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Abricot : la filière au pied du mur

Les difficultés rencontrées par la filière abricot cette année imposent des prises de position dans le choix variétal et les modes de production.

LES ABRICOTS FRANÇAIS manquent de différenciation par rapport aux espagnols.
© A. LASNIER

« Mauvaise ». Le mot a été lancé par Raphaël Martinez de l’AOP pêche et abricot. Et personne ne l’a contredit. La campagne 2017 d’abricot a été la pire des quatre dernières années. La production européenne en hausse de 10 % par rapport à la moyenne quinquennale a provoqué la confrontation des différents acteurs du marché. Et tout le monde a été perdant. S’y ajoute la précocité de la production française, la mauvaise qualité gustative de certaines variétés et le manque de différenciation des produits français par rapport aux autres origines.

Les travers de la création variétale florissante de ces dernières années ont rattrapé les producteurs. « Nous avons besoin de nous différencier ! », a martelé Bruno Darnaud, président de l’AOP pêche et abricot, lors de la journée de synthèse variétale organisée début septembre à Sud Expé Saint Gilles. Même constat pour Sabine Alary, présidente de la SIPMM abricot (Section interprofessionnelle de première mise en marché) : « On ne pourra pas réussir à discuter avec la distribution si nous ne nous démarquons pas gustativement. Cette année, la GMS savait que l’abricot français était précoce mais elle n'a pas joué le jeu et a préféré importer des abricots espagnols. Car ce sont les mêmes variétés que celles que nous produisons. Et on ne les produit pas mieux qu’eux ! ».

Différencier par le goût et les modes de production

Deux leviers ont été proposés pour se différencier. Un travail sur le goût et sur le mode production. « La lisibilité de la qualité gustative est notre premier défi, a pointé Raphaël Martinez. La GMS a commencé cette année à faire des agréages sur l’aspect gustatif. Une discussion est en cours avec ses représentants sur la définition d’un bon abricot ». Des analyses sensorielles ont été initiées par le Ctifl sur des lots en sortie de station pour un large panel de variétés. L’étude doit se poursuivre l’année prochaine. Mais le goût n’est pas qu’affaire de variétés. Le travail en verger influence aussi la qualité gustative des abricots. « L’utilisation d’outils de mesure de la maturité pourrait être une piste pour mieux cibler les dates optimales de cueillette », a avancé le directeur de l’AOP pêche et abricot. L’un des facteurs ayant pénalisé le goût cette année est le stockage de certaines variétés. « Or, nous devons miser sur la fraîcheur plutôt que sur la "stockabilité" », a ajouté Bruno Darnaud. Le label "vergers écoresponsables" est aussi une piste proposée par le président de l’AOP pour mettre en avant le produit français. « Mais pour modifier nos pratiques agricoles, nous avons besoin d’investir dans nos vergers en équipement et en technique ».

Suivre l’exemple de la pêche… ou pas !

Si le consensus règne sur ces deux objectifs, les moyens d’y parvenir font débat. « Si nous arrivons à travailler sur la qualité et à planifier l’arrivée des volumes, nous pourrons convaincre la GMS de basculer sur du produit français, même sur les variétés précoces quand les produits espagnols sont là », a avancé le directeur de l’AOP pêche et nectarine. « Nous devons prendre exemple sur la filière pêches et nectarines, a proposé Bruno Darnaud. L’abricot se retrouve dans la même situation que cette filière jumelle dans les 1990-2000. Nous avons souffert, mais depuis cinq ans nous avons réussi à différencier le produit ». Cette proposition n’est pas du goût de la représentante des metteurs en marché. « La filière pêche a perdu 50 % de ses producteurs et s’est recentrée sur le marché français !, s’exclame Sabine Alary. Je refuse que l’on sacrifie les petits producteurs, les zones de montagne, les indépendants. Sans parler du fait que beaucoup de producteurs d’abricots d’aujourd’hui sont des reconvertis forcés de la pêche. Demain, ils feront quoi ? Nous devons défendre la production française dans son ensemble et sa diversité par la promotion de toutes les démarches labellisées de production et de la mise en marché. C’est la vocation et l’engagement de la SIPMM abricot depuis 2012 ».

Les variétés au coeur de la réflexion

« Il existe entre 200 et 250 variétés d’abricots », souligne Christian Pinet, responsable du programme abricot à Sud-Expé Saint Gilles. Et 80 à 100 sont en observation dans le réseau. Une prolifération qui laisse parfois perplexes producteurs et metteurs en marché quand il s’agit d’en choisir une pour une nouvelle plantation. L’idée de restreindre le panel avait déjà été évoquée les années passées. Pour cette édition 2017 de la synthèse variétale abricot, le réseau d’évaluation variétale français a proposé une gamme des meilleures variétés à planter par bassin de production et circuit de distribution. Seules des variétés au moins en 3ème feuille dans le réseau d’observation y ont été incluses. Ces listes, présentées dans ce document, font débat mais se veulent être une amorce de discussion. « Les premiers metteurs en marché ont eu aussi une expérience des variétés grâce à leur travail en station et aux retours des clients, rappelle Sabine Alary. Nous devons étudier ces listes entre metteurs en marché, en discuter et proposer des listes modifiées qui intègrent nos critères de sélection ». Toutes les variétés proposées ne feront pas l’unanimité. « Certaines ne sont pas bonnes, ou ne tiennent pas en rayon », précise la présidente de la SIPMM.

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