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Bâtiment d’élevage : « J’ai choisi une stabulation en bois abritant fumière et fabrique d’aliment »

À la ferme Les Bordes dans le Tarn, Sandrine Chambert-Cayre vient d’acquérir un nouveau bâtiment tout en bois avec stabulation allaitante, fumière et fabrique d’aliment intégrées. Il est en partie financé par la vente de l’électricité photovoltaïque.

Éleveuse de trente-cinq vaches de race blonde d’Aquitaine, limousine et croisées en système veau sous la mère à Saint-Martin-Laguépie dans le Tarn, Sandrine Chambert-Cayre réfléchissait depuis son installation en 2007 à faire construire un nouveau bâtiment. Ce projet a constitué des années de cheminements et de réflexions jusqu’à sa prise de décision en 2019. Elle s’est tournée vers l’entreprise bretonne Roiné. « L’entreprise a répondu à mes souhaits en restant dans mes moyens financiers. J’ai pu loger tous mes animaux confortablement, disposer d’une fumière couverte, obtenir la fabrique d’aliment avec le stockage de céréales et aliments sous le même toit et mettre 500 m2 de panneaux photovoltaïques sur fibrociment, sur le pan sud en désaxant le faîtage », explique l’éleveuse.

Ergonomie de la circulation

Accompagnée tout au long du projet par la chambre d’agriculture du Tarn et aidée par une ergonome de la MSA chargée du confort au travail, Sandrine a réfléchi à l’optimisation de la circulation dans le bâtiment. « J’avais beaucoup de difficultés à travailler dans l’ancien qui était trop petit. Aujourd’hui, je peux faire le tour des animaux à pied pour les surveiller en toute sécurité et j’ai moins de vêlages en catastrophe. »

Le bâtiment est conçu pour 42 mères et « vu le climat, je ne vais pas avoir plus d’animaux que je ne peux nourrir ». L’accès sur les trois côtés (est, nord, ouest) a été calculé pour pouvoir passer avec un tracteur ou un camion, avec un chemin de 10 mètres de large. Au sud, l’auvent mesure 4 mètres de large et 3,25 mètres de hauteur sous pente. La circulation autour des animaux fait un mètre de large de façon à s’y déplacer avec la brouette. Les côtés ouest (côté fumière) et est (côté animaux) sont dotés de portails avec vantaux coulissants (passage de 5 x 4 mètres).

Poteaux et charpente en bois massif

La charpente du bâtiment est en bois massif construite par assemblage boulonnerie. L’éleveuse pensait au bois depuis longtemps : « J’avais visité des bâtiments qui me plaisaient, et j’avais aussi lu des articles sur les problèmes de champs magnétiques sur les animaux en lien avec les bâtiments métalliques qui pourraient former des cages de Faraday. » « Le métal transporte beaucoup d’ondes et la mise à la terre est plus complexe, alors que le bois est un isolant phonique, thermique et il absorbe l’humidité », détaille Denis Favé, le chargé d’affaires Roiné qui a accompagné Sandrine dans l’aménagement de son bâtiment. Les poteaux sont en bois de douglas sur socle béton. « Cette essence a une particularité mécanique et sa densité est suffisante pour résister à une construction », reprend-il. Le reste est fait en épicéa, qui est un bois très facile à travailler, utilisé aussi pour le bardage en résistance classe 3 pour les intempéries extérieures (recouvrement du bardage de 5 centimètres sur maçonnerie). « La seule conséquence, c’est qu’il va griser sur l’extérieur », ajoute Denis Favé.

Le bâtiment est équipé de trois lampes d’éclairage type palette LED sur l’aire paillée et des tubes LED sur les deux couloirs d’alimentation. « Je voulais un bon éclairage sur les couloirs d’alimentation et au milieu, qu’il n’y ait pas trop de zones d’ombre et pouvoir laisser allumer certaines lumières comme le box de vêlage. »

Des cases et boxes modulables

Le bâtiment de 1 190 m² est composé de trois murs avec ouverture côté sud et est divisé en trois parties : la FAF, la fumière intégrée et la stabulation avec les boxes à veaux et la case de vêlages. Le bâtiment comporte six travées occupées par les animaux ainsi que les deux couloirs latéraux. D’est en ouest, il en compte un de 6 mètres, quatre de 5 mètres, un de 6 mètres et deux de 5 mètres. « Les cases modulables sont actuellement divisées toujours d’est en ouest par un box de tri dans une travée pour la pesée et le chargement, un box sur deux travées pour les gros veaux mâles, un box sur deux travées pour les petits et les femelles, ainsi qu’un box de vêlage sur une travée. » Deux boxes supplémentaires peuvent être faits en divisant par deux les boxes où se trouvent les veaux en ajoutant deux barrières. « L’idée était que ce soit le plus modulable possible et que cela permette au vétérinaire d’y avoir accès plus facilement. »

L’éleveuse a souhaité installer le stockage de l’alimentation à l’intérieur du bâtiment pour le confort de travail et pour pouvoir le faire évoluer vers un distributeur. « Avant, je l’avais loin du bâtiment et il fallait faire démarrer le tracteur à chaque fois. Maintenant je fais tout à la brouette et je circule plus librement. »

Située en zone vulnérable aux nitrates, Sandrine a aussi souhaité une fumière intégrée pour une gestion plus simple des effluents. « Je voulais que la fumière soit le plus loin possible des voisins et à côté d’un portail pour y avoir accès côté ouest. » La présence de la fumière à l’intérieur du projet de bâtiment a généré des aides du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations (PCAE) qui ont permis à Sandrine d’obtenir 30 % d’aides pour le bâtiment et 60 % pour la gestion des effluents. Ainsi, sur les 1 190 m² total du bâtiment, 110 m² (fumière et couverture) ont été aidés à 60 %.

Désormais, Sandrine peut bloquer toutes les vaches au cornadis et se sent plus en sécurité. « Avant, une partie du troupeau était dehors et pour les vêlages ce pouvait être rocambolesque. »

Bien se préparer mentalement à la conduite du projet

D’après l’éleveuse, beaucoup de travail demeure invisible, mais nécessaire : « Le travail avec le coach en entreprise m’a aidé à organiser les actions à entreprendre pour me sécuriser et sécuriser l’entreprise. Le travail avec la juriste, le banquier, les artisans, les échanges avec les techniciens pour le bâtiment et pour la centrale… tout cela est important. Et les non-aboutissements précédents ont chacun apporté des connaissances supplémentaires à ce projet. »

L’éleveuse conseille aussi de « connaître les échéances et les impératifs des artisans, et prendre en compte que chacun a les siens : les subventions de la Région, Enedis, EDFOA, les artisans entre eux et leurs bonnes coordinations, il faut aligner les planètes ! Et une marge de manœuvre est à prévoir, car le climat peut perturber le chantier. Je suis anxieuse de nature, il a fallu contrer mes peurs et les vaincre. Il faut bien préparer sa tête et ne pas se laisser démonter. Le diable se cache dans les détails, il faut se préparer mentalement et accepter que tout ne soit pas parfait. »

« Il faut penser outil de production avant le photovoltaïque »

L’installateur de Sandrine Chambert-Cayre ne possédant pas la garantie décennale pour poser les panneaux sur du fibrociment, l’éleveuse s’est tournée vers la Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) Sud Solar System basée à Foix en Ariège. L’électricité produite par la centrale solaire de 100 kilowatts crête (kWc) en propriété est revendue au tarif de 0,0936 €/kWh produits.

« Enedis transporte et régule le réseau d’électricité, EDF OA (EDF obligation d’achat) achète l’électricité et la revend. Le prix de rachat de l’électricité dépend du moment où la demande de raccordement a été réputée complète auprès d’Enedis. Je suis tombée lorsque le niveau était très bas, aujourd’hui il est un peu plus haut », ajoute Sandrine qui estime que la partie solaire sera remboursée d’ici à sept ans. Les panneaux solaires ont rapporté 12 783 euros la première année. « Cela dépend du soleil et de l’entretien. »

« À aucun moment il ne faut parler de photovoltaïque lorsqu’on décide de construire un bâtiment d’élevage. Il faut en priorité penser à son bâtiment en matière d’outil, d’ergonomie, de ventilation, de luminosité et en dernier on pense au photovoltaïque, car il est un très mauvais guide. C’est de cette manière que les projets auront du sens, car chaque agriculteur a ses problématiques qui lui sont propres et des besoins, et le bâtiment doit y répondre », appuie David Brus, le directeur de Sud Solar System. « Nous ne pouvons pas rentrer dans des standards dans le photovoltaïque, il faut avoir une vraie approche fonctionnelle du bâtiment avec une compatibilité avec le photovoltaïque. »

Chiffres clé

  • 35 vaches allaitantes
  • 25 veaux élevés sous la mère
  • 42 ha de prairies permanentes et temporaires, et de bois pâturés, autonomie fourragère
  • 3 à 6 ha de céréales méteil grain avec blé, triticale, orge, pois, avoine

Côté éco

  • ≃ 182 000 € HT pour le bâtiment et l’aménagement intégral
  • 94 255 € HT pour la partie photovoltaïque (centrale + raccordement + mise en service)
  • 135 000 € d’emprunt à 1,20 % sur 20 ans pour le bâtiment
  • ≃ 45 000 € d’aides dont 1 400 € de la MSA
  • 91 000 € à 1 % sur 15 ans
  • 942 € d’assurance par an pour la perte de production de la centrale
  • Entre 500 et 600 € de maintenance par an
  • ≃ 600 € de frais Enedis
  • 0,0936 €/kWh : tarifs de rachats de l’électricité
  • 17 475 € pour le raccordement de l’installation photovoltaïque et 76 195 € pour le coût de la centrale
Rédaction Réussir

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