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« Éleveurs, ne cédez pas à la pression des opérateurs »

Jonathan Janichon, éleveur dans l'Ain et président de la section régionale bovine d'Auvergne Rhône Alpes explique en quoi la baisse des prix des jeunes bovins, constatée depuis plusieurs semaines, est infondée.

Depuis la première semaine de mars, le prix du jeune bovin viande (catégorie U) a baissé de 29 centimes. Comment expliquez ce recul ?

Jonathan Janichon : Elle est à nouveau le fruit d'une stratégie dangereuse conduite par les opérateurs qui consiste à mettre la pression pour que le prix du jeune bovin et dans son sillage celui du broutard diminuent. Cela est forcément contre-productif puisque si nous voulons maintenir la production de viande bovine malgré la baisse du troupeau, il est indispensable de conserver des prix à la production dynamique. En effet, alors que l’aval de la filière veut stimuler les mises en place en France pour dynamiser la production française, en cohérence avec le marché de jeune bovin, en France et en Europe, qui est resté attractif et porteur depuis le début d’année, il est inadmissible que certains opérateurs continuent de faire pression à la baisse sur les prix, gardant les mauvaises habitudes de servir des éleveurs comme variable d’ajustement.

Que disent les indicateurs de marché de la filière viande bovine ?

J.-J.  Lors du premier confinement de la crise du covid, les acteurs de la filière ont convenu de la nécessité de mettre en place un suivi objectif, chiffré, du marché du jeune bovin, qui s’appuie sur les effectifs présents. L’indicateur, créé en 2020, permet de constater le rythme de sortie des jeunes bovins, et de le comparer à la dynamique attendue compte tenu des animaux présents en ferme. D’après cet indicateur, la production de jeunes bovins devrait être maintenue en 2024 grâce aux mises en place qui ont été dynamiques sur le territoire national, et malgré la baisse des naissances (les exports ayant été réduits). De plus, en cumul sur les vingt premières semaines de l’année, les sorties de jeunes bovins sont tout à fait conformes à ce qui était attendu, avec des moyennes de poids et âges qui restent habituels, ce qui est synonyme de marché dynamique, avec une bonne demande. Au regard des éléments de marché, nous sommes en position de force pour négocier. Ce n'est pas le moment de lâcher sur les prix alors que les charges sur les exploitations demeurent à des niveaux historiquement hauts.

Qu'en est-il du niveau de consommation de viande ?

J.-J.  Beaucoup d'opérateurs se cachent derrière le pouvoir d'achat des consommateurs pour réclamer des baisses de prix. Or, selon les dernières études, depuis 2019, les salaires ont suivi en moyenne le niveau d'inflation. Aujourd'hui, la baisse de la consommation est due au manque de matière avec un export qui tend à diminuer. En effet, d'autres pays européens rencontrent des difficultés d'approvisionnement donc eux-mêmes ont des difficultés à exporter de la viande à bas prix. En conséquence, les marchés européens du jeune bovin sont restés très porteurs sur le début d’année, en particulier sur le pourtour méditerranéen, également tiré par le marché espagnol. Ainsi les cours européens sont restés fermes, avec par exemple un jeune bovin italien « charolais extra » (cotation de Modène) à 6,29 €/kg C.

Lire aussi : retrouvez les indicateurs de marché de la semaine 23

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