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Chez Anthony Gervais, dans le Maine-et-Loire
" Pas de génétique sans valorisation de la viande "

La génétique est au cœur du système d’Anthony Gervais. En atteste l’obtention des Sabots d’Or 2016, sans pour autant oublier l’autonomie alimentaire de ce système très herbager.

Avant de s’installer en 2004 sur l’exploitation de 65 hectares de son oncle et de reprendre les mères de l’élevage de son père, Anthony Gervais a travaillé dix ans dans le para-agricole en tant que conseiller viande bovine, six ans en centre d’insémination et quatre ans à Bovins croissance. Il est par ailleurs resté double actif les quatre premières années d’installation, en cumulant son travail d’exploitant avec le poste de responsable de la station d’évaluation Rouge des Prés, d’où son attrait affirmé pour la génétique. Son élevage s’est à nouveau agrandi en 2007 avec la reprise de l’exploitation de son père, pour passer à 117 hectares et 90 vêlages.

La dernière évolution de l’exploitation est récente puisqu’elle est intervenue fin 2016. Anthony Gervais a en effet repris 52 hectares accolés à ses terres, suite à l’arrêt pour raisons de santé de son voisin, qui sera désormais responsable des cultures en tant que salarié à mi-temps. « L’objectif est aujourd’hui de monter à 120 vêlages et d’atteindre l’autonomie alimentaire totale. Pour cela, je me suis inspiré de mes voisins et j’ai semé pour la deuxième année consécutive un mélange orge/pois à teneur équivalente au semis. Sur la campagne 2015-2016, 3,5 hectares ont été semés. Les rendements ont atteint 40 quintaux, ce qui est encourageant au vu des conditions climatiques. À l’avenir, j’espère avoisiner les 55 quintaux. Pour la campagne en cours, 17 hectares ont été implantés mi-octobre », note Anthony Gervais.

Finir toutes les femelles avec un mélange pois/orge

L’association de l’orge et du pois permet d’obtenir deux cultures mûres à la récolte début juillet. Ce mélange est également intéressant car il est mûr avant le blé et le triticale, « ce qui favorise un meilleur étalement des tâches. J'obtiens certes moins de paille, mais je dispose d’un complément à 14 de MAT et 1 UF ». Si le salissement à la récolte est faible, il peut être stocké directement en cellule et aplati avant distribution. Sinon, il peut  être mis en boudin, dont l’intérêt est de ne pas nécessiter de produit pour la conservation, contrairement au stockage en cellule.

« Cette année, j’ai réalisé des essais sur des lots de veaux et un lot de quinze vaches en finition qui ont reçu, en complément de l’enrubannage à volonté, 7 kilos de ce mélange et 1 kilo de blé. L’avantage avec l’AOP Maine Anjou, c’est que l’on a des retours de l’abattage. Les premiers tests sont ainsi très concluants puisque les femelles ont gagné une demi-classe, passant de R=/R+ à R+/U- pour 460 kilos carcasse. Toutes les vaches vont désormais être finies avec ce mélange. L’objectif à l’avenir est d’obtenir des carcasses de 500 kilos tout en conservant des facilités de naissance (IFNAIS 105,8) », poursuit l’éleveur.

« Certes, je suis passionné de génétique, mais j’estime que sans valorisation de la viande, on ne peut pas faire de génétique. C’est pourquoi je suis engagé dans l’organisme commercial de l’AOP Maine Anjou, l'Adema. »

Une conduite en vêlage 30 mois

Le troupeau est dorénavant conduit en vêlage 30 mois. « J’ai eu recours au vêlage 24 mois pour accroître plus rapidement le cheptel. C’est une pratique très stricte qui demande beaucoup de temps. Il fallait faire vêler 40 à 50 génisses par an. C’est pourquoi je ne continue pas. » La première période de vêlages se concentre de début août à mi-septembre. La seconde, du 20 janvier au premier avril. Le troupeau est principalement conduit en monte naturelle. Les génisses sont mises à la reproduction avec un mâle non porteur du gène culard et avec un index facilité de naissance élevé. Seules quelques vaches sont inséminées, notamment celles mettant bas à la fin de l’été.

« J’utilise 20 à 25 IAP de testage par an, car j’estime que les futurs champions se trouvent parmi ces taureaux. Sur les quatre taureaux présents actuellement, deux sont nés sur l’exploitation, un a été acheté sur un concours et un en station où je mets et j’achète régulièrement des taureaux. Deux des principaux taureaux d’insémination sont nés ici (Dacodac et Erudi). Je suis par ailleurs très sélectif sur leur choix. Tout d’abord, l’index sur ascendance doit être bon. Ensuite, je recherche un animal avec du dos, de la longueur, de la finesse d’os et bien entendu des qualités de race et si possible de la taille. Je fais également attention aux bassins sans oublier les qualités maternelles. J’essaie par ailleurs d’avoir un maximum de diversité génétique pour répondre à toute demande des clients qui souhaitent des reproducteurs. Le mâle non porteur du gène culard avec de la viande reste le plus brigué. Toutefois, j’accouple également des vaches avec des taureaux porteurs homozygotes », souligne Anthony Gervais.

Une alimentation 100 % herbe pour les mères

Tous les vêlages de fin d’été ont lieu à l’abri. L’éleveur dispose d’un outil d’aide à la détection des vêlages qui le prévient lors de la perte de la poche des eaux. Les veaux sont rentrés à partir du 15 octobre. Ils sont alors déparasités, vaccinés contre la grippe, écornés et pesés. Ils resteront dès lors en tétée contrôlée matin et soir jusqu’au sevrage. À la pesée de début décembre, les veaux sont également tondus et vaccinés contre les infections respiratoires. À la pesée de janvier, le rappel est réalisé. En février, tous les veaux de plus de 280 kilos sont sevrés. Les poids des mâles à 210 jours sont de 340 kilos. Ceux des femelles de 285 kilos.

« Les vaches rentrent et sortent matin et soir, ce qui est idéal pour l’observation des chaleurs. Au 20 octobre, elles sont remises à la reproduction. Pendant trois semaines elles sont inséminées. Ensuite, deux lots sont faits en fonction des taureaux pour les retours », explique l’éleveur. Des échographies sont systématiquement réalisées entre 30 et 95 jours. Les vides sont réformées. L’âge et le lait sont également des causes de réforme.

Les femelles hors engraissement sont nourries uniquement à l’herbe. L’hiver, la ration se compose d’enrubannage et de foin. Les quantités et qualités des fourrages distribués sont ajustées en fonction de la catégorie des animaux. « Les bouses sont un excellent indicateur. Je ne donne pas de complément azoté. Par contre, je mets un bloc à lécher (minéraux) un mois et demi avant la mise-bas. " Aujourd’hui, les veaux sont complémentés avec des céréales (60 %) et un aliment azoté (40 %). Le but étant à terme d’utiliser le mélange pois/orge.

Une génétique valorisée en AOP et par la vente de reproducteurs
Chiffres clés

En 2016

168 ha dont 129 ha de prairies (90 ha naturelles), 17 ha de mélange orge/pois et 22 ha de blé
100 vêlages, 371 jours d’IVV, taux de mortalité 7 %, vêlage à 30 mois
1,35 UGB/ha
1,5 UTH (Anthony Gervais et un salarié à mi-temps)
Avis d'expert

Nicolas Jeauneau, conseiller viande bovine à Élevage conseil Loire Anjou

« Un panel génétique important, des améliorations sur l’herbe à venir »

« Grâce à son passé de conseiller viande en centre d’insémination et à Bovins croissance, Anthony maîtrise très bien la génétique de son troupeau (IVMAT 104,8). Il n’est toutefois pas contre un avis extérieur. En attestent les nombreux échanges avec notre pointeur concernant les veaux à mettre de côté en tant que futurs reproducteurs. Aujourd’hui, le panel génétique dont il dispose lui permet de répondre aux diverses demandes des clients de la race. Autre avantage, tous ses reproducteurs sont détectés pour les gènes tourneur et culard. Il se donne également les moyens de se faire connaître au travers des concours génétiques et participe aux ventes que l’on organise. La gestion du pâturage reste cependant son point faible. Il a prévu de se pencher dessus en 2018, en mettant en place cinq paddocks pour faire tourner les lots d’animaux et ainsi assurer la qualité de l’herbe et éviter le gaspillage. »

Diversifier les débouchés

« En juin 2016, je me suis lancé dans la vente directe tout en gardant la valorisation sous AOP. Ce circuit court représente un débouché complémentaire et un moyen d’atténuer les effets des crises à venir. Je commercialise une vache 5 à 5,10 €/kg de carcasse pour rémunérer le temps passé. Actuellement, une telle bête serait commercialisée 3,70 à 3,80 €/kg de carcasse. Mon objectif est d’atteindre huit vaches par an. Pour minimiser les morceaux de deuxième catégorie dans les colis et atteindre l’équilibre carcasse, j’ai développé une gamme de produits élaborés (chili corn carne, terrine, bœuf bourguignon…) », explique Anthony Gervais. Ainsi, sur 310 kilos de viande, environ 65 kilos partent en steaks hachés et 40 kilos en produits élaborés. Pour se faire connaître, l’éleveur a organisé des marchés fermiers. Depuis la vente de la première bête en novembre, deux autres ont été valorisées par le biais de ce circuit.

Un magasin sur la ferme à l’étude

Les colis sont proposés à cinq tarifs différents, allant de 12,50 €/kg pour le colis de base à 14,50 €/kg pour un colis de 5 kilos dont 3 kilos de morceaux à griller et 2 kilos de hachés. « Les bêtes sont abattues à Bressuire et détaillées à Loublande, et les produits élaborés réalisés chez un traiteur local. Tout est effectué dans les environs. Actuellement, les gens récupèrent les colis sur l’exploitation. Je réfléchis à une possible livraison. Par contre, il est prévu d’aménager un magasin dans l’ancien local attenant à la salle de traite. Ainsi, les clients pourraient visiter l’élevage. J’avais par ailleurs démarché le Super U du secteur. Aujourd’hui, on écoule des vaches AOP de la filière, d’où la complémentarité des deux débouchés. »

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