Hésitations européennes sur la déforestation importée
Alors que la France et l’Union européenne planchent depuis 2018 pour éviter la déforestation importée, ces travaux n’ont encore mené à aucune politique claire, ni aucun outil concret. La Commission européenne doit faire de nouvelles propositions en mars dans le cadre de la stratégie « De la fourche à la fourchette », mais elle pourrait être échaudée par le conflit en cours à l’OMC face à l’Indonésie sur l’huile de palme.
Face au déclin des politiques brésiliennes, la France et l’Union européenne sont poussées à agir par elles-mêmes, et tâtonnent. La France s’est dotée en 2018 d’une Stratégie nationale sur la déforestation importée (SNDI), qui vise à « mettre fin en 2030 à l’importation de produits forestiers ou agricoles non durables contribuant à la déforestation ». Cette politique, explique le gouvernement dans un document de synthèse, trouve son origine dans les négociations de l’accord de Paris et dans les accords dits « d’Amsterdam » contre la déforestation, signés en décembre 2015 aux côtés de six autres pays, dont le Danemark, l’Allemagne, ou encore la Norvège.
Mais le dossier semble enlisé, selon les associations de l’environnement qui n’ont oublié ni cette stratégie, ni les objectifs qu’elle fixe au gouvernement. « On ne sait toujours pas ce que le gouvernement français compte faire », déplore Cécile Leuba, chargée de campagne Forêts chez Greenpeace France. Dès novembre 2019, à date anniversaire de la SNDI, son association a interpellé le gouvernement français, sans succès. Car début 2020, ni les moyens, ni les outils de la SNDI ne sont précisés. Mais ils devront l’être dans le courant de l’année, si le ministère de la Transition écologique respecte l’engagement pris lors de la publication de la stratégie, de faire « un point d’étape particulier en 2020 ».
Ce sont sans doute les feux en Amazonie à l’été 2019, et les échanges tendus avec le Brésil, qui ont conduit le gouvernement à ranimer début 2020 la SNDI. Fin janvier, un nouveau comité technique et scientifique mobilisant le Cirad, les importateurs, et les ministères de l’Agriculture et de la Transition écologique, s’est donc réuni sous l’égide de l’Agence française de développement (AFD), pour travailler sur une définition précise de la déforestation et de ses outils de suivis, mais également sur l’intégration des labels dans de futurs projets territoriaux. « Même s’il y a une participation importante, le portage politique de la SNDI reste faible », juge pour sa part Frédéric Amiel, chercheur à l’Iddri. Et pour l’heure, complète Plinio Sist, directeur de l’unité forêt au sein du Cirad, les travaux consistent en « une phase de production de connaissance, qui pourrait aboutir en fin d’année ».
Article à lire dans le Réveil Lozère n°1551, du 12 mars 2020, en page 10.