Vaches laitières : préserver la variabilité génétique reste un défi
Lutter contre les problèmes liés à la consanguinité et créer les conditions pour adapter les races. Tels sont les enjeux des travaux sur la variabilité génétique dans un contexte où la consanguinité augmente en vache laitière.
« L’objectif des races est l’amélioration des performances sans compromettre la variabilité génétique ; et cela tout en adaptant les races aux enjeux actuels : résistance aux maladies et au stress thermique, amélioration de l’efficacité alimentaire … », rappelle Stéphanie Minery, de l’Institut de l’élevage lors d'un récent webinaire. Or le taux de consanguinité de la plupart des races laitières continue d’augmenter, bien que la sonnette d’alarme a été enclenchée il y a plusieurs années.
La génomique, non coupable
Une des questions soulevée était de savoir si la génomique, en permettant de sélectionner plus rapidement, donc en réduisant l’intervalle entre générations, faisait peser un risque sur l’augmentation du taux de consanguinité. C'est ce qui s'est produit en prim'Holstein dans beaucoup de pays.
Mais dans la plupart des autres races, « les études n’observent pas de hausse plus forte du taux de consanguinité, ni de l’apparentement (liens entre parents) depuis l’utilisation de la génomique, résume Pascal Croiseau, d’Inrae. L’accroissement de la consanguinité a même diminué en abondance, normande, montbéliarde et en vosgienne. » Finalement, tout dépend comment les races se servent de la génomique. « Dans ces races, la génomique a donné accès à de nouvelles souches. L’utilisation des taureaux a été raisonnée avec une gestion des accouplements pour éviter une hausse accentuée de la consanguinité. La génomique a permis de distribuer un nombre un peu plus élevé de taureaux », ajoute Pascal Croiseau.
Les races font attention à la variabilité génétique en veillant à sélectionner des taureaux les moins apparentés entre eux. « Les logiciels d’accouplement tiennent compte des liens de parenté. Dans certaines races, comme en abondance, certains accouplements sont interdits. Dans d’autres, l’outil alerte l’éleveur sur le risque de consanguinité et donc d’anomalie pour l’animal à naître », cite Stéphanie Minery. La gestion raisonnable est de choisir un taureau le plus original, c’est-à-dire le moins apparenté à la vache à inséminer, entre taureaux à potentiel génétique équivalent.
Définition
Taux de consanguinité : pourcentage de risque qu’un allèle soit présent deux fois chez une vache (dans l’ADN, les chromosomes vont par paire : soit un individu a deux allèles différents pour un gène et il est hétérozygote, soit il a deux allèles identiques pour un même gène et il est homozygote) et provienne du même ancêtre. Dit autrement, c’est le taux de parenté entre les parents d’un individu. Le taux de consanguinité du descendant de deux cousins germains est de 6,25 %.
La prim’Holstein prépare son virage pour la variabilité génétique
En prim'Holstein, le taux de consanguinité continue d’augmenter. Les OS se mettent en ordre de marche pour stopper cette tendance.
En race prim'Holstein, la génomique a contribué à l'emballement du taux de consanguinité. « Il est temps d'agir », plante Pierre-Alexandre Lévêque, de Prim’Holstein France (PHF).
Pour améliorer la variabilité génétique, « il faut connaître et gérer la fréquence des allèles dans l’ensemble de la population ». Le travail franco-français démarre et commence à être regardé à l’étranger. L'esprit de ce travail est que, si un animal présente un excellent potentiel génétique mais qu’il est très apparenté aux animaux présents dans la population, il serait écarté car il n’y aurait pas d’intérêt à l’utiliser, que ce soit pour la sélection ou en élevage.
Les OS de la race prim’Holstein – OS Prim’Holstein et OS Union gènes diffusion – préparent ainsi l’intégration de la parenté et des gènes d’intérêt, à effets positifs ou négatifs, dans leur programme de sélection. « Pour l’association d’éleveurs PHF, ce sera une aide supplémentaire à la gestion de la consanguinité, en plus de l’utilisation d’outil informatique par le technicien ou par l’éleveur pour la gestion des accouplements », commente Pierre-Alexandre Lévêque.
Ces caractères (parenté, gènes d'intérêt) devraient intégrer la formule d’ISU via un système de pondération non défini pour le moment. « Pour l’éleveur, la lecture sera plus directe qu’une alerte sur le risque de consanguinité. » Par exemple, si un taureau présente un gène d’intérêt négatif comme le Blird qui impacte le système immunitaire au niveau du système digestif, l’ISU de ce taureau en serait dégradé. À l’inverse, la présence d’un gène d’intérêt positif comme le gène sans corne pourrait faire monter l’ISU. Et demain, le gène Slick, qui code pour des poils courts et fins permettant de mieux résister au stress thermique, pourrait être ajouté au programme de sélection et pondérer l’ISU.