Un éleveur condamné à verser 8 000 € à ses voisins
La cour d’Appel de Limoges invoque des nuisances olfactives liées à des bottes d’enrubannage pour condamner l’éleveur de Lacapelle-Viescamp.
Cette fois, c’est fini : dans le cadre du conflit qui l’opposait à ses voisins depuis maintenant dix ans, Nicolas Bardy vient de se voir condamné par la cour d’Appel de Limoges¹ à verser à ces derniers 8 000 € pour des nuisances olfactives qu’auraient générées des bottes d’enrubannage stockées à l’extérieur de son bâtiment traditionnel, en face de la maison du couple de plaignants. Cette décision de justice intervenant en appel de la cour de Cassation (dont le rendu en juin avait été favorable à l’exploitant), l’éleveur de Lacapelle-Viescamp n’a aujourd’hui plus de recours et devra donc s’acquitter de cette somme à laquelle s’ajoutent plus de 5 000 € de frais d’avocat. « Au bout de dix ans de procédure, ce n’est plus de la colère que j’éprouve, je suis tout simplement dépité par cette décision injuste et révoltante », se désole Nicolas Bardy. D’autant plus injuste que l’éleveur de bovins et lapins a tout fait pour tenter de minimiser les supposées nuisances de son activité agricole. Ainsi, dans une semaine, ses salers entreront dans le bâtiment neuf qu’il s’est résolu à faire construire à l’extérieur du village de Jallès, les plaignants ayant fait valoir devant la justice le fait que le bâtiment jusqu’alors utilisé par l’éleveur avait une vocation de stockage et non d’étable. « Qu’on soit condamné parce que, le temps que la nouvelle stabulation se fasse, on a continué à utiliser ce bâtiment au lieu de laisser les animaux et les petits veaux dehors l’hiver, à la rigueur, on assumerait. On l’a fait en connaissance de cause sachant qu’on était hors la loi, explique Nicolas. Mais là, on nous reproche des nuisances qu’ils n’ont jamais réussi à faire établir. Le seul élément du dossier sur lequel s’appuie la cour d’Appel c’est un constat d’huissier, un seul en dix ans, lequel avait déclaré avoir senti un peu l’odeur d’enrubannage ! » Voilà sur quoi repose aujourd’hui la condamnation du Gaec.
Pas à l’abri de nouvelles plaintes
Au-delà de l’absurdité et de la légèreté du motif de l’accusation retenue, ce qui révolte l’agriculteur, c’est que cette décision de justice pourrait tout à la fois servir de jurisprudence et, surtout, laisse la porte ouverte à d’autres procédures. « Rien n’empêche demain mes voisins de porter à nouveau plainte parce qu’un tracteur démarre trop tôt, que la tronçonneuse fait trop de bruit, tout peut être sujet à nous faire poursuivre de nouveau ! On ne va pas passer notre vie à nous défendre de travailler ! » Amers, Nicolas Bardy et sa mère, associée du Gaec, n’ont d’autres choix que de payer. S’ils peuvent compter sur les 3 300 € récoltés par une cagnotte solidaire Leetchi mise en ligne et toujours ouverte, il va falloir trouver 10 000 € alors même que les cours du broutard comme des vaches sont au plus bas.
Tout ça « parce que des gens qui ont du temps et un peu d’argent ont décidé d’empiler les procédures pour nous empêcher de faire notre métier ». Le bon sens paysan – comme l’activité agricole – est décidément mis à rude épreuve.
1. Dans un premier jugement, le tribunal d’Aurillac avait débouté les plaignants, en appel, la cour de Riom avait condamné le Gaec de Jallès à délocaliser son bâtiment sous peine d’une astreinte journalière. Jugement qu’avait infirmé la cour de Cassation qui avait, en juin dernier, donné raison à l’éleveur.