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Des repères pour les exploitations de marais

Le projet Apex visait à proposer aux éleveurs des zones humides des Pays de la Loire, premiers gestionnaires de ces milieux et garants de leur préservation, des clés d’amélioration de leur système.

« Le manque de références sur l’élevage en zones humides revenait régulièrement dans les discussions au sein de la commission marais de la chambre d’agriculture de Loire-Atlantique. De plus, la transmission de savoirs s’effectuait jusqu’à récemment oralement de père en fils. Mais cela est de moins en moins vrai et de plus en plus de personnes s’intéressent à ces zones. Il devenait donc nécessaire de disposer de données d’où le lancement du projet Casdar Apex(1) en 2015. Son objectif était de mieux comprendre les systèmes d’élevage dans ces territoires à forts enjeux environnementaux et à fortes contraintes naturelles », explique Chantal Deniaud de la chambre d’agriculture de Loire-Atlantique.

Ainsi, près de 50 élevages bovins allaitants, laitiers et mixtes situés en zone Natura 2000 en Loire-Atlantique, Maine-et-Loire et Vendée ont participé à cette initiative qui a permis d’acquérir des repères sur ces systèmes de production selon les trois axes technico-économique, environnemental et sociologique et d’optimiser l’activité de pâturage au sein de l’atelier d’élevage (valorisation des fourrages et suivi sanitaire).

« On a fait le choix de la diversité dans ce programme. Aussi, chaque prairie est unique. On a tout de même réussi à constituer un certain nombre de parcelles de références pour un certain nombre de pratiques et de terroirs », souligne Jean-Luc Gayet, conseiller prairies fourrages à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire.

Des exploitations rentables malgré les contraintes

Sur la base de deux années de suivi technico-économique de 39 exploitations, l’Institut de l’élevage a pu établir une typologie de six classes (petites exploitations autonomes « bovin viande herbager », exploitations autonomes « bovin viande herbager » avec une vision économique de l’exploitation, exploitations « bovin lait herbager pâturant », exploitations « bovin lait (ou mixte) » avec un niveau de production élevé, exploitations « polyculture élevage », très grandes structures avec plusieurs productions). « Cette typologie met en évidence la diversité des exploitations et les différences de stratégies technico-économiques. Les élevages en zones humides sont davantage extensifs (chargement de 0.9 UGB/ha de SFP) avec un système d’alimentation basé sur l’herbe (SFP 90 % de la SAU en moyenne) et l’autonomie fourragère. Les zones humides représentent en moyenne 50 % de la surface. De nombreuses exploitations sont engagées dans des démarches qualité. Les moyennes d’EBE/UMO (59 000 euros) sur les années observées sont globalement supérieures aux références locales même si les moyennes cachent des disparités. La part des aides est légèrement supérieure aux références (MAE) », précise Fabienne Launay de l’Institut de l’élevage.

Ce travail a par ailleurs montré le fort attachement des éleveurs à leur territoire de marais, même si la gestion est complexe.

Une ressource indispensable

Les zones humides sont principalement utilisées en début de printemps (pour les prairies hautes) mais surtout fin de printemps été et à l’automne, lorsque le niveau d’eau est au plus bas. Les exploitations enquêtées y ont recours soit uniquement pour le pâturage, soit pour une utilisation mixte, avec pâturage et fauche. Aucune ferme ne réserve toutes ses surfaces à la fauche. Les zones fauchées servent à la production de foin et d’enrubannage (minorité), mais aussi de biomasse utilisée pour la litière animale (espèces avec des taux de cellulose brute supérieurs à 330 g/kg de MS et des taux MAT < 6 %). Au pâturage, on retrouve principalement des génisses, des vaches allaitantes suitées ou non et des bœufs. Les rendements de ces zones sont un peu plus faibles avec des moyennes de 3,8 t de MS par hectare pour la production de fourrages stockés et de 2,3 t de MS pour le pâturage.

« Ces ressources sont néanmoins très importantes pour les exploitations étudiées. Le pâturage des zones humides leur permet de satisfaire en moyenne 26 % des besoins annuels de leurs animaux. Près d’un quart d’entre elles en couvrent 40 à 80 % par le pâturage sur ces espaces. Plus de la moitié du foin utilisé provient des zones humides », précise Fabienne Launay.

Une grande diversité fourragère

« Au cours du projet, on a pu observer des territoires très différents avec des caractéristiques intrinsèques qui leur sont particulières, aussi bien au niveau des durées d’inondation, que du type de sol et par voie de conséquence, de fourrage », note Jean-Luc Gayet. De l’analyse floristique du programme, il en ressort une forte biodiversité. « La flore s’adapte à son milieu, tout comme les animaux et les éleveurs. La qualité (MAT jusqu’à 150 g/kg) et la quantité de fourrages sont fortement dépendantes des volumes d’eau auxquels chaque marais est confronté (hauteur d’eau mais surtout amplitude des inondations). Les quantités récoltées peuvent être réduites de moitié en cas de crues inopinées. Par ailleurs, point important, même si certaines prairies sont faibles en MAT, elles disposent de valeurs minérales relativement fortes et offrent ainsi un équilibre organominéral et oligoéléments aux animaux. » Les espèces présentes, majoritairement des graminées (> 80 %), ont une précocité tardive à très tardive.

(1) Casdar Apex : améliorer les performances des élevages extensifs dans les marais et vallées alluviales. Ce programme a été conduit en partenariat avec l’Institut de l’élevage, la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, l’Inrae Saint-Laurent-de-la-Prée, l’université de Rennes, le GDS Loire-Atlantique, l’ESA Angers, le lycée Nature de la Roche-sur-Yon, le lycée Saint-Clair de Derval.

Un fort attachement des éleveurs à leur territoire

Pour en savoir plus

L’ensemble des ressources liées au projet Apex sont disponibles sur le site de la chambre d’agriculture des Pays-de-la-Loire.

Définition

Zone humide

Que signifie le terme ? Il en existe plusieurs définitions. Pour cette étude, il s’agissait de zones inondables, avec des fréquences de submersion variables selon les sites. Ces milieux, classés en grande majorité en zones Natura 2000, peuvent être très divers et composés d’une mosaïque d’habitats.

Avis d’exploitant - Bertrand Devineau, 95 vaches allaitantes charolaises, naisseur engraisseur dans les marais de la Payré à Talmont-Saint-Hilaire en Vendée

« Les vaches entretiennent les marais salés »

« La majorité des prairies permanentes de l’exploitation (65 sur 73 hectares) se situe dans le marais du Payré, créé au Moyen-Âge par la main de l’homme. Au XII-XIIIe siècle, les moines ont creusé sur la mer un circuit d’eau en forme de peigne, géré par des écluses et protégé par une digue. Les îlots sont ainsi très découpés du fait de la présence de canaux. Les prairies ne peuvent être mécanisées. Seul le pâturage est possible ainsi que le broyage des épines et chardons. Les parcelles dans les marais appartiennent à des propriétaires qui délèguent leur entretien aux vaches. Près de la moitié des parcs disposent d’eau douce (sources situées à la limite des marais). Dans l’autre partie, j’ai fait installer un compteur d’eau et un réseau de tuyaux pour amener l’eau nécessaire à l’abreuvement.

Des prairies de qualité mais peu productives

Les animaux pâturent du 15 mars à la Toussaint. La production est assez faible mais l’herbe de qualité. Depuis plus de 20 ans, j’adhère à Bovins croissance. Les suivis de poids des génisses montrent de bonnes croissances au printemps (entre 900 et 1 300 g par jour). L’été, la production est très réduite, d’où la mise en pâture des animaux à moindre besoin et l’allégement des chargements. Ainsi, au printemps pâturent les vaches taries jusqu’au 15 août. Elles sont alors rentrées pour les mises bas. Il y a également un lot de vaches suitées de femelles qui sont ramenées au bâtiment début juin pour le sevrage. Les génisses de 18 mois rentrent à la Toussaint pour les inséminations et celles de 2,5 ans pour vêler. Les marais maintiennent le troupeau.

Il est nécessaire de compter chaque jour les animaux car une vache tombée à l’eau ne peut remonter seule.

Les dérobées de mes cultures de plaines alimentent le troupeau l’hiver. J’achète 20 hectares de foin à l’extérieur pour compléter. »

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