Cerise : les nouveaux challenges de la sélection
La sélection variétale de cerise fait face à de nombreux challenges pour trouver des variétés adaptées aux contraintes de production actuelles dans un contexte de changement climatique.
La sélection variétale de cerise fait face à de nombreux challenges pour trouver des variétés adaptées aux contraintes de production actuelles dans un contexte de changement climatique.
« Traditionnellement, la création variétale en cerise privilégiait les critères de productivité, qualité du fruit avec un objectif d’élargissement de la gamme de maturité », témoigne José Quero Garcia, chargé du programme Innovation variétale à INRAE lors d’une des conférences de Fruit 2050 au Sival. Or les nouveaux enjeux environnementaux auxquels l’arboriculture fait face et les demandes des consommateurs nécessitent d’additionner de nouveaux critères de sélection. Le premier est l’adaptation au déréglement climatique. « Le cerisier est très impacté par le changement climatique, souligne le chercheur. L’augmentation des températures en automne et en hiver provoque des manques de froid dont les conséquences vont jusqu’à des floraisons erratiques et des nécroses de bourgeons. » Cet arbre fruitier nécessite 700 à 1 200 heures de froid sur la période hivernale pour que le débourrement s’effectue normalement.
« Depuis une vingtaine d’années, à la suite d’hivers peu rigoureux, des productions faibles à très faibles sont observées, notamment dans le Sud-est de la France. La production de certaines parcelles, particulièrement sur porte-greffe vigoureux, peut devenir très faible et atteindre moins de 10 % d’une production normale », témoigne Amandine Boubennec du CTIFL. « Or, contrairement aux autres espèces, nous avons peu de variétés « low chilling ». Deux vieilles variétés sont connues à ce jour : Cristobalina et Saint Georges. Et nous ne disposons pas de tests rapides pour évaluer les besoins en froid et chaleur », complète José Quero Garcia.
Peu de variétés résistantes à l’éclatement
« L’augmentation des températures printanières provoque une avancée des floraisons et donc une plus grande sensibilité au gel », continue-t-il. Les phénomènes climatiques extrêmes comme les pluies orageuses favorisent l’éclatement des fruits. « Là aussi peu de variétés sont à ce jour tolérantes à ce phénomène, telles que par exemple les variétés Regina et Fermina. Et nous n’avons pas de tests contrôlés fiables pour son évaluation », mentionne-t-il.
Les canicules favorisent la formation de fruits doubles l’année d’après. Sur les ravageurs et maladies, les principaux enjeux sont de trouver des tolérances au monilia (principale maladie qui impacte le cerisier), au chancre bactérien, aux pucerons noirs et surtout à Drosophila suzukii, ennemi n°1 de la filière. « Mais je doute que la solution vienne de la génétique pour ce ravageur. »
Elargissement de la base génétique
Les challenges sont donc de taille. José Quero Garcia expose : « Avec la génétique que l’on a, qui est étroite car beaucoup de variétés ont le même géniteur, on peut à court terme espérer apporter la caractéristique low chilling, la moindre sensibilité à l’éclatement et la tolérance au monilia. » A long terme, le chercheur espère pouvoir trouver des tolérances au chancre bactérien et au puceron noir.
« Nous avons peu de sources génétiques pour la tolérance aux maladies. » Pour en apporter, des croisements avec des merisiers ont été faits. « Nous avons aussi participé à un voyage de prospection en Azerbaïdjan, zone d’origine du cerisier, en 2014, afin d’élargir la base génétique. Suite à cette collecte, 800 hybrides ont été produits dont l’évaluation phénotypique débute cette année. ».
Utilisation de marqueurs moléculaires
De façon à optimiser le processus de sélection, traditionnellement très long, des marqueurs moléculaires sont aujourd’hui utilisés en routine pour sélectionner les hybrides à gros fruits et/ou auto-fertiles. D’autres marqueurs sont par ailleurs en cours de validation pour les caractères de dates de floraisons et de maturité, productivité, fermeté et tolérance à l’éclatement.