Enfouir le lisier aussi sur les prairies
Au-delà de l’obligation réglementaire, l’enfouissement présente des intérêts agronomiques et environnementaux. Des solutions existent aussi pour les prairies.
Au-delà de l’obligation réglementaire, l’enfouissement présente des intérêts agronomiques et environnementaux. Des solutions existent aussi pour les prairies.
Près de 200 personnes ont participé le 26 septembre à la journée sur l’enfouissement des lisiers organisée par Entrepreneurs des territoires (EDT) Pays de la Loire, les chambres d’agriculture des Pays de la Loire et l’entreprise de travaux agricoles Fonteneau (85). « L’enfouissement du lisier présente plusieurs intérêts, souligne Gaëlle Pauthier, de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. Les pertes d’azote par lessivage et volatilisation sont réduites. L’azote est apporté au niveau des racines. Il y a moins d’odeurs, ce qui permet une meilleure acceptation par les voisins. » Sur terres arables, le lisier non assaini peut être enfoui avec quatre dispositifs (lire ci-contre). Enfin, l’épandage avec une rampe à pendillards reste possible (voire avec la buse palette qui est « proscrite » mais pas encore interdite) si un second engin passe juste après.
Pertes d’azote limitées à 5 %
« Le problème se pose surtout pour les prairies en place que les producteurs veulent fertiliser sans les détruire », note Gaëlle Pauthier. Des solutions existent désormais avec les enfouisseurs à disques, droits et rapprochés ou bien inclinés et plus espacés. Existent aussi des enfouisseurs avec un patin qui remplace le disque. Le patin crée un léger sillon où est déposé le lisier. L’entreprise de travaux agricoles Fonteneau présentait un injecteur de prairie de marque Vrelo. Des disques droits portés par une rampe de 9 m de large et espacés de 17 cm fendent le sol sur 5 à 10 cm de profondeur au maximum, sans remuer la terre. Des socs déposent le lisier dans les fentes où il s’infiltre rapidement. L’ensemble proposé par l’ETA Fonteneau est constitué de l’injecteur à disques, d’une tonne de 22,5 m3 à trois essieux équipée d’un débitmètre, tirée par un tracteur de 250 CV. Selon la dose/hectare, le débit de chantier varie de 60 à 100 m3/heure.
Outre la limitation des odeurs, l’enfouissement sur prairies permet une forte économie d’azote. « Avec l’épandage à la palette, 70 % de l’azote est perdu, indique Brice Fonteneau. Avec l’injection, les pertes sont limitées à 5 % (1). Le rendement en herbe est ainsi augmenté de 15-20 % par rapport à un épandage aux pendillards. » L’enfouissement implique par contre d’intervenir sur sol portant et de respecter un délai de six semaines avant la prochaine récolte pour éviter tout risque d’intoxication des animaux. En pratique, les interventions sont réalisées en février-mars ou bien juste après une récolte en avril, mai, juin ou septembre-octobre. Il est conseillé d’éviter d’agir sur des sols compactés ou desséchés, les jours de vent et de forte chaleur (émissions multipliées par 5) et de préférer un vent faible et une humidité du sol élevée (émissions divisées par 2).
Soigner l’organisation du chantier
Le coût facturé par la SARL Fonteneau est de 140-150 €/heure (deux euros par m3 pour 1 à 1,5 km entre la fosse et les parcelles). « Le temps de transport et l’organisation du chantier sont très importants dans le coût de revient de l’épandage », souligne Freddy Bodin, délégué régional d’EDT Pays de la Loire. Une alternative à l’ETA est l’acquisition du matériel, en propre ou en Cuma. Par exemple, un injecteur Vrelo de 6,80 m de large avec débitmètre coûte 45 000 €, auquel ajouter la tonne (150 000 € pour une 22,5 m3) et un tracteur forcément puissant (170 000 € pour 250-300 CV). « Cela représente un investissement élevé, d’autant plus que nous n’avons pas de tracteur assez puissant pour ce type de matériel, constate Laurent Gourbilière, éleveur adhérent de la Cuma de La Verrie. Nous sommes bien conscients que nous n’avons pas le choix. Il faudrait que l’effort lié à la biosécurité soit partagé par toute la filière. » Gaëlle Pauthier conclut que « l’enfouisseur est utilisable pour tous les lisiers. La réduction des odeurs et la transmission de zoonoses concernent toutes les productions animales. »
(1) Aucune perte avec un enfouisseur à dents ou disques, ou un strip-till sur terre arable.Jean-Yves Lenoir, éleveur à Nuaillé (49): « Moins d’odeurs et de pertes avec un sol plus facile à travailler »
« J’ai construit mon bâtiment de canards de Barbarie de 910 m² il y a sept ans avec l’obligation d’enfouir pour avoir l’autorisation d’exploiter (proximité d’habitations). Je fais enfouir mon lisier avant colza par l’ETA Fonteneau avec un enfouisseur à dents. C’est idéal, car les odeurs ne gênent pas les voisins. Je n’ai pas de point de comparaison, mais l’azote est forcément mieux valorisé qu’à la palette où le lisier est au sol un ou deux jours avant d’être enfoui. Mon sol est aussi plus facile à labourer. Je fais épandre sur environ 15 hectares pour un coût moyen de 2,50 € à 2,75 €/m3. »
L’injection directe sur terre arable
Sur terre arable, l’injection directe du lisier valorise la quasi-totalité des éléments fertilisants. Quatre systèmes sont utilisables.
1 L’enfouisseur à dents sur lame de ressort s’utilise idéalement avant le semis (maïs, colza…) ou en déchaumage. Le travail se fait de 5 à 20 cm de profondeur.
2 L’enfouisseur à disques déchaumeurs peut s’utiliser avant le semis (colza…) ou lors de la destruction d’un couvert. Le travail se fait de 5 à 10 cm de profondeur.
3 L’enfouisseur à disques inclinés, qui ressemble à l’injecteur de prairies. Ses disques plus grands et plus espacés soulèvent le sol sans le déstructurer. C’est un outil polyvalent utilisable sur prairie et sans recherche de déchaumage. Il travaille plus profondément qu’un injecteur de prairie (5 à 15 cm).
4 Le strip-till ne travaille que la ligne de semis, en injectant tout en préparant le lit de semence. C’est l’outil idéal pour les cultures en ligne (maïs, betterave, colza…). Le travail se fait de 5 à 20 cm de profondeur.