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Le colostrum est un boost de vie pour le veau

Quand vient l’heure des vêlages et de la surveillance des veaux nouveau-nés, la buvée du colostrum est un point à ne pas négliger. Une étude s’est ainsi penchée sur la question et a relevé les pratiques dans seize élevages.

Le travail de thèse proposé par le MSD Santé Animale s’est inspiré d’une étude réalisée au Canada en 2017, sur la qualité du colostrum dans les troupeaux laitiers. Son objectif était d’effectuer une analyse comparative dans plusieurs élevages, sur les pratiques mises en place autour de la gestion colostrale, afin d’élaborer un plan d’actions personnalisé pour améliorer les performances sur le terrain.

« En France, on dispose de peu d’études sur le sujet. Aussi, 16 éleveurs d’un cabinet vétérinaire du Maine-et-Loire ont été suivis, 9 allaitants et 7 laitiers, durant trois mois, de février à fin avril 2021. Durant cette période, j’ai récolté chaque semaine les sérums des veaux nouvellement nés (entre 2 et 8 jours de vie). Les éleveurs ont de leur côté prélevé les colostrums des mères », explique Jonathan Gourdon, jeune diplômé de l’école vétérinaire de Nantes (Oniris).

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Le but était de mesurer la qualité des colostrums, de compiler les éléments avant de les comparer à des données françaises. La qualité du transfert de l’immunité passive de la mère au veau a été évaluée en mesurant la concentration sérique en immunoglobulines G. En parallèle, les éleveurs ont rempli un questionnaire pour chaque couple mère-veau prélevé afin de récolter diverses informations sur le volume de colostrum ingéré, le délai entre la naissance et les buvées colostrales…

De très bons et de très mauvais colostrums

« Les données ont été analysées de telle sorte que chaque élevage ait connaissance des points d’amélioration qui lui sont propres et la possibilité de se situer par rapport à la moyenne du groupe. » Au global, 144 sérums de veaux allaitants et 126 colostrums de mères ont été recueillis.

Côté résultats, la concentration des colostrums était meilleure chez les vaches allaitantes que pour les laitières. Chez les éleveurs allaitants enquêtés, la moyenne des immunoglobulines (Ig) s’affichait à 99 g/L. Ce résultat est conforme aux attentes et très proche des données de la bibliographie (moyenne à 100 g/L). « Cependant, plus le colostrum est concentré, plus le veau profite de l’immunité passive transmise par sa mère. D’ailleurs, dans d’autres régions, l’objectif des éleveurs se situe au-delà de cet indicateur de 100 g/L. Par exemple, lors d’un stage dans le bassin charolais (une vingtaine de colostrums prélevés), la moyenne des immunoglobulines atteignait 157 g/L. Ainsi, entre deux bassins de production, il est possible d’observer de grosses différences. »

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De plus, cette moyenne cache de grandes disparités, avec des colostrums allant de 26,5 à 205 g/L. « On a rencontré du très bon comme du très mauvais et ce, dans chacune des exploitations. L’apport en supplémentation n’était pas un critère de variation car presque tous les éleveurs y avaient recours », observe le thésard.

60 % des colostrums en dessous de 100 g/L

Les vaches ont pu être classées en quatre catégories, selon la qualité du colostrum. Une pour les colostrums à moins de 80 g/L, une pour ceux entre 80 et 100 g/L, une pour ceux entre 100 et 140 g/L et une pour ceux supérieurs à 140 g/L. L’autre point marquant de cette étude est le pourcentage de colostrums en dessous du seuil de référence pour un colostrum dit de qualité, soit 100 g/L. En effet, 34 % des résultats se trouvaient en dessous de 80 g/L et plus de 60 % en dessous de 100 g/L. On notera également une meilleure qualité des colostrums pour les multipares que pour les primipares sans que les différences soient significatives.

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« La qualité n’est toutefois pas une fin en soi si le transfert vers le veau est assuré correctement. » Il est, rappelons-le, essentiel que le veau boive en quantité et ce, dans ses premières heures de vie quand on sait que son intestin peut absorber les immunoglobulines uniquement au cours des 24 premières heures après la naissance. De ce fait, il est important de surveiller la prise colostrale et de ne pas hésiter à intervenir pour faire boire un veau rapidement et en quantité. « Le colostrum est un boost de vie. Le nouveau-né se relève mieux, plus rapidement et retourne boire plus vite après avoir pris le colostrum. »

Surveiller la prise du colostrum

La surveillance de la prise colostrale est la première des bonnes pratiques à mettre en place. « Durant l’étude, on s’est rendu compte que les éleveurs qui intervenaient, ne distribuaient que de faibles quantités de colostrum (- d’un litre). Un seul veau a bu plus de 2 litres. Or, les travaux de recherche montrent qu’un veau peut boire volontairement plus de 2 litres. Donner un litre n’est pas suffisant et quitte à prélever autant le faire un maximum. En allaitants, je conseille de distribuer 2 à 3 litres de colostrum. » À la sonde ou au biberon, c’est une question de préférence, l’efficacité est identique.

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« Un éleveur qui veut améliorer ses pratiques peut tester la qualité des colostrums, congeler le surplus des bons pour se créer une banque colostrale. Si l’un d’entre eux n’est pas optimal, le veau peut le boire et l’éleveur le compléter avec du congelé. En allaitants, cette pratique est souvent réservée aux jumeaux, vêlages difficiles. Il est plus important de combler un défaut de volume que de qualité », argumente Jonathan Gourdon, avant de poursuivre, « l’utilisation d’un sachet en plastique spécifique plutôt qu’une bouteille en plastique, réduit le temps de décongélation. » La température lors de cette opération ne doit pas dépasser 50 à 60 degrés pour ne pas dénaturer les anticorps.

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L’environnement de naissance représente également un critère essentiel. L’ambiance autour du vêlage doit être maîtrisée. Dans l’étude, les exploitations disposaient toutes d’une case de vêlage. Enfin, une bonne préparation au vêlage n’est pas à négliger. Elle comprend l’alimentation, la vaccination, la minéralisation…

« Certes, il est facile de faire des recommandations, pas toujours facile de les mettre en application selon la période de vêlage, les infrastructures et la main-d’œuvre disponible. »

Suite à venir

L’an prochain, les éleveurs se verront proposer de nouveaux prélèvements de colostrums et de sérums pour valider l’impact de l’amélioration de leurs pratiques. Une belle manière de démontrer qu’ils sont aux commandes de la qualité du transfert colostral et que les impacts positifs sont visibles à court, moyen et long termes à l’échelle de l’élevage (santé, production, économique).

Défaut de transfert, un impact sur le long terme

Un défaut de transfert de l’immunité passive de la mère à son veau se retrouve dans la vie de ce dernier à partir de 10 à 15 jours et jusqu’à 6 mois-1 an. C’est un risque augmenté de deux à trois fois de développer une maladie ou de mourir. Les risques de morbidité sont également augmentés. « Le transfert colostral est un prérequis à l’élevage. Investir du temps au départ c’est en gagner par la suite ! », insiste Jonathan Gourdon.

Avis d’éleveur - Benjamin Chaignaud, naisseur-engraisseur, en Gaec avec sa mère, Maine-et-Loire

« Je surveille davantage les mises bas »

« Les 85 vêlages de nos charolaises et de nos limousines ont lieu sur deux périodes de vêlages. Les deux tiers des mises bas ont lieu à l’automne, du 15 août au 10 octobre, les autres au printemps, du 1er février au 10 avril. Sur cette seconde période nous avons, dans le cadre de l’étude, prélevé le colostrum des deux tiers des mères pour en tester la qualité. Je possède un réfractomètre, je testais en priorité le colostrum des vaches qui nécessitaient une aide au moment du vêlage. J’ai eu des colostrums à plus de 30 brix et d’autres à moins de 15. Dans ce cas, je surveillais davantage la prise colostrale du veau. Avec l’enquête, les vaches étant prises, j’en ai profité pour tirer un litre de colostrum et le distribuer aux veaux nouveau-nés, principalement au biberon, dans les premières heures de vie. J’ai constaté une nette amélioration sur les problèmes de diarrhées néonatales et les gros nombrils. Les veaux sont également plus vigoureux et vont téter plus vite. À l’avenir, je compte porter une attention toute particulière à ce moment crucial et ne pas hésiter à tirer le colostrum de la mère pour le donner au veau en cas de nécessité. Certes, cela demande un investissement en temps mais il est largement compensé par la suite. »

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