Des vaches « P » guère appréciées

On n'attire pas les mouches avec du vinaigre et on n'incite pas un consommateur à réitérer ses achats de viande bovine s'il se casse régulièrement les dents sur les steaks qu'il met dans son assiette. Toutes les enquêtes le démontrent, « la première demande du consommateur porte sur la tendreté du produit. Les aspects flaveur et jutôsité viennent après », expliquait Gérard Cladière, directeur des achats produits carnés pour le groupe Carrefour, lors d'un atelier sur la segmentation des viandes dans les rayons en libre-service de la grande distribution organisé dans le cadre du dernier congrès de la Fédération nationale bovine. « Chez Carrefour, nous avons opté pour une durée minimale de maturation : au moins 12 jours pour toutes les viandes proposées en filière qualité. » Un délai qui ne concerne pas la gamme premier prix et les promotions. Un temps de maturation suffisant est une donnée clé pour arriver à un niveau de tendreté satisfaisant. Ce n'est pas le seul. Le niveau de finition a également toute son importance.
Imposer un niveau qualitatif minimum
Loin de remettre en cause la qualité des vaches laitières finies et abattues dans le cadre des filières qualité en race Normande et Montbéliarde telles qu'elles sont commercialisées dans certains magasins de l'enseigne Carrefour, Gérard Cladière a en revanche annoncé qu'il avait décidé d'exclure de ses linéaires les muscles tranchés issus de vaches « P », insuffisamment finies. « 90 % des viandes que nous vendons en promotion c'est de la vache laitière. Il faut que l'on s'impose un niveau qualitatif minimum sur ces produits. » Et de critiquer vertement certaines réformes laitières qui, sans même parler d'un ou deux mois de finition après tarissement, passent du jour au lendemain directement du quai de traite à l'abattoir. Remarque également valable pour certaines allaitantes âgées et usées, elles aussi abattues sans finition préalable.
Autant d'animaux dont le niveau qualitatif insuffisant incite malheureusement le consommateur à privilégier la viande d'autres espèces après une mauvaise expérience avec des steaks de piètre qualité. « Les muscles de ces animaux gagneraient à ne plus être considérés comme de la viande de boucherie destinée à être vendue comme muscles tranchés », confirmait Henri Gabriel secrétaire général de la Fédération nationale de l'industrie et des commerces en gros de la viande, lui aussi participant à cette rencontre. Et de souligner que pour ce type d'animaux, l'intégralité des muscles de la carcasse gagneraient à être orientés sur le seul créneau de la fabrication afin de ne pas prendre le risque de décevoir les consommateurs.