Un cahier des charges « broutard préparé »
Interbev prépare un accord interprofessionnel sur la préparation sanitaire des broutards destinés à l’engraissement, pour l’export et pour les filières franco-françaises. Il constituera un cadre sécurisant que chaque opérateur pourra s’approprier.
Interbev prépare un accord interprofessionnel sur la préparation sanitaire des broutards destinés à l’engraissement, pour l’export et pour les filières franco-françaises. Il constituera un cadre sécurisant que chaque opérateur pourra s’approprier.
Après un an de travail, Interbev a présenté au Sommet de l’élevage son projet de cahier des charges « broutard préparé ». « L’intérêt est de limiter l’utilisation d’antibiotiques dans les ateliers d’engraissement, renforcer les performances zootechniques en engraissement, et contribuer à l’amélioration continue de la qualité des broutards français », explique Annick Jentzer, responsable du secteur bovins à Interbev. Ce cadre qui est annoncé pour début 2020 sera certes volontaire, mais harmonisé entre les démarches existantes ou à venir. Il vise à offrir aux naisseurs qui investissent dans la préparation des broutards la sécurité de retrouver à la vente leur investissement, et de rassurer les engraisseurs sur les moyens mis en œuvre. Ce cahier des charges sera couplé à la diffusion sur le terrain de fiches de bonnes pratiques destinées aux naisseurs et aux engraisseurs.
Interbev reconnaîtra le porteur de démarche (OP, négociant…). Un double niveau de contrôle est organisé : un contrôle interne de chaque naisseur engagé par le porteur de démarche, et un contrôle externe de la traçabilité du protocole vaccinal chez le porteur de la démarche. L’accord interprofessionnel définira les postes de charges qui doivent être couverts par le coût de préparation des broutards, sans indiquer de montant en euros correspondant puisque l’interprofession n’en a pas le droit. L’objectif est bien de répercuter le coût de préparation au premier acheteur en pied de facture. « Les bovins préparés doivent avoir fait l’objet d’une commande de la part du porteur de la démarche auprès du naisseur », précise Annick Jentzer.
Souplesse et harmonisation des démarches
Les broutards devront être vaccinés contre VRSB, Pi3 et Mannheimia haemolytica. La vaccination pourra être réalisée par l’éleveur, et l’élevage naisseur devra justifier sa bonne réalisation auprès de l’acheteur. Le protocole est défini de façon à assurer une couverture vaccinale depuis la sortie de l’élevage naisseur et durant au moins les quatre semaines suivantes. Il sera adapté pour ceux qui vaccinent à la naissance comme pour ceux qui ne vaccinent pas pendant la période sous la mère.
Deux démarches analogues existent déjà sur le terrain.
La première à avoir été lancée est Broutard Max de Terrena en 2006. « Cette démarche repose sur des résultats scientifiques qui ont démontré l’intérêt de la vaccination chez le naisseur, et intègre aussi des critères de race et de poids », rappelle Marianne Lefol, vétérinaire chez Terrena. La plus-value est de 25 euros pour le naisseur, pour un surplus à l’achat de 25 euros pour l’engraisseur. Jusqu’en 2012, l’organisation de producteurs en finançait une partie (10 euros). « La démarche a concerné de 200 animaux la première année à 5 000 la meilleure année. Sur 10 ans, Broutard Max a représenté 7,6 % de notre collecte même si depuis 2017, on observe une érosion en lien avec la baisse de l’engraissement sur notre zone », explique Marianne Lefol. Broutard Max est cependant une belle réussite. Beaucoup d’efforts sont faits pour gérer la multiplicité des protocoles vaccinaux et faire des lots complets de Broutard Max afin d’être cohérent.
La seconde démarche B2E pour Broutard Excellence Elvea, portée par Elvea France existe depuis 2016. Les broutards doivent être vaccinés contre VRSB, Pi3 et Mannheimia haemolitica, et déparasités entre 0 et 30 jours avant la période de commercialisation contre les strongles digestifs et pulmonaires ainsi que les parasites externes (poux et gales). Un contrôle est assuré par un organisme certificateur. Les broutards doivent être commercialisés 28 jours maximum après la mise en place de l’immunité. Le coût est de 20 euros pour les produits, 10 euros pour le travail et 5 euros pour la certification. La démarche B2E concerne très peu d’animaux actuellement.
Difficile de répercuter les charges au client
« Les naisseurs sont prêts à franchir ce pas. Ils ont aujourd’hui une vision plus longue de leur place dans la filière. Certifier la préparation des broutards est une valeur ajoutée à leur travail. Et le plan Écoantibio a aussi accentué leur sensibilité au sujet. Mais aujourd’hui, les clients ne sont pas enclins à mettre en place cette prestation qui est présentée à 35 euros par broutard, explique Virginie Motta, directrice d’Elvea Auvergne-Rhône-Alpes. On ne peut pas demander aux naisseurs d’investir 20 euros sans garantie de rémunération. Il faut que la demande vienne du client, qu’il achète le service. »
« Certains clients à l’export n’acceptent pas de régler la plus-value au naisseur », constate également Marianne Lefol pour la démarche Broutard Max. « Nous mettons la démarche en œuvre à la demande. » Philippe Dumas, éleveur et président du groupe Sicarev, a jugé important de faire ce travail interprofessionnel pour NE pas partir dans tous les sens, mais de commencer en ciblant les animaux les plus fragiles et en progressant étape par étape.
Les acheteurs italiens présents lors de cette conférence au Sommet de l’élevage ont fait savoir qu’ils n’étaient pas très emballés. « Si on n’arrive pas à faire monter le cours de la viande, on n’arrivera à rien, et aujourd’hui il n’est pas possible de trouver une nouvelle marge », a résumé l’un d’entre eux.
Des réflexions sur une préparation au sens plus large
Les acheteurs italiens présents lors de cette conférence au Sommet de l’élevage se sont montrés intéressés par une préparation au sens plus large des broutards. Daniel Bonfante, directeur commercial d’Azove a rappelé qu’en Italie circule le virus de l’IBR. « La phase d’adaptation des broutards n’est d’autre part pas la seule préoccupation des engraisseurs, a-t-il expliqué. Pour lutter contre l’antibiorésistance, ils souhaiteraient connaître le passé sanitaire des animaux afin d’adapter le traitement au cas où ils sont malades pendant l’engraissement."
La gestion alimentaire avant l’arrivée en engraissement est aussi une information importante pour les engraisseurs italiens. Certains broutards sont sevrés le jour de leur vente, d’autres consomment déjà du maïs depuis un moment quand ils arrivent, et parfois ces deux types d’animaux arrivent dans le même lot.