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Allemagne : l’épineuse question de la main-d’œuvre

La difficulté de recruter des saisonniers pousse les producteurs de fraises et d’asperges allemands à se diversifier pour les occuper plus longtemps ou à investir dans des solutions techniques pour économiser des bras.

Les producteurs allemands craignent de reporter la hausse des coûts de main d'oeuvre auprès de la distribution, qui est prête à favoriser des produits d'importation moins chers.
© C. Befve

La problématique de la main-d’œuvre est à nouveau d’une actualité brûlante en Allemagne. « Le salaire minimum va passer à 9,19 € bruts de l’heure en 2019 et à 9,35 € en 2020. L’employeur s’acquitte en sus d’une taxe de 5 % », indique Simon Schumacher, directeur du syndicat VSSE, organisateur des deux salons. « Répercuter ces hausses est quasiment impossible. La grande distribution préfère s’approvisionner avec de la marchandise importée, moins chère et disponible une grande partie de l’année ». La part de marché de la production allemande atteint encore 80 % en asperge, mais se limite à 60 % en fraise.

Un appel à diminuer les surfaces

Les producteurs commercialisant en grande distribution réagissent en investissant en informatique, dans du matériel plus grand et plus performant et/ou en augmentant leur technicité. Ils sont à l’affût de toutes les nouvelles variétés qui autorisent une plus longue présence de la marchandise locale en rayon et de plus gros fruits. « Leur goût n’est pas altéré et ils remplissent plus vite une barquette. La rentabilité est meilleure. Les frais de main-d’œuvre sont moindres », calcule Simon Schumacher. Le marché oblige les producteurs à résister à de terribles creux. L’été dernier, le prix du kilo de fraises est passé au pire sous les un euro. Pour retrouver un niveau de prix suffisant, la profession souhaite ouvertement que les surfaces diminuent. Elle estime qu’il faudrait descendre en plusieurs campagnes de 14 000 à 10 000 ha de fraises et de 27 000 à 22 000, voire 20 000 ha d’asperges !

Embaucher est difficile pour 9 producteurs sur 10

Pour les producteurs qui vendent tout ou partie de leurs récoltes en direct, la question est plutôt de trouver et de conserver leur personnel. Beaucoup se diversifient dans des cultures nouvelles comme les pommes ou les cerises par exemple afin d’occuper leur main-d’œuvre plus longtemps. Ce qui ne règle pas la difficulté du recrutement. Selon une enquête menée par le VSSE durant l’été 2018 auprès de 354 producteurs, neuf sur dix estiment que les conditions pour embaucher se détériorent. Même embauchés, trop nombreux restent ceux qui jettent l’éponge en cours de contrat. Face à ce défi, un quart des personnes interrogées est prêt à investir pour mécaniser les postes de travail ; 27 % veulent intensifier la production ; 35 % sont prêts à raccourcir leur saison et 56 % à réduire leurs surfaces !

Créer du lien pour garder ses salariés

Pour sa part, Sarah Grallath a pris le taureau par les cornes. A la tête avec son mari d’une exploitation de 30 ha d’asperges et de 50 ares de fraises, elle occupe chaque année sur sept mois 100 saisonniers à la récolte et 30 à la vente. Elle a réfléchi aux stratégies à appliquer pour les conserver. « Nous avons commencé par établir des règles claires. Le règlement intérieur fixe les horaires de pause, demande que l’on trie les déchets, prévoit les cas de vol ou d’alcoolémie. Nous échangeons beaucoup avant et après la journée pour corriger les manquements. Nous avons responsabilisé les chefs de groupe qui forment eux-mêmes leurs équipes. Une vidéo est diffusée aux novices et nous avons appris les mots de base dans les langues maternelles de nos salariés polonais ou roumains. Nous leur demandons bien de comprendre un peu d’allemand ! Nous leur mettons aussi à disposition des vélos numérotés. Nous organisons une soirée festive durant leur séjour et leur envoyons une carte pour Noël. Il faut créer du lien et de la confiance. Aujourd’hui, deux tiers d’entre eux reviennent chaque année. D’autres nous recommandent », témoigne-t-elle.

Christophe Reibel

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