En Hongrie, une production d’œufs à deux visages
Petites structures anciennes ou grands opérateurs modernes : la production d’œufs hongroise maintient
son passé tout en investissant dans l’avenir. Tour d’horizon, à l’occasion d’un voyage organisé par Tetra.
Cinq ans après avoir quitté la filière poule pondeuse, l’accouveur Amice Soquet fait son retour sur un marché où il avait été un des principaux diffuseurs de la souche française historique. Il a décidé de se rapprocher du sélectionneur hongrois Babolna Tetra. Un premier lot de reproducteurs Tétra SL a été mis en place en septembre dernier. Jean-Jacques Amice espère séduire ses anciens clients avec cette nouvelle souche qui se veut une alternative. Pour la faire découvrir aux opérateurs français, les deux partenaires ont convié les représentants de huit organisations à un périple de trois jours en Hongrie. Ils ont visité l’entreprise Babolna, ainsi que deux élevages utilisateurs de la souche.
Babolna Tetra, dont l’activité principale est la sélection de poules pondeuses commerciales, est implantée sur deux sites. La production est réalisée à Uraiujfalu, tandis que le siège commercial se trouve à Babolna, deux villes toutes deux situées à l’Est du pays. « Notre société d’État a débuté l’élevage industriel de volailles chair et ponte dans les années 1960, pour atteindre en 1980 le chiffre d’un million de pondeuses vendues à l’export dans 60 pays », explique Gyorgy Buza, un des deux dirigeants de la société qu’il a rachetée en 2004 avec Zlotan Budai. L’opération de privatisation, retardée quatre ans, s’est produite dans la logique générale de l’ouverture du secteur agricole au marché, réalisée dans les années 1990, après l’effondrement du commerce avec le bloc des pays communistes à la fin des années 1980.
De petites structures avec des bâtiments anciens
L’Ukraine, la Roumanie, le Vietnam, le Pakistan… Une soixantaine de pays offrent des débouchés à la souche Tetra, qui réalise près de 60 % de son chiffre d’affaires en Hongrie. En croissance, l’entreprise investit fortement, notamment dans les moyens de sélection avec la construction d’un nouveau site qui fonctionne depuis décembre 2012. Un couvoir, d’une capacité annuelle de 30 millions d’œufs, va également sortir de terre cette année.
En Hongrie, l’aviculture a deux visages, qu’ont souhaité montrer les responsables de Tetra. D’un côté, des exploitations petites et moyennes qui manquent encore de moyens de production modernes. De l’autre, des grandes exploitations privées, héritées des structures collectives des années communistes.
La ferme d’Ikervar fait plutôt partie de la première catégorie, avec des bâtiments anciens. On y trouve un lot de 35 000 pondeuses Tetra et un deuxième lot de 35 000 pondeuses de la souche Lohmann. « Ce n’est pas pour comparer les deux, mais pour des raisons économiques », explique Jenö Erös, le président de la quinzaine de propriétaires de la ferme, dont les activités principales sont les travaux agricoles et la fabrication d’aliment du bétail. Les poules sont nourries deux fois par jour, avec un coût de l’aliment évalué à 330 euros la tonne. Compte tenu de son enclavement, la Hongrie est pénalisée pour ses approvisionnements en matières premières importées. On y trouve également un centre de conditionnement. Quant à la commercialisation des oeufs, la moitié se fait en vente directe et l’autre moitié vers la grande distribution.
Changement de décor à Gyermeli, avec la visite d’un des plus gros entrepreneurs du pays, qui possède 9 000 hectares et pratique l’intégration verticale du champ à la fourchette. Le groupe, qui porte le nom de la ville, emploie 450 personnes et dégage un chiffre d’affaires de 70 millions d’euros. Il dispose d’une usine de pâtes alimentaires ultramoderne qui lui permet de réaliser 35 % de la production hongroise de pâtes (25 000 tonnes). Gyermeli met également sur le marché 10 % du volume national de farine et 5 % du blé.
Un grand opérateur avec des fermes modernes et subventionnées
Le cheptel de poules pondeuses s’élève à 600 000, soit 12 % du cheptel hongrois, selon Zsigmond Bokros, le directeur de la société. Douze bâtiments, tous situés sur le même site, sont consacrés aux pondeuses et quatre à l’élevage des poulettes. « Depuis trois ans, nous sommes 100 % Tetra et nous utilisons 50 % de notre production d’œufs pour les pâtes », détaille Zsigmond Bokros. Il explique que « les résultats sont meilleurs dans les anciens bâtiments. Il y a plus de pertes d’œufs dans le nouveau, notamment à cause des pontes sur les perchoirs ».
Le coût de construction d’un bâtiment est évalué à 20 euros par poule. Les délais de construction sont courts au regard de ceux que l’on constate en France. « Nous avons eu six mois de préparation pour les démarches administratives, et ensuite six mois de travaux », témoigne un des responsables du groupe, qui indique par ailleurs que l’aide européenne correspond à un tiers de l’investissement.
La délégation française a été frappée par le contraste entre les structures et par l’abondance de main-d’œuvre, relativement logique compte tenu des couts salariaux (450 euros par mois). Cependant, les résultats techniques sont assez similaires à ceux obtenus en France, avec des méthodes d’élevage parfois différentes.
130 à 140 000 tonnes d’œufs
. La Hongrie compte environ 10 millions d’habitants pour une surface de 93 000 km2 (250 km du Nord au Sud et 500 km d’Est en Ouest).
. Le volume annuel d’œufs de consommation produits, selon des statistiques de l’Union européenne, fluctue entre 130 et 140 000 tonnes : 136 000 tonnes en 2010, 124 000 tonnes en 2011, 130 000 tonnes en 2012 et 135 000 tonnes sont prévues en 2013. Selon l’IEC, la consommation hongroise a été de 247 œufs par habitant en 2011.
. Quant aux mises en place de poulettes, selon MEG, elles sont en nette augmentation depuis 2011 : 7,4 millions cette année-là, suivies de 7,3 millions en 2012. Auparavant, les volumes oscillaient entre 6 et 6,5 millions.
. La production de volailles de chair se situe aux alentours de 400 000 tonnes équivalent carcasse, en légère progression (environ 20 000 tec/an).