Xavier Beulin : "Il ne supportait pas que la valeur ajoutée soit confisquée aux agriculteurs"
C'est quelques jours après avoir annoncé sa volonté de briguer un nouveau mandat comme président de la FNSEA que Xavier Beulin est décédé d'une crise cardiaque.
L'information est tombée dimanche en fin de journée dans les rédactions et dans le réseau syndical des FDSEA, suscitant une vive émotion et laissant sous le choc de nombreux responsables agricoles. Président en exercice de la FNSEA, Xavier Beulin est en effet décédé brutalement, dans la nuit de samedi à dimanche à l'âge de 58 ans. Un décès qui intervient moins d'une semaine avant l'ouverture du Salon international de l'agriculture et à un mois d'un congrès de la Fédération nationale, à la tête de laquelle Xavier Beulin avait choisi de se représenter. Les réactions ont été multiples dans la sphère agricole et politique, François Hollande évoquant "une perte majeure pour la France".
Quels sont pour vous les éléments saillants de la personnalité et de l'action de Xavier Beulin ?
Patrick Bénézit, président de la FDSEA du Cantal et de la FRSEA Massif central, qui côtoyait chaque semaine Xavier Beulin au bureau de la FNSEA :
"C'est quelqu'un qui avait une vision économique correspondant à la période dans laquelle on vit. Quelqu'un qui ne supportait pas que la valeur ajoutée soit confisquée au monde agricole, c'était ça son moteur, même s'il ne recherchait pas des outils du passé pour régler ces problèmes mais des moyens pas forcément compris de tous, qui demandaient une organisation comme Sofiprotéol. Son expérience à Sofiprotéol, qui, rappelons-le, a été créée pour gérer les marchés des oléoprotéagineux, était d'une grande importance pour nous."
Patrick Escure, ancien président de la FDSEA et président de la Chambre d'agriculture :
"C'était quelqu'un d'une très grande intelligence. Un très grand président de la FNSEA qui représentait tous les agriculteurs, tous les territoires, dont les compétences et les positions étaient reconnues et attendues bien au-delà de nos frontières, au niveau européen et international. Ce qui m'a frappé chez lui, c'est sa capacité, avec ses collègues agriculteurs de la filière des oléoprotéagineux, à s'organiser pour être maîtres du prix de leurs produits. Il se sont regroupés, ont repris des marques qui auraient pu finir entre les mains de capitaux étrangers, comme Lesieur, ils ont su se diversifier. C'est comme si nous, éleveurs, on se posait la question de reprendre Bigard ou Lactalis ! C'est notre grand regret : de n'avoir pu faire aboutir ce chantier dans l'élevage en bénéficiant de ses compétences..."
On vous sent encore profondément ému...
P. B. :"J'avais un grand respect pour l'homme, pour sa vision économique, pour la rapidité avec laquelle il comprenait les choses avec toujours le souci de ramener cette valeur ajoutée vers les agriculteurs. Ce qui a été le cas au moment des grandes manifestations qu'on a vécues depuis deux ans. Ça a aussi été le cas après. On s'est battu ensemble sur la réécriture de la loi Sapin et il a très fortement appuyé les travaux ouverts en particulier pour réintégrer les coûts de production dans les contrats. Il était par ailleurs très actif sur un autre sujet qui nous tient à coeur : faire en sorte que les agriculteurs puissent bénéficier d'une exception au droit de la concurrence." P. E. : "C'est quelqu'un avec lequel j'ai beaucoup apprécié de travailler. C'est un collègue dont on partageait les valeurs qu'on perd. On a conduit les mêmes combats... Après Jean-Michel Lemétayer, c'est très dur à avaler... On pense aussi bien sûr à sa famille."
Certains éleveurs avaient du mal à s'identifier à un président de la FNSEA, issu d'une région de grandes cultures.
P. B. : "On n'a jamais eu une réforme de la Pac aussi favorable à l'élevage que sous son mandat ! Il a défendu l'élevage. Sa vision économique et son combat pour la répartition de la valeur ajoutée concernent grandement les productions animales. C'est aussi pour ça qu'on a du mal à reconnaître l'homme qu'on côtoyait dans la vision caricaturale véhiculée par certains médias."
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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