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Une volière pour protéger les canards mulards

Dans la Vienne, les frères Mitteault ont fait installer une volière pour leurs canards élevés en plein air, afin d’éviter de les enfermer en cas d’alerte aux virus influenza.

Pour une première, c’est vraiment une première. Voici deux ans la société périgourdine Deltex a monté une volière de presque trois hectares chez Hubert et Bernard Mitteault, installés dans la Vienne. La structure fait 70 mètres de large et 416 mètres de long. La maison Mitteault produit 90 000 canards mulards par an en plein air et les transforme. Les deux frères recherchaient une alternative à l’enfermement des animaux en cas de risque élevé de propagation de virus influenza. « Pour nous, les canards doivent être élevés toute l’année en plein air à partir de 3 semaines, explique Hubert Mitteault qui défend un mode d’élevage traditionnel à grande échelle. Il était hors de question de les claustrer et de changer notre méthode de production par bande de 1600 à 1800 animaux chaque semaine. D’où cette idée de volière que nous considérons comme une assurance. »

Un avis mi-figue mi-raisin

La volière a été construite sur un site existant de 17 ha.

 

 
La voie d'accès de cette parcelle de 17 ha a été recouverte sur 400 m de long et 70 m de large  © Géoportail-février 2018

 

Elle protège dix tunnels-abris avec leurs mangeoires d’alimentation extérieures et une partie des parcours (deux parcs de 7500 à 8000 m2 par tunnel).  « Nous veillons à ce qu’un parc serve au maximum deux fois par an, le temps que le couvert végétal se régénère", souligne Hubert Mitteault. Avec ses vingt parcs, le site peut donc potentiellement élever quarante lots à l’année. Après deux années de recul, le bilan d’Hubert Mitteault est mitigé. « Cette très grande structure est sensible au vent. Dès qu’il souffle, le filet fait des vagues avec des amplitudes d’au moins 50 cm. C’est gênant pour faire passer notre remorque de 3.6 m de haut dans le chemin central. » Il faudrait donc rehausser les poteaux latéraux, mais ils sont inamovibles, ou utiliser une remorque plus basse. Le mouvement d’ondulation a aussi fait décoller les poteaux intermédiaires pas assez lestés. Enfin, « avec les ondulations du filet de couverture, des câbles qui étaient en contact se sont usés et ont cassé. »

De l’ombre bienfaisante en été

Dans la volière, l’ambiance est modifiée. « En été, c’est très agréable de travailler à l’abri du soleil, constate Hubert Mitteault, mais quand il pleut beaucoup le filet retient l’humidité et s’affaisse sous le poids de l’eau. » Enfin, sanitairement, « la volière n’a d’intérêt qu’en période à risque, c’est-à-dire pendant les migrations. » Si c’était à refaire, Hubert Mitteault monterait sans doute de plusieurs volières, comme le lui avait proposé le concepteur Deltex, « mais je ne serais pas prêt à mettre le prix que ça coûte vraiment. C’est une assurance trop chère. » Pour un second site de 5 ha, il réfléchit à des bâtiments photovoltaïques pouvant abriter les canards et qui seraient reliés par des filets.

Selon Deltex « les enseignements ont été tirés »

Le constructeur Deltex s’explique sur les désagréments rencontrés par les frères Mitteault. « Nous sommes passés du prototype à cette première installation sur une surface très importante, voire trop, explique Stefan Chevrier, mais ils y tenaient pour limiter l’investissement. Nous avons mis en évidence certains défauts techniques, dont nous en avons tenu compte pour nos autres installations, notamment une volière pour mulards installée dans les Landes.»

 

 
La première volière pour canards mulards installée dans la Vienne fait plus de 400 m de long d'un seul tenant. © Deltex

 

Il détaille ces changements. « Pour réduire le coût chez Maison Mitteault, les poteaux ont été espacés à huit mètres. Il faut au maximum cinq mètres d’intervalle pour réduire l’ondulation et une longueur d’au maximum 60 mètres. La volière landaise fait 60 m par 40 m.

 

 
 

 

Les poteaux intermédiaires sont en cours de modification pour être amovibles tout en étant posés sur une embase en béton d’un mètre. Les croisements entre câbles métalliques et synthétiques ont été modifiés. Et nous avons maintenant un filet d’ombrage pris en sandwich. » Enfin, insiste Stefan Chevrier, « il faut bien avoir à l’esprit que c’est une structure qui doit pouvoir se déformer. Cette volière a subi deux épisodes de neige et quelques tempêtes à plus de 130 km/h et elle est toujours là. »

 

 

 

Trois hectares d’un seul tenant

La volière de Deltex, fabriquant de câble synthétique, a été conçue pour plier et ne pas rompre.

Le pourtour de la volière est constitué de poteaux de 4,5 m inclinés et enchâssés dans un ancrage en béton vibré de 2 m de profondeur. Espacés de 8 mètres ici, ils sont reliés par un réseau de câbles en matière synthétique qui s’étirent sans se rompre. Espacés d’environ 50 cm et croisés, les câbles forment une toile d’araignée à 4 m de haut sur laquelle est attaché le filet. Compte tenu de la largeur de 70 mètres, deux rangées de poteaux intermédiaires droits ont été ajoutées au centre. Les bandes de filet ont été déroulées sur ces câbles tendus. Avec sa maille carrée de 19 mm, le filet empêche l’intrusion d’oiseaux et crée de l’ombrage (filtration du soleil à 50 %). Les côtés sont également obturés par un filet vertical avec des ouvertures pour accéder aux surfaces hors volière. Pour éviter que des canetons se coincent dans ce filet, il a fallu installer une clôture de part et d’autre. La structure a été conçue pour durer longtemps sans entretien, sauf le filet à changer tous les 15-20 ans. Chez Maison Mitteault, la volière a été facturée environ 6 euros le m2 posé, sans compter la fourniture du béton et la location des engins de manutention prises en charge par les éleveurs. Deltex annonce aujourd’hui un coût de 12 à 16 euros du m2 prêt à l’emploi, avec des installations en France (en maraîchage) et à l’étranger (en Égypte et Arabie saoudite) à des fins d’ombrage.

Une démarche autarcique du champ à la fourchette

La Maison Mitteault s’est reconvertie dans la production de foie gras au milieu des années 70, à la suite d’un foyer de brucellose sur l’exploitation familiale. Les deux frères Hubert et Bernard se considèrent comme des artisans haut de gamme. « Il faut toujours viser l’excellence, estime Hubert, et il nous a fallu 25 ans pour dominer nos différents métiers. » Ils ont commencé par le gavage et l’abattage-transformation, puis ont décidé de tout maîtriser. Ils se sont lancés dans l’élevage en 2010 et ont acquis une ferme de 650 ha en 2014. L’ensemble mobilise 35 personnes à l’année. La Maison Mitteault vend tous ses produits à 12 000 particuliers, à une quinzaine de magasins régionaux de la grande distribution et à de grands chefs, dont le trois étoilés Michel Bras qui leur a donné accès à ce club très fermé. Leur recherche de la qualité explique pourquoi 80 % des foies gras sont surgelés. « Nous avons démontré la supériorité des foies surgelés juste après l’abattage, sans compter la praticité à utiliser du produit congelé. »

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