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La technologie au service de l’autonomie protéique

Le projet Vocalim a étudié de nouvelles stratégies pour améliorer l’utilisation de matières premières locales dans l’alimentation des volailles.

La concentration en protéines des tourteaux de tournesol et de colza permettraient une amélioration notable de l'autonomie protéique pour l'aliment non OGM. © P. Cronenberger
La concentration en protéines des tourteaux de tournesol et de colza permettraient une amélioration notable de l'autonomie protéique pour l'aliment non OGM.
© P. Cronenberger

L’autonomie protéique de l’alimentation des volailles est en France de l’ordre de 40 %, mais des procédés technologiques nouveaux appliqués aux matières premières végétales permettraient d’utiliser plus et mieux les ressources locales, en lieu et place de matières importées. Tel est l’un des enseignements du projet de recherche Vocalim qui a mobilisé de nombreux partenaires de la recherche, mais aussi du développement et de l’enseignement agricole (1), de 2016 à 2019. Ainsi, le blutage concentre les protéines en séparant les particules de très petite taille (fraction protéique) et des particules plus grosses (fraction fibreuse). Ce procédé améliore la quantité et la digestibilité des acides aminés dans les fractions enrichies en protéines de colza et de tournesol chez le poulet de chair. Le dépelliculage du colza et le décorticage du lupin s’avèrent également très pertinents pour améliorer la valorisation des matières premières par les poulets. L’augmentation de la teneur en fibres permet de limiter l’occurrence et la gravité des pododermatites, sans dégrader les performances de croissance.

Un scénario autonomie protéique 2023 optimiste

Fort de ces résultats, une simulation sur le niveau d’utilisation de ces matières premières modifiées a été réalisée à l’horizon 2023, à l’aide du modèle « Prospective aliment » du Cereopa. Ce modèle permet d’évaluer le potentiel d’utilisation des matières premières pour les différentes productions animales. Trois tourteaux améliorés ont été testés : le tourteau de tournesol bluté riche en protéines, le tourteau de colza bluté et le tourteau de colza dépelliculé, en comparaison des tourteaux classiquement utilisés. L’autonomie protéique de la filière poulet de chair gagne 17 points grâce aux deux tourteaux de tournesol riche en protéines bluté et de colza dépelliculé, tout en prenant en compte une évolution de la demande en produits animaux non OGM d’ici 2023. Patricia Le Cadre, du Cereopa, explique « qu’avec une autonomie protéique de la filière volaille estimée à 43 % en 2023, c’est le segment volailles qui profite le plus de ces nouvelles matières premières (+ 13 points) parmi toutes les filières animales, suivi par les vaches laitières, les porcs et les bovins viande. Mais attention, les matières premières mises à disposition participent uniquement à améliorer l’autonomie protéique des aliments non OGM. En poulet, on arrive à 91 % d’autosuffisance en aliment non OGM contre seulement à 51 % sans ces matières premières testées. » Un scénario 2023 optimiste donc, qui permettrait de réduire aussi le coût alimentaire de 2,8 %, soit 28 millions d’euros. Il reste à voir si les volumes seront au rendez-vous avec une valorisation suffisante de ces tourteaux et des fractions moins riches en protéines attenantes.

(1) Les structures de recherche et développement (Itavi, Inra, Arvalis, Terres Inovia, Cereopa), l’Association française de zootechnie, l’école d’ingénieurs Isara Lyon, et le lycée agricole de Nermont.

Mieux coordonner le végétal et l’animal

Plusieurs leviers techniques et organisationnels contribueront à l’amélioration de l’autonomie protéique en France. C’est ce que souligne une enquête réalisée par l’Itavi et l’Isara auprès d’acteurs des filières, depuis la production végétale jusqu’à la distribution, mais aussi de la recherche et des associations environnementales. L’amélioration des itinéraires culturaux, le développement des outils et des procédés de transformation, l’amélioration des connaissances sur les matières premières et les animaux faciliteront la disponibilité et l’utilisation de matières premières riches en protéines par les volailles. L’évolution de l’offre devra naître d’un travail collectif faisant se rencontrer l’ensemble de la chaîne de valeur : exploitants agricoles - organismes stockeurs - fabricants d’aliment – organisations de production - abattoirs - distributeurs – consommateurs, afin de partager les attentes et les contraintes, mais également de répartir l’investissement.

Faire évoluer les comportements relationnels

Un jeu de rôle réalisé avec des acteurs impliqués dans la chaîne de production (de l’agriculteur au distributeur) a permis à chacun de prendre conscience des conséquences de leurs choix. Le but du jeu qui a été organisé par l’Inra, l’Isara et l’Itavi, était de produire des poulets alimentés localement pour un distributeur, en convertissant 20 % de la production conventionnelle sous un nouveau cahier des charges « 100 % des matières premières végétales françaises ». Chaque participant avait un tableur lui permettant de calculer ses coûts de production et ses marges. Cette mise en situation « réelle simplifiée » a permis d’observer les comportements et les solutions proposées mais surtout à chaque partenaire de prendre du recul sur ses choix. La difficulté à engager des contractualisations à long terme à différents niveaux est apparue. Pour l’agriculteur, le manque de lisibilité des débouchés de sa production ressort également. Ce jeu de rôle est à disposition des acteurs et peut servir à engager des discussions dans un cadre original et efficace.

Les consommateurs et l’alimentation des poulets

Les consommateurs ont une assez faible connaissance des modes d’alimentation des volailles. C’est ce que conclut l’Isara qui a organisé deux groupes d’échanges (« focus group ») réunissant une vingtaine de consommateurs de poulet. S’ils expriment le besoin d’être rassurés au travers notamment d’une meilleure information, cela semble davantage concerner les conditions d’élevage avec des attentes fortes sur le bien-être animal. L’origine nationale ou régionale est néanmoins régulièrement citée parmi les principaux critères d’achat. En revanche, ils estiment que la prise en compte de critères sur l’alimentation des poulets n’est pas prioritaire car ils la trouvent trop complexe à appréhender. Enfin, si l’évocation de l’introduction d’insectes dans l’alimentation des poulets est perçue comme « naturelle », l’utilisation d’algues est a priori moins bien accueillie.

En savoir plus

Colloque d’échanges le 19 décembre

Pour mieux faire connaître les résultats du projet Vocalim et faire dialoguer les producteurs de matières premières végétales avec ceux qui les utilisent, l’Itavi organise un colloque le 19 décembre à l’ESA d’Angers. Il s’intitule « Quelles protéines pour alimenter les volailles ? Les filières végétales et animales dialoguent et innovent. »

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