Le thym, un bon couvre-sol pour le rang de vigne en terrain séchant
Les premiers essais menés dans le cadre du programme Casdar PlacoHB au lycée de Montreuil-Bellay dans le Maine-et-Loire montrent l’intérêt du thym comme couvre-sol permanent sur le rang, mais uniquement sur sol séchant.
Les premiers essais menés dans le cadre du programme Casdar PlacoHB au lycée de Montreuil-Bellay dans le Maine-et-Loire montrent l’intérêt du thym comme couvre-sol permanent sur le rang, mais uniquement sur sol séchant.
Le programme Casdar interfilières PlacoHB, piloté par l’Astredhor (institut technique de l’horticulture) et qui s’étend de 2017 à 2020, vise à étudier l’intérêt de différentes plantes pour l’enherbement permanent d’endroits difficiles à travailler mécaniquement. Pour la vigne, l’objectif est notamment de trouver des espèces pouvant servir de couvre-sol permanent sous le rang. Dans ce cadre, des essais ont été engagés au lycée agricole de Montreuil-Bellay en Maine-et-Loire, sur la plate-forme régionale d’expérimentation en lien avec l’IFV. « Les critères pour le choix des espèces à tester étaient qu’elles restent basses pour ne pas favoriser le gel de printemps, qu’elles soient pérennes et résistent au gel et à la sécheresse, qu’elles couvrent rapidement le sol, qu’elles ne soient pas concurrentielles de la vigne et qu’elles ne relarguent pas d’azote en été pour ne pas favoriser un excès de vigueur et donc le botrytis, explique Laurent Dutruel, responsable de la plate-forme. Il fallait aussi qu’elles attirent les auxiliaires et qu’elles soient résistantes au piétinement, l’idée étant qu’elles puissent éventuellement déborder du cavaillon pour en faire une bande de roulement pour la roue du tracteur. »
Sur les conseils d’un pépiniériste local, deux variétés de thym (Thymus polytrichus et Thymus longicaulis) et de la turquette (Herniaria glabra) ont été testées sur deux parcelles, l’une limono-sableuse, pouvant être soumise à des stress hydriques, l’autre argilo-calcaire, moins séchante. La parcelle limono-sableuse a reçu les deux variétés de thym, la parcelle argilo-calcaire le Thymus polytrichus, adapté aux sols lourds, et l’Herniaria glabra. Les plants en minimottes ont été installés manuellement en novembre 2016, à raison de 10-12 plants par mètre linéaire, après passage d’une lame interceps pour émietter le sol. L’idée étant de limiter l’entretien, ils n’ont pas été arrosés mais ont bénéficié de pluies peu après la plantation.
Bon développement de Thymus longicaulis
Sur la parcelle limono-sableuse, Thymus longicaulis s’est très bien développé. Au bout d’une année, il recouvrait 60 % de la surface sous le rang, 25 % étant occupés par des adventices et le reste en sol nu. Et fin 2018, le recouvrement par le thym était de près de 80 %, avec 15 % d’adventices et légèrement plus de sol nu. Thymus polytrichus s’est développé plus lentement et a poussé surtout en été. Fin 2017, le pourcentage d’adventices était toutefois le même qu’avec Thymus longicaulis, de 25 %. Mais fin 2018, le recouvrement était un peu plus limité, de 70 %, pour 20 % d’adventices et 10 % de sol nu. « Sur cette parcelle stressante, c’est donc Thymus longicaulis qui s’est le mieux développé », souligne Laurent Dutruel. Un premier entretien a été réalisé sur cette parcelle en 2019, avec le passage d’une tondeuse interceps. « Les deux espèces restent très basses, à 2-3 cm pour Thymus polytrichus et 5-10 cm pour Thymus longicaulis. Il y avait toutefois certaines adventices, notamment de la luzerne d’Arabie, de la vesce et de l’épilobe, qui auraient pu empêcher le couvre-sol de recevoir la lumière. Cet entretien n’est toutefois pas obligatoire. » Concernant la biodiversité, le nombre total d’insectes n’a pas été impacté. La présence de thym a par contre entraîné un plus grand nombre d’espèces d’insectes, mais pas plus d’insectes nuisibles. « Quand le thym fleurit, en avril pour Thymus longicaulis et en juin pour Thymus polytrichus, il y a par contre plus de biodiversité, sans compter l’aspect esthétique. » Le gel n’a pas été favorisé par le couvre-sol. Les mesures de bois de taille n’ont pas montré de différence avec le témoin désherbé mécaniquement. Et il n’y a pas eu non plus de différence de rendement, ni de maturité. « C’est toutefois surtout la 3e année que l’on peut voir l’effet d’un changement sur la vendange. Nous pourrons donc mieux en juger cette année. »
Essai concluant sur sol séchant
Au final, l’essai s’avère donc très concluant pour l’installation de Thymus longicaulis sur une parcelle stressante en termes de développement et de lutte contre les adventices, sans effet négatif pour la vigne. Les deux couvre-sols vont être conservés au-delà de 2020. Sur la parcelle argilo-calcaire, ni Thymus polytrichus, ni Herniaria glabra n’ont par contre donné satisfaction. Thymus polytrichus a poussé très lentement et s’est fait dépasser par les adventices. Herniaria glabra s’est développé plus rapidement, atteignant 60 % de recouvrement au bout d’un an, mais a ensuite régressé, jusqu’à pratiquement disparaître en 2019. « Les essais ne sont donc pas concluants sur cette parcelle, avec peut-être toutefois un problème d’implantation », analyse l’expérimentateur.
Tester le semis
Les plants de thym ont été installés par plantation de minimottes pour un développement plus rapide du couvre-sol, le programme PlacoHB ne durant que trois ans. « Toutefois, comme les minimottes coûtent 0,35 € HT par pièce et qu’il faut les planter manuellement, à raison de 10 à 12 par mètre linéaire, le coût de l’implantation est assez élevé, note Laurent Dutruel. Si le couvre-sol évite de désherber, comme il est amené a priori à durer toute la vie de la vigne, son intérêt est toutefois évident, même si nous n’avons pas fait d’étude économique. Il pourrait cependant être intéressant de tester le semis, moins coûteux que la plantation de minimottes. L’idéal serait de semer le thym par hydroseeding (hydro semis). Si de nouveaux essais sont engagés, nous le testerons sans doute. »
voir plus loin
D’autres essais dans le Sud
Des essais d’enherbement permanent sous le rang avec du thym sont également menés sur le domaine de Cazes de la chambre d’agriculture de l’Aude avec deux variétés de thym trouvées dans la garrigue et présentant l’intérêt d’avoir un enracinement superficiel, ce qui peut limiter la concurrence pour la vigne : le thym hirsute et le thym laineux. Les essais montrent un bon développement des deux variétés, avec un risque toutefois de concurrence en sol superficiel. Des essais ont également été engagés au Grab sur ces deux variétés. D’autres essais sont menés en Provence avec du thym installé cette fois entre les rangs et dans le but de pouvoir récolter et valoriser le thym en complément de la vigne.