L’exportation française des fruits et légumes fait le dos rond
L’origine France a perdu du terrain sur les marchés extérieurs surtout depuis ces deux dernières années. Si certaines destinations performent bien, d’autres zones mériteraient d’être (ré) investies. Encore faut-il disposer des volumes pour cela.
L’origine France a perdu du terrain sur les marchés extérieurs surtout depuis ces deux dernières années. Si certaines destinations performent bien, d’autres zones mériteraient d’être (ré) investies. Encore faut-il disposer des volumes pour cela.
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L’année 2021 a été particulière pour la balance commerciale des fruits et légumes frais : le déficit de production en raison des intempéries couplé avec des taux de fret maritime quasi délirants ne pouvait que la déséquilibrer. Et c’est ce qui s’est passé : les exportations sont passées sous la barre des 2 Mt (1 949 794 t, contre 2 056 694 t en 2020), soit un recul de 5 % en un an.
Un constat plutôt alarmant
La plupart des destinations des fruits et légumes français ont été orientées à la baisse : l’Union européenne (-5 %) l’Asie (-33 %) et surtout le Moyen-Orient (-35 %). Cette zone concentre, en fin de compte, les ingrédients qui font le quotidien de l’exportation aujourd’hui : concurrence accrue d’autres producteurs (Turquie, Serbie et Ukraine avant la guerre), impact géopolitique (boycott des produits français en début d’année), désorganisation mondiale du fret maritime (surcoûts et rallonges de temps de transport non absorbables par les exportateurs). En fin de compte, seul le continent américain a été en croissance (+3 %).
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Perte de compétitivité de l’offre France
Pour Éric Guasch, président de la commission internationale d’Interfel, « les effets de l’embargo russe et la fermeture du marché algérien – deux événements qui se sont déroulés il y a presque une décennie maintenant – continuent de se faire sentir sur l’exportation française. En termes de volumes, nous sommes passés de 600 000 t à 300 000 t ! ».
Mais le contexte géopolitique n’explique pas tout. « La raison essentielle de ces reculs sur le grand export est claire : l’offre française a perdu en compétitivité, affirme Éric Guasch. Bien sûr, en termes de qualité, nos partenaires ne tarissent pas d’éloges pour les fruits et légumes français. Mais, ils se tournent souvent, en fin de compte, vers les offres concurrentes. Celles-ci sont à la fois intra-européennes avec la Pologne, et extérieures avec la Turquie, deux pays où les coûts de production sont environ le tiers de ce que nous connaissons dans notre pays. »
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Pour exporter, il faut des volumes
Le contexte réglementaire a aussi sa part dans la situation. « Il faut également prendre en compte le développement des réglementations européennes et françaises, qui impactent sur le prix. Le cahier des charges de l’Union européenne met la profession sous contraintes, lui demandant presque de laver plus blanc que blanc. Il faudrait trouver un peu de flexibilité », regrette le président de la commission internationale d’Interfel.
Une autre raison tient aussi de l’état de la production en France. Après tout, les deux sont intimement liés. « Sur les trente dernières années, la disparition régulière des volumes de production a entraîné presque automatiquement une perte de compétitivité de l’exportation, explique Éric Guasch. Aujourd’hui, l’origine France coûte cher à produire, ce qui limite les capacités de s’imposer sur les marchés extérieurs ». Le raisonnement est simple : plus de volumes de fruits et légumes français, c’est plus de potentiel pour exporter, dans la mesure où le marché local n’a pas la capacité d’absorber 100 % des volumes (selon le produit considéré).
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Quelques raisons d’espérer
Et pourtant, les produits français sont bien présents sur les marchés extérieurs. Dans sa note sur la compétitivité de la tomate française de mai 2022, FranceAgriMer indiquait ainsi qu’en 2020 la France avait enregistré une hausse importante des exportations en volume (+15 %) comme en valeur (+7 %), ce qui avait permis d’expédier 39 % de la récolte à l’export.
D’un autre côté, la pomme française a effectué une percée importante sur le marché colombien. Le pays sud-américain est aujourd’hui la première destination pour l’origine France. La Colombie, notoirement francophile et importatrice, apprécie les qualités sanitaires et organoleptiques de la pomme tricolore. Depuis deux ans, la pomme tricolore est aussi vendue en Équateur. Sur cette zone du monde, la filière a des espoirs pour une ouverture prochaine du marché mexicain.
La Covid-19 a stoppé brusquement le travail de relations commerciales directes. Le retour des salons internationaux est donc une bonne nouvelle pour les exportateurs. Car il y a des zones certainement à reconquérir : l’Afrique (Sénégal, Côté d’Ivoire) par exemple. Une des particularités de l’offre française est qu’elle s’est fortement spécialisée, mettant en avant des variétés particulières ou club. « Le problème, c’est qu’en termes macroéconomiques, cela s’appelle une niche, évoluant dans un marché de volumes. Alors, un levier de la relance de nos exportations pourrait passer par la multiplication des niches. Mais faut-il encore avoir les moyens pour le faire », conclut Éric Guasch.
« En termes de qualité, nos partenaires ne tarissent pas d’éloges pour les fruits et légumes français. Mais, ils se tournent souvent, en fin de compte, vers les offres concurrentes »
Les fruits à coque occitans abordent le marché allemand
Les 13 et 14 juin, dix-huit entreprises d’Occitanie ont participé pour la première fois à Gourmet Discovery, salon spécialisé dans l’épicerie fine et la gastronomie à Hambourg en Allemagne. Cette présence a été organisée par l’agence AD’OCC qui avait programmé des rendez-vous BtoB avec les principaux acheteurs allemands.
Parmi les participants, deux entreprises occitanes étaient spécialisées dans les fruits à coque : Pascal Marcou, producteur de noix à Thegra (Lot), et Lou Castaneas basé à Albias (Tarn-et-Garonne), producteurs de châtaignes, noix et noisettes. Ils ont mis en avant leurs produits transformés : huile de noix, cerneaux de noix caramélisés, confitures, compotes, pâtes à tartiner… Ces produits peuvent performer en Allemagne. Le marché de l’épicerie fine demeure prometteur avec un chiffre d’affaires 1,98 Md€, assuré à 70 % par les importations européennes.