La réglementation pousse le biocontrôle
Depuis 2008, les différents plans Ecophyto en ont fait un des leviers principaux pour réduire l’utilisation des pesticides de synthèse. Le biocontrôle a profité de ce tapis rouge réglementaire pour se déployer et prendre de plus en plus de place dans le marché de la protection des cultures.
Depuis 2008, les différents plans Ecophyto en ont fait un des leviers principaux pour réduire l’utilisation des pesticides de synthèse. Le biocontrôle a profité de ce tapis rouge réglementaire pour se déployer et prendre de plus en plus de place dans le marché de la protection des cultures.
La Loi Agriculture et Alimentation du 30 octobre 2018, dite « Egalim », ajoute une nouvelle pierre à l’édifice, en favorisant les produits de biocontrôle par rapport aux autres produits phytosanitaires. Ainsi, certaines pratiques commerciales lors de la vente de PPP (comme les remises, rabais, ristournes) sont aujourd’hui interdites. Mais cette mesure ne concerne ni les produits de biocontrôle, ni les substances de base, ni les produits à faible risque. Surtout, la Loi Egalim contient un plan d’action qui prévoit la réduction des délais d’évaluation et la simplification des conditions d’autorisation des produits de biocontrôle et des produits à usage biostimulant, tout en veillant à alléger les démarches administratives pour les entreprises concernées. « Ce plan vise aussi à prendre en compte les expérimentations locales mises en œuvre par les agriculteurs et à les diffuser », a précisé Xavier Langlet, référent AB et biocontrôle au ministère de l’Agriculture, lors d’une réunion technique en novembre organisée par la Chambre d’agriculture de Lot-et-Garonne. Le plan s’accompagne d’une stratégie de déploiement du biocontrôle autour de quatre axes : la recherche et l’innovation, la simplification de la réglementation, l’information et la formation, et la promotion au niveau de l’Union européenne. De plus, il est prévu de mieux tester et appréhender les facteurs de réussite et d’échec liés à l’utilisation des produits de biocontrôle, et constituer des vitrines de démonstration pouvant faciliter leur essor. Le ministère de l’Agriculture a annoncé début janvier qu’une consultation publique sur cette stratégie serait prochainement lancée. L’axe Recherche et innovation de la stratégie bénéficiera, grâce au Pacte productif, d’un accompagnement fléché, a indiqué le ministère le 21 janvier, lors des Rencontres annuelles d’IBMA, l’association des entreprises du biocontrôle.
Pas de crédit impôt-recherche majoré
Mais toutes les évolutions réglementaires ne satisfont pas les membres d’IBMA. Ainsi, l’obligation de séparation des activités de vente et de conseil des produits phytosanitaires « s’applique bien aux distributeurs de produits de biocontrôle », a confirmé Virginie Alavoine, de la Direction générale de l’Alimentation/ministère de l’Agriculture, selon Agra. Cette mesure inscrite dans la loi Egalim est prévue au 1er janvier 2021. Baptiste Breton, directeur technique de la coopérative La Tricherie, a dit redouter « un coup d’arrêt à la dynamique de développement du biocontrôle » à cause de cette mesure. Pour Sandrine Hallot, directrice du pôle Métiers à la FNA (négoce), l’avenir des « groupes 30 000 » est en jeu. Cette démarche Ecophyto 2, sur l’accompagnement de 30 000 exploitations dans la transition vers l’agroécologie à bas niveau de phyto, est « beaucoup portée par le négoce » et aussi les coopératives. Problème, elle relève du conseil qui est mis en balance avec la vente de phytos. La séparation des deux activités soulève « un problème de cohérence » avec l’objectif de promouvoir le biocontrôle, considère Sandrine Hallot. Concernant le crédit impôt-recherche, IBMA plaide pour que le biocontrôle bénéficie d’un taux majoré à 60 % sur dix ans, « pour inciter nos adhérents à développer davantage leurs activités de recherche sur le biocontrôle en France ». Ce souhait ne devrait pas être exaucé. Actuellement fixé à 30 % pour toutes les activités de recherche et développement des entreprises, ce taux devrait rester en l’état selon le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume : « L’augmenter, je n’en suis pas sûr », « le diminuer, non », a-t-il fait savoir lors des Rencontres d’IBMA.
Un marché à +24 % en 2018
Le marché du biocontrôle pèse 900 M€ dans l’UE en 2018, d’après IBMA Global. En France, il représente 170 M€ et enregistre pour la troisième année consécutive une croissance à deux chiffres avec des ventes en hausse de + 24 %. Il représente aujourd’hui plus de 8 % du marché de la protection des plantes. « En maintenant ce taux de croissance, nous pourrions atteindre le cap des 15 % du marché dès 2021-2022 », vise Antoine Meyer, président d’IBMA France. L’évolution de l’activité biocontrôle est identique pour les secteurs agricoles et Jevi (Jardins et espaces verts). « Ces fortes progressions ne doivent pas occulter pour autant le manque de solutions de biocontrôle dans encore un trop grand nombre d’usages, toutes filières confondues », nuance Antoine Meyer. Le chiffre d’affaires biocontrôle des entreprises membres d’IBMA est réalisé en 2018 à 63 % avec les substances naturelles. Suivent les médiateurs chimiques avec 19 % de leur chiffre d’affaires, les macro-organismes avec 11 % et les micro-organismes avec 7 %. Par catégorie de produits, les insecticides de biocontrôle représentent 39 % de ce chiffre d’affaires, les fongicides 32 %, les herbicides 16 % et les molluscicides 6 %.
A savoir
Les Zones de non-traitement au voisinage des zones d’habitation (ZNT riverains), définies par l’arrêté et le décret entrés en vigueur le 1er janvier 2020, ne concernent pas les produits de biocontrôle.