Fraise
La Fraise Label Rouge du Lot-et-Garonne veut se structurer autour de la Mariguette
Après 13 ans de Label Rouge qui ont, selon les termes des parties prenantes, sauvé une filière, l’Association des Fruits et Légumes du Lot-et-Garonne annonce une belle campagne à venir. Des inquiétudes demeurent néanmoins : flambée des coûts et guerre en Ukraine, loi Agec, loi EGalim. En parallèle, les ambitions se tournent vers la variété Mariguette pour le Label Rouge et la recherche d’une variété ronde française pour remplacer l’Espagne en produit d’appel.
Après 13 ans de Label Rouge qui ont, selon les termes des parties prenantes, sauvé une filière, l’Association des Fruits et Légumes du Lot-et-Garonne annonce une belle campagne à venir. Des inquiétudes demeurent néanmoins : flambée des coûts et guerre en Ukraine, loi Agec, loi EGalim. En parallèle, les ambitions se tournent vers la variété Mariguette pour le Label Rouge et la recherche d’une variété ronde française pour remplacer l’Espagne en produit d’appel.
Alors que les premières barquettes sont déjà sur les étals, la fraise Label Rouge du Lot-et-Garonne s’attend à une belle récolte 2022. Sur les 17 000 t de fraises produites dans le département [soit 27 % de la production nationale qui est d’environ 58 000 t], 600 t en moyenne sont labelisées Label Rouge. « Le Label Rouge reste une niche, entre 5 à 10 % de la production, ce qui permet de ne pas dévaloriser notre catégorie 1 », explique Eric Bazile, président de l’association des Fruits et Légumes du Lot-et-Garonne (AIFLG).
La fraise Label Rouge avait totalisé 495 t en 2019, 330 t en 2020 (effet Covid, lire plus bas) et 592 t en 2021. 600 t sont espérées à nouveau cette année. « La qualité sera au rendez-vous, nous avons déjà de beaux fruits et le beau temps promet un bon taux de sucre, se réjouit le président de l’AIFLG. A voir la météo d’avril. Nous avons en effet beaucoup souffert l’année dernière avec les gelées d’avril. »
Covid et fraise en 2020. La filière a fortement souffert en 2020 du manque de main d’œuvre qualifiée pour la récolte de la fraise Label Rouge et de la fermeture de certains circuits comme la restauration. « Le manque en main d’œuvre a été de 20-25 % », estime Eric Bazile. Conséquence : sur les 17 000 t de fraises produites dans le département, seules 330 t ont été labélisées (contre 600 t en moyenne).
Météo et prix de la molécule de gaz : les inconnues de l’équation
90 % des fraises du Lot-et-Garonne sont produites en abris hors-sol, dont beaucoup sont en anti-gel et peuvent donc résister à des températures basses de 0-1°C, grâce à des chaudières à bois ou au gaz. Sur ce dernier point, la guerre en Ukraine complique les choses. « Ça va le faire cette année avec les réserves, c’est après que ça va se compliquer, estime Eric Bazile. Certains producteurs ont déjà limité le chauffage malgré la perte de précocité que cela entraîne. » En revanche, la fraise est peu consommatrice d’engrais. Eric Bazile est plus inquiet pour les productions légumières comme les aubergines.
Autre source d’inquiétude : la loi Agec. La fraise a obtenu dérogation jusqu’en 2026. « Mais aujourd’hui, le plastique on ne peut pas s’en passer sur un produit aussi qualitatif et fragile que le Label Rouge, revendique Eric Bazile. Nous avons tenté les barquettes carton pour Grand Frais il y a quelques années, mais devant le rejet du consommateur on a dû repasser au plastique. » Les barquettes de fraises Label Rouge sont actuellement en r-PET operculées en plastique très fin PET.
Moins de Gariguette emblavées en 2022
Sur les 17 000 t de fraises produites sur le Lot-et-Garonne, la Gariguette représente 6 000 à 7 000 t (dont 600 t en Label Rouge en moyenne) ; la nouvelle variété Mariguette monte en puissance et devrait totaliser 1 000 t en 2022 (500 t en 2021), avec des volumes encore confidentiels sous Label Rouge : 15 t l’année dernière, ambition de dépasser les 20 t pour 2022. Ciflorette tourne autour de 600 à 800 t, et Charlotte 800 à 1 000 t. La Marat des bois, environ 400 t, est en perte de vitesse. Les autres volumes sont pris par les variétés rondes dont des variétés à haute valeur gustatives comme Dream ou Magnum.
2022 est marquée par une baisse d’emblavements en Gariguette, de -5 à -10 %, que Eric Bazile explique par le fait qu’elle soit « très bataillée en grande distribution » et par « un accident industriel [maladies, ravageurs] l’année dernière chez le producteur de plants hollandais ». Un million de plants aurait ainsi été perdus. Ciflorette baisserait faiblement en emblavement de -2 à -3 %, Charlotte est stable, les rondes pourraient être en hausse.
Enrichir le marché avec de nouvelles variétés rondes d’appel
« Murano, Cléry… Le marché français est actuellement très demandeur d’une fraise ronde origine France pour remplacer l’origine Espagne, glisse Eric Bazile. La filière fraise française pousse les obtenteurs français pour une fraise ronde. L’idéal serait au moins deux variétés, une disponible de début avril à mi-juillet et une autre remontante, gustatives avec un bon rendement qui permettent un prix facial attractif en rayon. Nous sommes en phase d’observation variétale, depuis 5-6 ans, avec Heart Market, et nous avons déjà des pistes. Il faut encore 3 ans je pense. »
Fraise Label Rouge : structurer la filière pour la Mariguette
Le cahier des charges n’autorise que quatre variétés : Gariguette (la majorité des volumes), Ciflorette (souvent pas assez rouge pour être labelisée), Charlotte (quasi inexistante en raison d’un calibre pas assez homogène) et la petite nouvelle, depuis 2020 : Mariguette.
A mi-chemin entre la Mara des bois, dont elle tient sa couleur rouge rubis typique et le goût très sucré, et la Gariguette, dont elle a la forme allongée et le côté acidulé, Mariguette se déguste de début avril à fin juin. Bien qu’elle existe depuis 2013, la Mariguette a décroché le Label Rouge en 2020 et représente actuellement 1 000 t dans la production de fraises du Lot-et-Garonne.
« La fraise Label Rouge doit se structurer autour de la Mariguette, revendique Eric Bazile. Première étape : maîtriser la production et l’itinéraire cultural et les dates de plantation. » Le président de l’AIFLG souhaite aussi une maîtrise de la commercialisation pour une présence mai-juin, à son optimum gustatif. « Avec les autres variétés, cela permettrait d’occuper l’espace commercial en fraise de mars à mi-juillet avec des fruits gustatifs et non déceptifs tout le long de la saison. »
Une vingtaine de producteurs cultivent la Mariguette sur une trentaine d’hectares cette année.
Du Lot-et-Garonne à la Dordogne : le Label Rouge, un succès valorisé malgré un surcoût à produire
Seuls deux Label Rouge sont reconnus en fraise : la fraise Label Rouge du Lot-et-Garonne (depuis 2009) et la fraise Label Rouge de Plougastel (depuis 2017).
Depuis trois ans, des demandes extérieures au Lot-et-Garonne, de Dordogne, viennent interroger l’AIFLG et le Label Rouge totalise désormais 82 producteurs du Lot-et-Garonne et 4 de Dordogne.
De l’avis des producteurs, le Label Rouge a sauvé la fraise du Lot-et-Garonne, en la positionnant sur un créneau de produit d’excellence. De 6 000 t en 1998, la fraise (toutes qualités) est passée à 17 000 t en 20 ans ! Le cahier des charges exige des fraises de qualité supérieure tant visuellement que gustativement. Outre des exigences de sucre, de couleur, de forme et de calibre, les fruits doivent être présentés lités en rang unique. Les producteurs doivent être référencés donc audités (20 % des producteurs audités une fois par an par tirage au sort). Ils sont HVE.
Produire en Label Rouge coûte plus cher : les audits des exploitations, la main d’œuvre qualifiée, le temps passé, le rendement plus faible à la cueillette… Eric Bazile estime ce surcoût à environ 1,5 €/kg. Mais en parallèle, le prix payé producteur pour une fraise labelisée Label Rouge est environ 2,50 €/kg supérieur à celui d’une fraise française de catégorie 1. Ce prix permet donc une petite marge pour le producteur. « Aujourd’hui, un producteur de fraises qui travaille bien peut bien vivre de son métier », confirme Eric Bazile. Et cette année, dans le contexte connu, « nous avons réussi à faire passer une hausse de 0,30 €/barquette de 250 g prix détail. C’est bien mais cela fait 10 ans qu’on n’avait pas eu d’augmentation donc on est encore loin de rattraper l’inflation. »
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