marché et échanger avec l’ensemble des producteurs, même ceux chez qui on ne se fournissait pas. Aujourd’hui, il faut appeler, surveiller la météo… Je vais dans les vergers de mes fournisseurs mais pas assez à mon goût, car je travaille avec une grosse centaine de producteurs. Oui, il y a une frustration. Pour compenser, des filières se réorganisent autour des produits. 

 

FLD : A quelles difficultés faites-vous face chaque jour dans votre métier d’expéditeur en fruits et légumes ?

Olivier Lemouzy : Premièrement : la pérennité de nos producteurs nous inquiète. Ils font face à une problématique de renouvellement des générations. Il y a des endroits où ça replante, d’autres non. C’est à suivre. Et les producteurs passent de la petite exploitation à une structure de plus en plus organisée sur ses volumes  et sa capacité de stocker. Le producteur évolue sur le commercial pour mieux valoriser sa marchandise.

Deuxième difficulté : le transport. Les petits transporteurs disparaissent face à de gros mastodontes. Les solutions logistiques se réduisent et leurs prix augmentent.

Troisième difficulté : les taxes. Les entreprises d’expédition sont lourdement exposées à la fiscalité des entreprises et foncière.

 

FLD : A l’inverse, avez-vous observé des améliorations dans ce métier ?

Olivier Lemouzy : On a vu une amélioration de la pénibilité du travail grâce aux évolutions technologiques. Les machines permettent aussi un travail plus abouti avec un respect de notre produit qui est fragile.

L’essor des réseaux sociaux nous aide aussi. C’est une bonne solution pour recruter : les jeunes viennent travailler chez nous l’été, ils s’y plaisent, ils en parlent sur leurs réseaux. Dans l’entreprise, nous nous sommes moins de 10 salariés et l’été nous montons à 15. 

« Evolution technologique et réseaux sociaux ont facilité notre travail et réduit la pénibilité »

 

FLD : Quelle est votre plus grande fierté dans ce métier ?

Olivier Lemouzy : C’est valorisant de travailler dans nos métiers des fruits et légumes. Ils sont ancrés au sol, au vivant, ils donnent du sens à nos vies. On aime vraiment ce qu’on fait. Vivre de mon travail est une fierté.

Autre source de fierté : nous avons réussi à passer le cap de la transmission générationnelle qui n’est jamais simple. Aujourd’hui je travaille avec mon frère et c’est facile.

La transmission, oui, on y pense, on en parle. Le plus tôt le mieux. Mais sans mettre de pression sur un enfant qui est trop jeune pour comprendre (j’ai moi-même des enfants). Moi, mon père en aucun cas ne m’a obligé à reprendre. L’envie est venue de moi. 

« La transmission, il faut en parler, le plus tôt possible. Mais sans mettre de pression sur les enfants »

 

FLD : Selon vous, quel est l’avenir du métier ?

Olivier Lemouzy : C’est un métier qui sera toujours utile pour la filière des fruits et légumes.

Dans le futur, un expéditeur devra toujours rester dans le territoire au plus près de ses producteurs pour rester cette proposition sur les marchés nationaux et internationaux. C’est d’une importance capitale puisqu’on parle d’alimentation des populations mais aussi de survie économique des territoires

« Expéditeur c’est un métier qui sera toujours utile pour la filière et d’importance capitale puisqu’on parle d’alimentation des populations et de survie économique des territoires »

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