Légumes : des bandes fleuries pour se protéger du thrips
Le Ctifl de Carquefou, la Fredon Nord Pas-de-Calais et LCA ont testé l'attractivité de différentes espèces végétales vis-à-vis du thrips et de ses ennemis naturels. Certaines espèces peuvent être testées pour attirer les ennemis du thrips. D'autres, très attractives pour le thrips, sont à éviter.
Le Ctifl de Carquefou, la Fredon Nord Pas-de-Calais et LCA ont testé l'attractivité de différentes espèces végétales vis-à-vis du thrips et de ses ennemis naturels. Certaines espèces peuvent être testées pour attirer les ennemis du thrips. D'autres, très attractives pour le thrips, sont à éviter.
Le thrips provoque de graves dommages en culture de poireau et peut avoir des impacts économiques très importants sur la production. Pour favoriser la régulation naturelle de ses populations dans les cultures, des plantes susceptibles d'attirer ses prédateurs pourraient être implantées au bord des parcelles. Dans cette optique, le Ctifl de Carquefou, la Fredon Nord Pas-de-Calais et LCA ont testé l'attractivité de différentes espèces végétales vis-à-vis de Thrips tabaci et de ses principaux ennemis naturels. « L'idée, précise Sébastien Picault, du Ctifl de Carquefou, est d'attirer les prédateurs du thrips de façon précoce et d'amplifier leurs populations en leur proposant des ressources nutritives issues des plantes elles-mêmes, comme le pollen ou le nectar, ou liées par exemple aux pucerons hébergés par ces plantes ».
Plusieurs espèces (achillée millefeuille, chrysanthème, tanaisie, tagète, vesce, féverole, mélilot, coriandre, ammi élevé, poireau en fleurs, millepertuis et mélanges fleuris du commerce) ont été testées pour leur attractivité vis-à-vis du thrips et de ses principaux prédateurs (Anthocoriadae du genre Orius, Syrphidae de la sous-famille des Syrphinae, Chrysopidae, Nabidae, Coccinellidae et Aeolothrips intermedius). Les plantes ont été testées en bandes fleuries en bordure de parcelle. La densité d'activité des insectes a été mesurée par comptage des individus sur les plantes (filets-fauchoirs, bols jaunes, caméras). Une analyse du contenu digestif des insectes a également été réalisée par analyse moléculaire pour savoir de quelles espèces ils s'étaient nourris.
Les bandes fleuries peuvent être installées sur les deux longueurs de la parcelle, en bandes de quatre mètres de large. « Et une bande tous les 300 mètres suffit », estime Sébastien Picault. En cas d’association de plusieurs espèces, le mieux est sans doute d’associer des patchs de six mètres de long de chaque espèce. L’implantation doit se faire sur un sol meuble, bien préparé et propre (faux-semis, désinfection vapeur, solarisation, désherbage...) et il est recommandé de l’arroser.
Plusieurs espèces attractives pour les ennemis du thrips
Les essais ont montré que plusieurs espèces attirent des ennemis naturels du thrips, notamment Aelothrips intermedius, son principal prédateur. Mais certaines attirent également le thrips. « Or, quand une espèce attire de façon égale le thrips et ses prédateurs, cela est dans tous les cas favorable au thrips qui a des capacités de reproduction supérieures à celles de ses prédateurs, souligne Sébastien Picault. Il faut donc être très vigilant dans le choix des espèces à implanter dans une bande fleurie ». L'achillée millefeuille, le chrysanthème et l'ammi élevé attirent, de façon variable, les ennemis naturels du thrips mais sont aussi très attractives pour le thrips. « Ces espèces sont donc à éviter dans une bande fleurie », insiste l'expérimentateur. L'analyse du contenu digestif des insectes montre aussi que des espèces présentes dans l'environnement comme le charme, les lauriers, le lierre, les Astéracées (grandes marguerites) sont très attractives pour le thrips et sont donc à éviter près des parcelles de poireau. Le mélilot et le tagète attirent certains prédateurs du thrips, notamment Aelothrips intermedius, mais sont aussi attractifs pour le thrips, de façon moindre toutefois. « Un équilibre peut donc se créer avec ces espèces ».
Les Chénopodiacées et les Amaranthacées n'attirent pas le thrips et attirent certains de ses ennemis naturels. Le chénopode blanc est ainsi très attractif pour les syrphes. « Mais la difficulté est que ces espèces sont en général des adventices et qu'elles peuvent poser des problèmes d'enherbement », note Sébastien Picault. Les mélanges fleuris du commerce, notamment le mélange PBI de la société Novaflore, attirent tous les ennemis naturels du thrips, en particulier les syrphes, mais pas le thrips. La féverole et la vesce n'attirent pas les thrips mais sont très attractives pour les syrphes, coccinelles et chrysopes, sans doute parce qu'elles hébergent des pucerons. Enfin, la tanaisie n'attire pas le thrips et est très attractive pour les Orius. « La tanaisie, qui a priori ne pose pas de problème d'enherbement, est sans doute une plante clé », estime Sébastien Picault.
Tester des espèces qui n'attirent pas le thrips
Des essais de bande fleurie peuvent donc être faits en production pour tester leur intérêt dans la protection contre le thrips. « On peut sans risque tester un mélange de tanaisie, mélange fleuri type PBI de Novaflore plus du chénopode et de l'amaranthe si l'on n'a pas de problème d'enherbement par ces espèces, indique Sébastien Picault. Avec un peu plus de risque, on peut y ajouter du mélilot. Et il est sans doute intéressant d'y ajouter des plantes banques comme la vesce ou la féverole qui hébergent des pucerons et pourront ainsi nourrir les larves des ennemis naturels du thrips ».
Des résultats plus complets de ces essais seront présentés dans le numéro de septembre-octobre d'Infos Ctifl.