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Kiwi : comment remédier au dépérissement racinaire ?

Alors que le dépérissement des kiwis est devenu une problématique majeure, le bureau interprofessionnel du kiwi met en œuvre des expérimentations pour comprendre les mécanismes de ce phénomène à rattacher aux excès d’eau, et pour trouver des solutions de sauvegarde des vergers.

Le dépérissement des kiwis est devenu une problématique majeure de la culture, ayant entraîné depuis 2020 la disparition de plus d’une centaine d’hectares en France, soit près de 3 % de la superficie nationale. Ces dépérissements sont essentiellement concentrés en Adour, ainsi que dans la vallée de la Garonne. La situation de certaines zones est très critique, allant jusqu’à la disparition de vergers et inquiétant tous les producteurs impactés.

Différents facteurs impliqués dans le dépérissement

En Italie, le phénomène est de très large ampleur depuis plusieurs années. Les études menées en Italie et en Nouvelle-Zélande démontrent que l’état du sol et en particulier son engorgement en eau est un facteur majeur expliquant ce dépérissement, en interaction avec les pratiques agronomiques et le climat. Les symptômes sur le verger peuvent apparaître rapidement. On estime que les conditions délétères pour les racines apparaissent au-delà de 48 heures d’eau stagnante et que leur développement est bloqué après quatre jours. « Malgré l’existence de certaines études sur ce sujet ailleurs dans le monde, il est nécessaire d’étudier ce phénomène à l’échelle locale pour en comprendre les spécificités », commente Adeline Gachein, directrice du bureau interprofessionnel du kiwi (BIK).

Dans ce contexte, le BIK et les unités mixtes de recherche (UMR) Emmah et Agir réfléchissent, par le biais d’une thèse, à des solutions de remédiation au dépérissement du kiwi, visant à accompagner les producteurs afin de limiter ce phénomène avant la dégénérescence complète des plantes. La première étape de ces travaux a consisté en l’élaboration d’un état des lieux des situations de production et une caractérisation des pratiques culturales en verger de kiwis dans le sud-ouest de la France, en lien avec le dépérissement. Pour cela, le BIK a fait appel aux étudiants de l’école d’agronomie de Montpellier. Ceux-ci ont cherché à déterminer l’influence relative des différents facteurs impliqués dans le dépérissement des vergers de kiwis. « Leur travail s’appuie sur des enquêtes menées en février 2022 auprès d’une cinquantaine de producteurs, et cherche à répondre à la question : Quels sont les liens entre l’état sanitaire des vergers vis-à-vis du dépérissement et leur contexte agro-pédo-climatique ? », précise la directrice.

La compaction et l’excès d’eau

Ce travail d’enquête a concerné 95 parcelles, la moitié en cours de dépérissement et l’autre saine, dans le bassin de la Garonne et dans celui de l’Adour. Il montre un dépérissement plus intense en Adour qu’en Garonne, en partie lié aux inondations de 2018 et 2021. Il mentionne également un dépérissement significativement plus important pour les sols décrits comme tassés. « En 2019 et 2020 en Adour, le nombre d’événements pluvieux intenses (plus de 40 millimètres par jour) a été multiplié par quatre par rapport à la moyenne de ces vingt dernières années, entraînant des cumuls de pluies entre 800 mm et 900 mm sur trois mois », précise le rapport. Ces pluies importantes et intenses sont principalement responsables de la saturation en eau du sol qui, combinée avec un passage d’engin récurrent, mais également aux travaux de récolte et de taille, peut accentuer le tassement du sol.

« Le tassement et les excès d’eau, parfois liés à une mauvaise gestion de l’irrigation, sont soupçonnés d’être en partie responsables du dépérissement lorsqu’ils ont lieu à des moments clés », commente la spécialiste. « Si les parcelles ont été inondées trois fois en quelques années, et que la structure du sol est tassée, le niveau de dépérissement peut largement dépasser 80 % de la parcelle. En revanche, sur des sols aux structures plus aérées, bien que les parcelles aient subi plus de trois inondations, on constate que le nombre d’arbres atteints est moins important, entre 10 et 50 % », rajoute Marianne Avignon, doctorante sur cette thématique. Cette enquête a également permis au BIK de dire qu’il y avait une multiplicité de cas avec du dépérissement : celui-ci n’était pas uniquement concentré sur le bas de parcelles, ou situé en bordure, ou encore sur des parcelles vieillissantes.

Proposer des solutions de remédiation

Selon le BIK, un postulat majeur a été posé : « les conditions anoxiques sont la cause principale des dépérissements du kiwi ». « Désormais, notre objectif principal est de proposer des solutions de remédiation aux producteurs, car ce phénomène pourrait être contré avant la dégénérescence complète des plants », mentionne Adeline Gachein. Sur ce sujet, la thèse réalisée par Marianne Avignon est en cours, accompagnée par un comité composé du BIK et de trois chercheurs de l’Inrae (1). « Lors de ces essais, nous testons trois leviers agronomiques : introduction de couverts végétaux, apport de massif de matière organique et travail du sol, ainsi que leurs interactions », précise la jeune chercheuse. Le BIK prévoit également d’étudier d’autres leviers d’action dont le choix du matériel végétal avec des essais de porte-greffes et le test de matériels d’irrigation. « Ils seront mis en place en fonction des partenariats et financements obtenus », conclut Adeline Gachein.

(1) Cette thèse a obtenu l’accréditation Cifre. Ce projet de trois ans est porté et financé par le BIK, encadré en collaboration avec les unités mixtes de recherche Emmah et Agir de l’Inrae. Elle est cofinancée à hauteur de 30 % par l’État.

Les symptômes du dépérissement

Dessiccation progressive des feuilles allant de leur marge vers l’intérieur et pouvant entraîner leur chute

Réduction du volume foliaire (canopée)

Pertes de vigueur des arbres

Pertes racinaires importantes très facilement identifiables lors d’un profil racinaire

Repenser l’irrigation

Le kiwi est une plante sensible à la sécheresse mais également aux excès d’eau. Ses besoins en eau se situent entre 700 et 1 000 mm/an. Aussi, en complément des précipitations, en période de végétation, les apports d’irrigation varient de 300 à 600 mm/an sur une période théorique : de début mai, au début de la floraison, à début octobre, avant la récolte. La gestion de l’irrigation constitue un point clé concernant la conduite du kiwi. Début mai 2023, le BIK a mis en place un essai afin d’étudier quels sont les effets de chaque système d’irrigation sur le système racinaire des vergers de kiwi.

Déceler un potentiel stress hydrique

Les systèmes de micro-aspersion et de goutte-à-goutte sont comparés. Le but premier est de connaître la répartition de l’eau dans le sol (bulbe d’irrigation) et de fait la répartition des racines et leur activité. Des variables au niveau de l’appareil végétatif sont également mesurées (surface foliaire, taille des fruits et longueur des pousses) afin de connaître les effets sur la production et le développement, mais également de déceler un potentiel stress hydrique engendré. Les résultats pourront permettre de choisir au mieux le système d’irrigation en fonction des besoins du kiwi et des caractéristiques pédologiques de la parcelle.

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