Filière bière
[Coronavirus - Covid-19] La reprise de commercialisation de bières en CHR, un vrai casse-tête selon les brasseurs indépendants et artisanaux
C’est la grande question du moment pour les brasseurs indépendants et artisanaux : alors que certains ont multiplié les initiatives pour pouvoir continuer de vendre leur production pendant la crise (drive, en ligne, livraison à la porte, packs découverte…), ils redoutent l’avenir alors que la réouverture des cafés, hôtels et restaurants (CHR) reprend, tout comme dans le secteur de l’évènementiel. Avec une question à la clé, posée par le Syndicat national des brasseurs indépendants (SNBI) : « nos brasseries indépendantes pourront-elles encore vendre des bières dans les bars et restaurants ? »
De quoi s’agit-il ? « Il est évident que la crise impacte de manière complètement différente les petits brasseurs indépendants et les multinationales. C’est un fait que nous expliquons aux pouvoirs publics afin qu’ils considèrent nos demandes d’aides de manière différenciée. Tout en étant respectueux de chacun, nous répétons inlassablement que les brasseurs artisans et industriels ne font pas du tout le même métier, ont des structures d’entreprises qui n’ont absolument rien à voir, et notamment des méthodes de production et des comportements commerciaux extrêmement différents » indique le syndicat.
Avec la reprise des activités économiques en général, le secteur va se retrouver avec des petits producteurs très affaiblis (en manque de trésorerie) et des lieux de vente de type café restaurant (en manque de trésorerie également) qui auront la nécessité de « faire » du chiffre d’affaires pour, sinon rattraper le temps perdu (ce qui n’a pas été consommé ne le sera pas), limiter la casse sur l’ensemble de l’année. Dans ce contexte, les grandes entreprises de brasserie devront elles aussi renouer avec des volumes de ventes permettant d’améliorer leurs performances financières et elles auront dû gérer, au préalable, la destruction de gros volumes de bière non consommables.
Le SNBI redoute que les brasseurs industriels « profitent de la détresse économique des bars et restaurants pour dégainer, plus que jamais, leurs fameux contrats brasseurs : «je te prête, mais tu achètes exclusivement chez moi ». Ces contrats, parfaitement légaux, existaient déjà avant la crise mais le syndicat craint que la pratique s’amplifie de façon considérable. Et les volumes achetés selon le principe de l’exclusivité réduiraient la possibilité d’accéder à une offre plus diversifiée, notamment celle proposée par les « petits » brasseurs.
A chacun de prendre ses responsabilités
Le SNBi souhaite interpeller plusieurs acteurs. L’état, tout d’abord, qui « doit obliger les banquiers à systématiquement accorder le prêt garanti par l’Etat (PGE) aux cafés, restaurants et distributeurs ». Sur ce sujet, il est vrai qu’il y a eu quelques ratés au début de la mise en place de cette mesure, notamment sur les niveaux donnant droit d’accès aux PGE. Mais depuis, une correction a été apportée au système et le rattrapage des dossiers à étudier est en cours.
Par ailleurs, le SNBI demande l’interdiction administrative des contrats brasseurs. Le syndicat sollicite aussi les directions départementales de la protection des populations et la DGCCRF, pour veiller et poursuivre « toute entreprise qui profiterait d’un abus de faiblesse d’un professionnel du secteur concerné », et aussi l’autorité de la concurrence pour détecter d’éventuelles ententes commerciales entre fournisseurs.
Sans nier bien entendu les difficultés qu’ils rencontrent, le SNBI demande enfin aux cafés, hôtels, restaurants et distributeurs, « d’être extrêmement vigilants aux propositions de contrats et de renégociation de contrats qu’ils se verront proposer. Ils ne doivent pas se laisser abuser par des propositions qui même si elles paraissent généreuses, les priveront de leur liberté et leur coûteront beaucoup plus chères qu’avec une banque ».