Changement climatique : quand des agrumes remplacent des tomates sous les serres
La culture d’agrumes sous abri se développe dans le Sud-Est, souvent pratiquée par des maraîchers en quête de diversification. Un projet en cours vise à mieux connaître les conditions optimales de l’agrumiculture sous abri.
La culture d’agrumes sous abri se développe dans le Sud-Est, souvent pratiquée par des maraîchers en quête de diversification. Un projet en cours vise à mieux connaître les conditions optimales de l’agrumiculture sous abri.
Commercialisation en vente directe
Trois producteurs du réseau des Ceta maraîchers des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse sont suivis dans le cadre du projet, sur un total de sept producteurs qui se sont déjà lancés dans l’agrumiculture. Les trois producteurs suivis cultivent depuis cinq ans des agrumes classiques (orange, citron, mandarine), avec également pour l’un des trois des espèces plus originales : main de Bouddha, yuzu, combava, citron caviar… Les agrumes sont cultivés dans des serres multichapelles sur 1 à 1,5 ha. Chez l’un des trois producteurs, une partie de la serre est toujours cultivée avec des espèces maraîchères. Les agrumes sont commercialisés en vente directe. « Un producteur du réseau, non suivi dans le cadre du projet Dacappo, commercialise aussi sa production auprès de confiseurs et de restaurants, car les agrumes « festifs » se vendent moins bien en direct », ajoute Mila Matagne--Monnier.
Différents ravageurs des agrumes ont été identifiés dans les exploitations suivies (voir encadré). Les plus préoccupants sont la mineuse des agrumes (Phyllocnistis citrella) et la cochenille australienne (lcerya purchasi). Le pou rouge de Californie (Aonidiella aurantii) et le pou des Hespérides (Coccus hesperidum) sont aussi des ravageurs préoccupants observés dans un seul verger pour l’instant. Les pucerons et acariens ont été à l’origine de dégâts importants dans les serres suivies. Ils sont facilement régulés par des traitements et des lâchers d’auxiliaires. Depuis l’automne 2022, on note aussi l’apparition de la mouche du fruit (Ceratitis capitata). La conduite culturale a une importance capitale dans la régulation de ces bioagresseurs. Des excès d’azote et l’absence de taille peuvent favoriser la croissance de ces populations.
Limiter la croissance des arbres
« Les agrumes supportent mal les sols calcaires et les sols très argileux, qui risquent de provoquer de l’asphyxie racinaire, présente Mila Matagne--Monnier. Le système racinaire des agrumes se développe principalement dans les premiers centimètres du sol. Il faut donc s’assurer que ces arbres ne subissent pas de carences en nutriment, en particulier en fer, qui est essentiel à leur croissance. » Les acteurs du projet Dacappo recommandent ainsi que le point de greffe soit au minimum à une dizaine de centimètres au-dessus du sol pour limiter les risques de pourriture du tronc. Les plants ne doivent donc pas être enterrés trop profondément et il faut s’assurer que le sol soit correctement drainé pour limiter l’accumulation d’humidité.
Le choix des plants est primordial. Le porte-greffe est choisi généralement pour sa tolérance au calcaire mais doit aussi permettre de limiter la croissance trop importante des arbres sous les abris. De plus, il dépend de l’espèce d’agrume cultivée. « La taille permet de faciliter la récolte et d’aérer les branches pour qu’elles puissent toutes avoir un accès optimal à la lumière, explique l’expérimentatrice. Selon la hauteur de l’abri, la taille de l’apex devra être plus ou moins précoce, pour éviter que les arbres n’endommagent la structure. » La taille doit être réalisée 1 à 3 fois par an selon les besoins, « en maintenant une forme de godet ». Les gourmands et les branches sèches ou cassées doivent être retirés, ainsi que certaines branches sur les charpentières trop chargées pour permettre la pénétration de lumière dans toutes les parties de l’arbre.
Attention à la période hivernale
L’hiver est une période critique pour les agrumes, qui sont très sensibles au gel, surtout les citronniers et les mandariniers. Les dégâts de gel sont observés sur les greffons à partir de -1 °C. De plus, les températures hivernales accentuent les carences au niveau du feuillage. La culture sous abri est un bon moyen de limiter les dégâts, mais des protections thermiques adaptées sont quand même nécessaires les jours les plus froids. En l’absence de protection, les arbres les plus jeunes et les rameaux de l’année précédente peuvent succomber au froid et le verger entier peut en pâtir. Les serres les plus hautes sont les plus bénéfiques car elles conservent mieux la chaleur et permettent d’avoir des arbres plus hauts.
De plus, un repos végétatif durant la période de froid permet d’éviter les risques de gel des bourgeons floraux ou des jeunes rameaux encore trop faibles. Cette limitation de la croissance végétative peut être obtenue en provoquant un stress hydrique par une réduction de l’irrigation. « L’irrigation normale peut reprendre à partir de fin janvier mi-février pour induire la floraison », indique Mila Matagne--Monnier.